Dimitri Delmond



Agefi-Dow Jones



PARIS (Agefi-Dow Jones)--Carrefour publiera son chiffre d'affaires du troisième trimestre mardi prochain, mais pour les analystes, les jeux sont faits. La performance du distributeur, à elle seule, ne permettra de redresser son cours de Bourse, préviennent les intermédiaires financiers dans des notes publiées au cours des derniers jours.



Célébrant cette année son soixantième anniversaire, Carrefour bat sérieusement en retraite face au CAC 40. Depuis janvier, l'action du groupe de grande distribution avance peu (+3,4%) et accuse un retard de près de 17% sur l'indice vedette de la cote parisienne.



Cette piètre performance ne surprend qu'à moitié : "Carrefour évolue sur le marché le plus difficile d'Europe avec les mauvais formats de magasins, les mauvais prix et de mauvaises habitudes héritées des précédents dirigeants", observait Bernstein dès cet été.



Ces derniers mois, l'entreprise dirigée par Alexandre Bompard a également perdu de la hauteur en Bourse à chaque fois que des informations de marché ont fait état d'un intérêt de sa part pour le rachat de tout ou partie de son concurrent en difficulté Casino. Dont l'action a, en revanche, progressé de 18,1% depuis le début de l'année.



Les analystes sont quasi unanimes sur le fait que l'activité du troisième trimestre sera peu flamboyante. Oddo BHF prédit "un petit trimestre en perspective", au regard des nombreux motifs d'inquiétude.



La part de marché recule en France



Selon Kantar, le distributeur a encore laissé échapper des parts de marché sur son marché domestique ces dernières semaines, du fait de la persistance d'une forte intensité concurrentielle et de la relative atonie de la consommation des ménages. En France, les comptes du troisième trimestre pâtiront également d'une base de comparaison défavorable, l'activité ayant été exceptionnellement soutenue en juillet 2018 par le pic de consommation lié à la Coupe du monde de football.



Au Brésil, qui compte pour quasiment 20% de son activité, Carrefour devrait avoir gagné des positions au cours du dernier trimestre. Mais la période devrait se caractériser par un ralentissement de l'inflation alimentaire dans le pays, à +4%, contre +7% au premier semestre, selon Barclays. Ce qui risque de pénaliser les ventes en valeur.



Au final, entre juillet et septembre, Carrefour a très probablement réalisé son pire trimestre de l'année sur le plan de la croissance, avertissent les opérateurs. Sur la période, son chiffre d'affaires devrait avoir augmenté de 1,5% à 2% en données comparables selon les prévisions moyennes des analystes, après une croissance de 3,2% au premier trimestre et de 3,9% au deuxième.



Une action fortement décotée



Dans ce contexte anxiogène, le titre Carrefour dispose d'un atout : les investisseurs ont pris la mesure de la situation, en ramenant la valorisation bien en dessous des standards du secteur. Selon les estimations d'Oddo BHF, l'action Carrefour souffre d'une décote de 19% par rapport à un ensemble de valeurs comparables. L'intermédiaire se base sur deux ratios calculés pour 2019 : celui rapportant la capitalisation au bénéfice net et la valeur d'entreprise par rapport au résultat opérationnel courant.



"Même si Carrefour venait à publier des indicateurs légèrement inférieurs aux attentes du consensus, la valorisation est tellement basse que je ne vois pas le cours de Bourse s'effondrer. Le prix des actions intègre déjà le scénario du pire, ou presque", pronostique un analyste parisien en amont de la publication du 22 octobre.



Plutôt que de se focaliser sur la performance trimestrielle, les dirigeants devraient profiter de cette présentation pour adresser des messages à même de réveiller le cours de Bourse du distributeur. Les analystes estiment que les perspectives devraient être encourageantes pour la fin d'année, étant donné la base de comparaison du quatrième trimestre, dont les performances commerciales avaient été pénalisées en 2018 par le mouvement des Gilets jaunes.



Surtout, le PDG, Alexandre Bompard, et ses équipes auraient intérêt à adresser pour 2019 un signal fort - et positif - sur le résultat opérationnel courant (ROC), l'indicateur clé de la rentabilité du distributeur. "Si Carrefour commentait les estimations du consensus sur le ROC, alors qu'il n'en a pas l'habitude, le marché serait séduit", résume un gérant. Actuellement, les analystes tablent sur un ROC médian de 2,04 milliards d'euros pour 2019, selon Deutsche Bank.



"Des indications concernant la marge de ROC et les flux de trésorerie attendus cette année en France seraient les bienvenues", estime pour sa part Clément Genelot, analyste chez Bryan Garnier. Ce dernier verrait également d'un bon œil l'annonce, par Carrefour, d'une vague d'ouvertures de corners Darty dans ses hypermarchés, alors qu'une phase de test a débuté il y a bientôt un an.



Italie, Belgique et Espagne guettées



Hors de France, les bonnes nouvelles pourraient provenir d'Italie, de Belgique ou Espagne. Le plan de transformation de Carrefour et les mesures de redressement mis en œuvre dans ces trois pays pourraient commencer à porter leurs fruits. Les investisseurs guetteront tout nouveau signal prouvant la capacité du groupe à réduire encore un peu plus ses coûts. Une condition sine qua non pour stopper l'hémorragie au niveau des marges et financer la refonte de la proposition commerciale.



L'éventail des messages positifs à adresser au marché paraît vaste pour Carrefour. A défaut de présenter des performances satisfaisantes, le groupe devra impérativement redonner espoir à ses actionnaires.



-Dimitri Delmond, Agefi-Dow Jones; +33 (0)1 41 27 47 31; ddelmond@agefi.fr ed: ECH



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(END) Dow Jones Newswires



October 15, 2019 10:33 ET (14:33 GMT)




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