Emmanuel Macron a annoncé mercredi une loi sur le financement de la dépendance avant la fin 2019, un chantier d'ampleur pour faire face au vieillissement de la population, dont le coût a déjà fait reculer plus d'un gouvernement.



Traçant les grandes lignes de sa politique sur la protection sociale devant le congrès de la Mutualité à Montpellier, le chef de l'Etat a dit ne pouvoir "différer plus longtemps la réponse en matière de dépendance".



"Il nous faut construire un nouveau risque, répondre à cette nouvelle vulnérabilité sociale qu'est la dépendance", a-t-il plaidé, annonçant que "l'année 2019 sera consacrée à une loi qui sera votée avant la fin de l'année".



D'ici à 2050, la France comptera près de 5 millions de plus 85 ans, contre 1,5 aujourd'hui. Face à ce choc démographique, les dépenses liées à la dépendance, estimées aujourd'hui à près 30 milliards d'euros annuels (24 milliards d'euros en dépenses publiques, le reste reposant sur les ménages), pourraient exploser.



Déjà en avril, lors d'une interview télévisée, le président avait pris "l'engagement solennel" de "construire un financement pérenne" de la dépendance. Il avait alors évoqué comme pistes la création d'un 5e risque de la sécurité sociale ou l'instauration d'une deuxième journée de solidarité, sur le modèle du lundi de Pentecôte mis en place après la canicule meurtrière de 2003.



"Cette grande transformation ne se fera pas du jour au lendemain", a-t-il précisé mercredi à Montpellier, souhaitant "un débat national" qui mobilise "l'ensemble des acteurs de la solidarité familiale, collective, sociale".



Il ne s'agit "pas simplement d'un engagement financier", même s'il "sera au rendez-vous car il nous faut investir sur ce sujet", a-t-il poursuivi.



- "Indignation légitime" -



Si elle était instaurée par la loi, cette cinquième branche viendrait en complément des quatre branches existantes (maladie, accidents du travail, retraite, famille) de la Sécurité sociale pour couvrir les risques de la vie liés à la dépendance notamment du fait de l'avancée en âge, de la perte d'autonomie ou du handicap.



Promise puis abandonnée par Nicolas Sarkozy durant son quinquennat (2007-2012), cette mesure ambitieuse figurait en 2017 dans le programme présidentiel de Marine Le Pen.



A l'époque, l'Institut Montaigne l'avait évaluée à "9,2 milliards d'euros à court terme et de l'ordre de 16,6 milliards à l'horizon 2060", des chiffres proches de ceux cités mercredi par Emmanuel Macron faisant état d'"évaluations premières de 9 à 10 milliards d'euros".



Sous François Hollande une loi "vieillissement", en vigueur depuis 2016 et dotée de 700 millions d'euros par an, a été votée. Centrée sur le maintien à domicile, cette loi n'a jamais connu sa deuxième étape plus ambitieuse pour des raisons budgétaires.



Mais depuis l'élection d'Emmanuel Macron, la mobilisation inédite des personnels au chevet des personnes âgées (Ehpad et services de soins à domicile) a jeté une lumière crue sur les carences dans la prise en charge des aînés et les conditions d'accueil dans certains établissements.



Se disant "à bout", des milliers de personnes ont manifesté en janvier et mars pour dénoncer la "maltraitance institutionnelle" des personnes âgées et réclamer "plus de moyens humains".



Fin mai, la ministre Agnès Buzyn a présenté des mesures pour "mieux prendre en charge la dépendance", axées principalement sur les besoins des Ehpad en matière de soignants et de médicalisation d'établissements.



"Des premières réponses indispensables et d'urgence", a défendu mercredi le chef de l'Etat, se disant conscient "qu'elles ne répondent pas totalement à la souffrance de celles et ceux qui travaillent dans ces établissements, à l'indignation légitime de nombre de nos concitoyens".



Abordant également cette question délicate du financement de la perte d'autonomie, la feuille de route de Mme Buzyn a acté le lancement d'une concertation nationale qui doit "aboutir à des propositions début 2019".



Agefi-Dow Jones The financial newswire



(END) Dow Jones Newswires



June 13, 2018 11:40 ET (15:40 GMT)




Copyright (c) 2018 L'AGEFI SA