En déminant ses contentieux, Imerys étoffe son potentiel boursier - DJ Plus
25 Février 2019 - 10:58AM
Dow Jones News
François Berthon,
Agefi-Dow Jones
PARIS (Agefi-Dow Jones)--Johnson & Johnson (J&J) est
toujours aux prises avec l'affaire du talc pour bébé aux
Etats-Unis. Le groupe pharmaceutique américain, qui produit
également des produits d'hygiène et des cosmétiques, a révélé jeudi
avoir reçu des demandes d'informations de la part du département
américain de la Justice et de l'autorité américaine des marchés
financiers (la Securities and Exchange Commission), concernant la
sécurité de ses talcs.
Son fournisseur Imerys en revanche, a récemment pris des mesures
visant à le mettre à l'abri de toute poursuite. A l'occasion de la
publication le 13 février de ses comptes annuels, le leader mondial
des spécialités minérales pour l'industrie a annoncé le placement
des filiales regroupant ses activités talcs en Amérique du Nord
sous la protection de la procédure judiciaire du "chapter 11" .
Le géant américain de la santé et son fournisseur Imerys font face
depuis plusieurs années à une vague de plusieurs milliers de procès
accusant le talc commercialisé par J&J de contenir de l'amiante
et d'être à l'origine de cancers. Les deux groupes ont toujours
affirmé, en s'appuyant sur des expertises indépendantes, y compris
les contrôles effectués régulièrement par la Food and Drug
Administration (FDA), l'autorité fédérale sanitaire, que ces
accusations étaient sans fondement. Pour autant, les plaintes ont
continué de s'accumuler, dans un contexte de médiatisation
croissante des contentieux liés au talc à usage cosmétique.
Cette recrudescence inquiétait de plus en plus les investisseurs,
les filiales concernées éprouvant des difficultés croissantes à
sécuriser la couverture des frais de défense au titre des
assurances historiques. Compte tenu de la spécificité du système
judiciaire américain, où les cabinets d'avocats font des actions de
groupe un véritable business, la situation n'était plus tenable
pour les filiales d'Imerys qui risquaient de consacrer tous leurs
moyens à financer leur défense dans cette affaire de l'amiante,
fondée ou non. Neutraliser tous les risques qui y étaient associés
était devenu nécessaire.
Vers un règlement "dérisqué" des litiges liés au talc
La procédure du Chapter 11 suspend immédiatement les contentieux en
cours liés au talc aux Etats-Unis. "Les filiales en question se
trouvent en quelque sorte 'délestées' du poids et des coûts de la
défense de ces contentieux devant des tribunaux. Ils vont tous être
concentrés et gérés au sein d'une structure ad hoc dont les
contours seront dessinés au cours des prochains mois", explique
Vincent Gouley, responsable des relations investisseurs d'Imerys.
Ce sera l'objet de la négociation qui aura lieu autour d'un plan de
poursuite d'activité, avec les représentants des plaignants actuels
et futurs, sous l'égide d'un tribunal fédéral unique.
Désormais, tout nouveau plaignant "ne pourra plus lancer de
contentieux séparé, mais verra sa requête traitée suivant les
conditions de la solution globale", poursuit Vincent Gouley.
Le processus à un coût pour Imerys estimé de 250 millions d'euros,
provisionné dans les comptes 2018 du groupe, en complément de 17
millions de charges encourues sur le même exercice. La somme est
importante mais "le marché devrait peu à peu se consoler avec un
potentiel règlement des litiges américains sur le talc", estime
Oddo BHF. "Cela met un terme un l'incertitude, sur ce dossier,
c'est extrêmement positif", se réjouit pour sa part Félix Brunotte,
analyste en charge des valeurs de construction chez AlphaValue.
Pour ce dernier, la solution apportée à l'affaire du talc est la
nouvelle que le marché attendait, et l'analyste "ne voit pas ce qui
pourrait empêcher désormais le cours de poursuivre sa
revalorisation". D'autant que le groupe a aussi résolu deux autres
dossiers. Il s'est d'une part retiré du marché des proppants
céramiques, utilisés pour maintenir la roche ouverte dans les puits
non conventionnels. La division était déficitaire, la demande des
producteurs s'étant concentrée sur l'usage de sables moins onéreux.
D'autre part, Imerys a mis un terme aux pertes opérationnelles
liées à sa mine de graphite en Namibie avec la "mise sous cocon" de
cette activité, se traduisant par des dépréciations et coûts de
restructuration de 78 millions d'euros.
"Arrivé en mai 2018, Conrad Keijer, le nouveau directeur général,
n'a pas perdu de temps pour apporter des solutions aux problèmes
des proppants céramique, de la mine de graphite en Namibie, et du
talc", souligne ainsi Oddo BHF.
Une nouvelle situation dont le marché n'a apparemment pas pris
toute la mesure. Bien orientée depuis le début de l'année, l'action
Imerys a amplifié sa hausse après la publication des résultats 2018
du leader mondial des spécialités minérales pour l'industrie. Avec
un cours autour de 50 euros, les sommets de février 2018 à plus de
87 euros sont encore loin. Mais les comptes annuels ont
potentiellement apporté des réponses à des questions clés qui
empoisonnent le titre depuis un an.
-François Berthon, Agefi-Dow Jones; +33 (0)1 41 27 47 93;
fberthon@agefi.fr ed: ECH
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