A circonstances exceptionnelles, mesures exceptionnelles. Confronté à la baisse brutale, et vraisemblablement durable, des prix du pétrole, Technip (TEC.FR) a décidé de prendre le taureau par les cornes en lançant un plan de restructuration drastique. Mais les actions engagées laissent planer plusieurs incertitudes quant aux perspectives du groupe et à sa capacité à profiter pleinement du rebond du marché lorsqu'il se produira.



Les mesures prises sont énergiques et marquent un cap stratégique clairement défini. Alors que les majors du secteur annulent ou reportent de nombreux projets, Technip a décidé de réduire ses effectifs de 15% (6.000 personnes) et de réorganiser ses actifs pour se concentrer sur certaines activités et régions clés. Le plan occasionnera une charge exceptionnelle de 650 millions d'euros mais doit permettre de réduire les coûts de 830 millions d'euros par an.



Après les plans d'économies lancés par d'autres groupes parapétroliers français (Vallourec, CGG), cette restructuration n'a rien de surprenant compte tenu du contexte. Alors que les prix du pétrole ont fondu de près de moitié depuis un an, un groupe comme Petrobras a par exemple réduit de 41% son programme d'investissement 2015-2019, à 130 milliards de dollars, contre un précédent plan de 221 milliards de dollars initialement prévu pour 2014-2018.



Les sociétés d'ingénierie comme Technip, qui réalisent les infrastructures utilisées par les majors, sont naturellement amenées à subir le contrecoup de tels ajustements, particulièrement si le marché reste durablement déprimé, comme s'y attend le groupe français.



Un marché difficile pendant plusieurs années



Mais l'effort important consenti par Technip ne permet pas à ce stade de savoir comment il traversera les années difficiles qui s'annoncent. Si les analystes financiers s'accordent pour saluer des réductions de coûts inévitables, ils restent partagés quant aux conséquences de ce plan et aux perspectives du groupe. Bien loin des "licenciements boursiers" salués par les marchés financiers, les annonces du groupe ont provoqué une chute de près de 10% du titre Technip, les investisseurs redoutant une chute prolongée des prises de commandes jusqu'en 2017.



Dans l'immédiat, le carnet de commandes bien rempli du groupe et l'exécution des contrats en cours représentent un coussin de sécurité pour les résultats de 2015. Et le groupe a choisi de faire des coupes dans les projets et les pays les moins rentables. Selon Barclays, Technip a fait le choix de maintenir ses investissements précisément dans les secteurs qui ont le plus de chance de profiter du rebond du marché quand il se produira, comme le gaz naturel liquéfié (LNG), le LNG flottant et le raffinage et la pétrochimie de haut de gamme.



Mais il reste compliqué de prédire à quoi ressemblera le marché dans trois ou quatre ans. Et plus fondamentalement, "il est difficile de dire si les économies de 830 millions d'euros sont relutives ou dilutives par rapport à nos prévisions. Cela dépendra beaucoup de quand et si les projets refont surface sur le marché", soulignent les analystes de la banque britannique.



Un choix délicat pour les investisseurs



Dans ce contexte, le groupe a fait un pari -raisonnable- sur ce que l'avenir lui réserve. Les investisseurs aussi en sont réduits à une forme de pari: ils peuvent penser avec Oddo Securities, qui a réduit son objectif de cours à 50 euros, que le titre restera à son niveau actuel déprimé compte tenu du manque de catalyseurs à l'horizon. D'autres, à l'image de Morgan Stanley (objectif de cours de 74 euros), retiendront la solidité du carnet de commandes, l'importance des réductions de coûts et la possibilité d'une bonne résistance des marges pour profiter de la faiblesse actuelle du titre.



Technip, comme le reste du secteur, n'en a pas fini de mesurer l'impact de la baisse des prix du baril.



-Thomas Varela, Dow Jones Newswires; +331 40 17 17 72; thomas.varela@wsj.com (ed/BH)