Ilva constitue une cible de choix pour ArcelorMittal mais sous conditions - DJ Plus
21 Mars 2017 - 5:14PM
Dow Jones News
Ambroise Ecorcheville
AGEFI - DOW JONES
PARIS (Agefi-Dow Jones)--Alea Jacta Est. Deux offres sont en cours
d'examen pour la reprise du sidérurgiste italien en difficultés
Ilva, le propriétaire de la plus grande usine d'acier en Europe,
qui avait été nationalisé et a été mis en vente par le gouvernement
italien.
Candidat à son rachat, le géant européen ArcelorMittal (MT.FR)
gagnerait à remporter cet appel d'offres. Du moins sur le plan des
fondamentaux. Car les modalités financières d'un rachat restent à
clarifier.
Même le prix proposé n'est pas connu. Associé à Marcegaglia, le
plus grand client d'Ilva, et la banque italienne Banca Intesa San
Paolo, ArcelorMittal aurait cependant offert de sources de presse
un total de 3,9 milliards d'euros pour l'italien, dont 2,3
milliards officiellement avancés en investissements.
En comparaison, le consortium mené par le groupe indien JSW Steel,
aux côtés de la Caisse des dépôts italienne, de Delfin, la holding
du fondateur et premier actionnaire de Luxottica, et Arvedi, aurait
proposé 4,2 milliards d'euros, dont 3 milliards dédiés aux
investissements. Le gouvernement italien pourrait se prononcer sur
le choix du repreneur en avril.
Tout ne repose pas sur le prix
De prime abord, le prix qu'ArcelorMittal aurait offert pour Ilva
peut paraître élevé. Même en supposant un redressement d'Ilva à des
niveaux de rentabilité proches de ceux d'ArcelorMittal en Europe,
il ferait ressortir un ratio valeur d'entreprise sur excédent brut
d'exploitation (Ebitda) d'environ 8, selon JPMorgan Cazenove.
En comparaison, la valeur d'entreprise d'ArcelorMittal représente
5,4 fois l'excédent brut d'exploitation dégagé en 2016, et 5 fois
celui attendu cette année, selon FactSet.
Toutefois, le bénéfice d'une reprise d'Ilva ne se résumerait pas au
redressement d'un actif en pertes. Elle permettrait de mettre un
terme aux pressions qu'Ilva exerce actuellement sur les prix en
Europe. A l'inverse, un rachat par le consortium mené par JSW Steel
aurait pour effet de faire entrer en Europe un nouveau concurrent
sans doute désireux d'y gagner des parts de marché.
La question du prix n'est pas anecdotique, car le bilan
d'ArcelorMittal reste fragile. Même si Moody's a récemment relevé
sa note de crédit sur ArcelorMittal, et si Standard & Poor's
adopté une perspective positive sur la dette de l'industriel, les
deux agences continuent de classer sa dette en catégorie
spéculative.
Toutefois, le poids financier que pourrait représenter Ilva pour
ArcelorMittal aux conditions évoquées doit être relativisé. De 2,3
milliards d'euros, les investissements envisagés devraient pouvoir
être répartis dans le temps. Le prix de 1,6 milliard d'euros, dont
seule une part reviendrait à ArcelorMittal, peut être comparé à un
free cashflow attendu à 1,6 milliard cette année par le consensus
FactSet.
Un savoir-faire en matière d'acquisitions, mais...
Pour pouvoir reprendre Ilva, ArcelorMittal devrait par ailleurs
passer les fourches caudines de l'antitrust européen. Avec Ilva,
ArcelorMittal contrôlerait 40% du marché de l'acier plat, selon
Jefferies, contre 33% actuellement. Mais pour sa défense, le
sidérurgiste européen n'est actuellement pas présent en Italie.
Néanmoins, des cessions pour rassurer les autorités de la
concurrence européenne ne peuvent être exclues.
Par ailleurs, pour réussir une reprise d'Ilva, ArcelorMittal
devrait naturellement réussir son intégration. L'expérience du
groupe en la matière est certes incontestable. Mais l'environnement
dans lequel il serait réalisé peut changer. "Un investissement dans
Ilva ne marchera que si la reprise européenne se confirme dans la
durée et si une réduction des capacités chinoises se traduit par un
retour de parts du marché aux producteurs européens", a souligné
Kepler Cheuvreux.
L'intérêt d'ArcelorMittal pour Ilva est compréhensible. L'absence
de mention d'un prix ferme peut également se comprendre dans le
cadre d'un appel d'offres. Mais elle ajoute un élément
supplémentaire d'incertitude sur le dossier. Pour en avoir le coeur
net, les investisseurs n'ont plus qu'à espérer que rien ne
ralentira la résolution de ce dossier.
- Ambroise Ecorcheville, Agefi-Dow Jones; 01 41 27 47 90;
aecorcheville@agefi.fr ed: ECH
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