La décote d'Engie fragilise sa directrice générale - DJ Plus
06 Décembre 2019 - 9:55AM
Dow Jones News
Olivier Pinaud,
L'Agefi
PARIS (Agefi-Dow Jones)--"Le marché a compris qu'Engie avait un
positionnement distinct", affirmait récemment Isabelle Kocher, la
directrice générale d'Engie, dans un entretien à l'agence Agefi-Dow
Jones. Une partie du conseil d'administration du groupe d'énergie
ne partage visiblement pas son opinion. Jeudi, la dirigeante a dû
monter au créneau dans Le Figaro pour défendre son bilan alors que
plusieurs administrateurs du groupe militent en coulisses pour la
non-reconduction de son mandat en mai prochain, comme l'a révélé
BFM Business mercredi.
Isabelle Kocher s'oppose ainsi fermement à la vente des
infrastructures gazières du groupe énergétique poussée par une
partie de son conseil. "Les infrastructures gazières sont très
importantes, elles font partie de notre ADN. Elles sont de plus en
plus internationales et on les prépare au verdissement progressif
du gaz", a insisté la directrice générale au Figaro.
Les analystes d'Oddo BHF ont un avis différent. "Les
infrastructures gazières d'Engie sont des activités régulées qui
croissent moins vite que le reste du groupe. Leur cession, même
partielle, pourrait accélérer le profil de croissance d'Engie, avec
la mise en œuvre d'une stratégie de réinvestissement sur des
activités à fort potentiel", explique Oddo BHF. Une rotation des
actifs qu'Isabelle Kocher a d'ailleurs initiée lors de son arrivée
aux commandes en 2016 en vendant les activités énergétiques de
marchés d'Engie pour réinvestir vers des métiers en croissance,
comme les renouvelables, ou moins gourmands en capitaux, comme les
services.
La question de l'avenir des infrastructures gazières
Selon Oddo BHF, les infrastructures gazières, qui regroupent quatre
sociétés (GRDF, GRTgaz, Elengy et Storengy), représentent une
valeur d'entreprise de 33 milliards d'euros. Une fois retraités de
la dette et des intérêts minoritaires, importants chez GRTgaz et
Elengy, ces actifs représentent un réservoir potentiel de fonds
propres de 13,7 milliards d'euros.
La question de l'avenir des infrastructures gazières, dont la vente
d'une partie du capital est tout sauf une surprise puisque la loi
Pacte comprenait un article sur la privatisation de GRTgaz, cache
un débat plus profond sur la stratégie menée par l'équipe
d'Isabelle Kocher et ses effets sur le cours de Bourse. "Certains
veulent faire de la performance boursière à court terme l'alpha et
l'omega d'une stratégie", déplore la dirigeante dans Le Figaro,
insistant sur la performance du titre depuis le début de l'année :
+15%.
Pourtant, le bilan ne plaide pas en sa faveur. Engie fait moins
bien que tous ses grands comparables européens. Depuis le début de
l'année, le portugais EDP a gagné 19%, l'espagnol Iberdrola 24% et
l'italien Enel 32%. Même comparaison et même résultat depuis mai
2016, date de l'arrivée aux commandes d'Isabelle Kocher : Engie a
gagné un tout petit 1%, quand EDP prenait 15%, Iberdrola 39% et
Enel 70%.
Résultat, selon les analystes de Morgan Stanley, le titre Engie
traite actuellement à environ 11 fois le bénéfice par action estimé
pour 2021, "soit avec une décote de 20% par rapport aux utilities
intégrées comparables".
Face à ces chiffres, certains administrateurs poussent donc pour un
électrochoc. Pour se défendre, Isabelle Kocher souligne que les
rumeurs de dissension avec son conseil "laissent entendre que dans
une entreprise il pourrait y avoir une stratégie du management d'un
côté et la stratégie du conseil d'administration de l'autre, alors
que par définition c'est le conseil qui valide la stratégie de
l'entreprise". Elaboré par Isabelle Kocher et ses équipes, le plan
triennal présenté en février dernier a d'ailleurs été validé par le
conseil.
Dans ce maelström, et alors que les syndicats font part de leurs
inquiétudes face à un possible démantèlement du groupe, l'Etat,
premier actionnaire d'Engie avec 23% du capital, est étrangement
silencieux. Déjà englué dans les difficultés d'EDF, l'Etat comptait
sur un rebond du cours de Bourse d'Engie pour vendre des actions et
alimenter le fonds pour l'innovation. A 14,56 euros vendredi matin,
le titre Engie est à peine supérieur au prix de 13,80 euros auquel
il avait vendu pour la dernière fois des actions du groupe
d'énergie en septembre 2017.
Jeudi, le conseil des rémunérations et de la gouvernance d'Engie se
réunissait. Interrogé par L'Agefi, le groupe n'a pas fait de
déclaration.
-Olivier Pinaud, L'Agefi. ed: ECH
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December 06, 2019 03:35 ET (08:35 GMT)
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