Carrefour doit faire fructifier ses économies pour prolonger son rebond boursier -DJ Plus
04 Mars 2019 - 11:10AM
Dow Jones News
François Schott,
Agefi-Dow Jones
PARIS (Agefi-Dow Jones)--Arrivé chez Carrefour pour moderniser le
distributeur, Alexandre Bompard n'a pas oublié ses réflexes de
"cost-killer". La cure d'austérité imposée par l'ancien PDG de la
Fnac au numéro deux français de la grande distribution a débouché
sur 1,05 milliard d'euros d'économies en 2018, un chiffre sur
lequel peu d'analystes tablaient voilà un an.
Sur sa lancée, le groupe a relevé son objectif d'économies à 2020,
à 2,8 milliards d'euros au lieu de 2 milliards visés précédemment.
Il compte notamment sur les gains aux achats issus de ses nouvelles
alliances avec Système U en France et Tesco au Royaume-Uni, et sur
la poursuite de la chasse aux coûts en interne.
"Nous pensons que les économies peuvent se poursuivre au même
rythme en 2019 grâce à la restructuration du siège français du
groupe et aux alliances aux achats avec Tesco et Système U",
soulignent les analystes de Bryan Garnier.
La réaction mesurée du titre depuis ces annonces jeudi dernier
montre cependant que le marché attend davantage d'Alexandre Bompard
qu'un simple plan d'économies, fût-il relevé de 40%.
Le plan d'économies de Carrefour progresse bien mais il se ne
traduit pas encore par une amélioration des bénéfices en France,
notent les analystes de Bernstein. Le résultat opérationnel courant
du groupe sur son marché domestique a chuté de 33%, et sa marge
opérationnelle a atteint un plus bas historique, à 1,3%, reflétant
certains facteurs exceptionnels comme l'impact du mouvement des
Gilets jaunes en fin d'année mais aussi de piètres performances
commerciales.
Redresser les ventes en France, "la mère des batailles"
Conscient qu'il sera jugé sur sa capacité à redresser les ventes du
groupe en France, - "la mère des batailles" selon lui -, Alexandre
Bompard s'apprête à lancer une vaste restructuration du réseau
d'hypermarchés, qui pèsent pour la moitié des ventes dans
l'Hexagone et sont depuis plusieurs années boudés par les
consommateurs. Outre une réduction des surfaces non-alimentaires de
plus de 100.000 mètres carrés, Carrefour compte étendre l'ouverture
le dimanche matin à 160 hypermarchés d'ici à la fin de l'année
contre une quarantaine à fin 2018, tout en ouvrant de nouveaux
"drive" et en développant la livraison à domicile à partir des
hypermarchés. Le groupe testera également cette année en France de
nouveaux concepts de magasins à bas coûts inspirés de ses formats
Maxi discount en Argentine et Hypereconomico au Brésil.
Ces mesures mettront certainement du temps à produire leurs effets,
même si le groupe devrait bénéficier d'un environnement plus
porteur en 2019, selon Bryan Garnier. "La plupart des initiatives
concernant la proposition commerciale ne devraient porter leurs
fruits que plus tard mais le groupe pourrait, en attendant,
réinvestir une partie de ses économies dans les prix de ses
hypermarchés français [...] ce qui pourrait se matérialiser en
2019", précise l'intermédiaire financier.
Carrefour n'a pas fourni d'objectif quant à l'amélioration de son
résultat opérationnel en France cette année. Son directeur
financier, Matthieu Malige, a estimé que l'environnement était trop
incertain pour se risquer à toute prévision à ce stade. De son
côté, Alexandre Bompard a simplement noté que le résultat
opérationnel en France "n'est pas celui que nous souhaitons avoir
dans le futur".
"Un long chemin à parcourir"
Cette prudence pourrait inciter les investisseurs à se détourner du
titre du distributeur, après une hausse de 18% depuis le début de
l'année. "Nous voyons de bonnes raisons de prendre des bénéfices
sur l'action Carrefour, la principale étant que l'écart entre le
distributeur français et ses principaux concurrents s'est creusé
l'an passé en Europe en matière de part de marché", estime
JPMorgan, qui a abaissé vendredi sa recommandation à
"sous-pondérer".
La banque américaine considère qu'il est plus avantageux d'acheter
aujourd'hui l'action Carrefour Brésil, compte tenu des perspectives
bien meilleures de la filiale brésilienne.
Pour HSBC, Carrefour a encore "un long chemin à parcourir" mais le
relèvement de l'objectif d'économies est un signe positif qui
pourrait se traduire par un redémarrage des ventes et, à moyen
terme, par une amélioration des marges. L'intermédiaire financier
reste à l'achat sur le titre, comme une majorité d'analystes, mais
reconnaît que les investisseurs devront faire preuve de
patience.
En dépit de son récent rebond, le titre évolue aujourd'hui au même
niveau que début 2018, avant la présentation du plan d'Alexandre
Bompard. Si Carrefour est bel et bien en train de se transformer,
cela ne se reflète pas encore dans son cours de Bourse. La prudence
actuelle du marché peut constituer une opportunité si l'on
considère que la poursuite des économies et les initiatives
commerciales finiront par porter leurs fruits.
-François Schott, Agefi-Dow Jones; 01 41 27 47 92; fschott@agefi.fr
ed: ECH
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