Julien Marion,



Agefi-Dow Jones





PARIS (Agefi-Dow Jones)--Renault a très mal négocié le virage du troisième trimestre. Vendredi, le titre du constructeur chute de 12,2%, accusant la plus forte baisse du CAC 40, à la suite d'un avertissement sur résultats retentissant.



Le groupe présidé par Jean-Dominique Senard a annoncé jeudi soir tabler désormais sur un recul de son chiffre d'affaires de 3% à 4% pour 2019, alors que le constructeur comptait auparavant atteindre des revenus proches de ceux de 2018, hors effet de changes et de périmètre. La marge opérationnelle de l'ensemble de l'exercice est désormais attendue autour de 5% contre environ 6% précédemment. Par ailleurs, Renault ne garantit plus que son flux de trésorerie libre soit positif sur l'ensemble de l'année, même s'il devrait être dans le vert au second semestre.



L'ampleur de ces révisions stupéfie les analystes. Jefferies se dit ainsi surpris non pas par l'avertissement sur résultats mais par sa "magnitude". Oddo BHF, qui est passé de "achat" à "neutre" sur la valeur, évoque un "profit warning déroutant par son timing et son ampleur" et dont le bureau d'études a du mal à cerner les raisons.



Directrice générale par intérim depuis l'éviction de Thierry Bolloré vendredi dernier, la directrice financière, Clotilde Delbos, a imputé cet avertissement à la faiblesse de plusieurs marchés du groupe au troisième trimestre, particulièrement la Turquie et l'Argentine. L'industriel peine également à réduire ses dépenses de recherche et développement autant qu'il le souhaite. La dirigeante a aussi expliqué que des "soucis techniques" avaient empêché Renault de bénéficier à plein régime des lancements de ses nouveaux modèles. Ces problèmes sont toutefois en cours de résolution, a assuré Clotilde Delbos.



Le fait que cette annonce survienne seulement une semaine après la révocation de Thierry Bolloré suscite des interrogations légitimes dans la communauté financière. Le président de Renault, Jean-Dominique Senard, avait assuré lors du limogeage de l'ancien directeur général que ce départ n'était pas lié à la performance du constructeur.



Une opportunité pour l'Alliance



Cet impair doit en tout cas pousser Renault à intensifier la coopération de l'alliance Renault-Nissan-Mitsubishi, en particulier avec Nissan, dont il détient 43,4% du capital. Renault souffre mais le groupe japonais se trouve dans une pire situation. Au premier trimestre de son exercice 2019-2020, soit d'avril à juin, son bénéfice a fondu de 94,5% tandis que sa marge opérationnelle a chuté de 4% à 0,1% en un an. Or, selon Deutsche Bank, la participation de Renault dans Nissan pèse pour 65% de la valorisation boursière du groupe au losange. "Si le coeur de métier de Renault est important, l'avenir de l'action repose sur ce qui se passe avec Nissan et Fiat", écrit de son côté Royal Bank of Canada, qui maintient Renault dans la liste de ses valeurs préférées malgré son alerte.



Renault doit donc, outre ses propres performances, remettre en piste son allié japonais et resserrer leurs liens. L'arrivée d'une nouvelle direction chez Nissan, dont Jean-Dominique Senard a vanté le caractère "extraordinairement pro-alliance" doit permettre au tandem de redémarrer. Cette nouvelle gouvernance "est un très bon signe montrant que nous allons être capables de continuer à renforcer les synergies entre Renault et Nissan" ce dont les deux groupes, ainsi que Mitsubishi, "ont désespérément besoin", a appuyé Clotilde Delbos, jeudi. "Senard a une belle carte à jouer en démontrant que les choses à l'heure actuelle ne fonctionnent pas et qu'il faut mettre en place une autre structure, plus performante", glisse un analyste.



La bonne entente avec Nissan s'avère d'autant plus primordiale que le groupe japonais constitue un rouage essentiel pour pouvoir éventuellement relancer les discussions avec Fiat Chrysler Automobiles (FCA). En août, le Wall Street Journal avait révélé des discussions entre Renault et Nissan pour remodeler leur alliance dans l'espoir de pouvoir ensuite rouvrir les négociations avec le groupe italo-américain, abandonnées au printemps dernier. Jean-Dominique Senard a assuré, la semaine dernière, que le sujet "n'était pas sur la table". Néanmoins, Clotilde Delbos a affirmé jeudi à des analystes que, sur le papier, une telle opération restait "toujours aussi attrayante".



Renault a toutefois plusieurs fers au feu alors que le groupe au losange cherche un nouveau directeur général. En l'absence d'avancées avec Nissan ou FCA, l'industriel fait face à de nombreuses incertitudes qui n'incitent guère à considérer la chute boursière de ce vendredi comme un point d'entrée intéressant. Les analystes de Citigroup affirment ne pas voir "beaucoup de raisons de rechercher le titre". Plus que jamais, Renault et Nissan doivent unir leur destin afin d'accélérer dans un contexte économique adverse.



-Julien Marion, Agefi-Dow Jones; +33 (0)1 41 27 47 94; jmarion@agefi.fr ed: ECH



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(END) Dow Jones Newswires



October 18, 2019 09:40 ET (13:40 GMT)




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