Charley Grant,



The Wall Street Journal



NEW YORK (Agefi-Dow Jones)--L'envolée de Tesla en Bourse puis sa chute reposent sur un seul et même facteur : le pionnier californien de la voiture électrique est suspendu à la confiance que lui accordent ses actionnaires, tout comme ses voitures dépendent de leur alimentation électrique.



Le titre, qui a clôturé vendredi à 190,63 dollars, accuse un repli de 42% depuis le début de l'année alors même que les investisseurs du secteur technologique font montre de dispositions plutôt favorables. Le constructeur a vu sa valeur boursière fondre de quelque 30 milliards de dollars depuis l'été dernier.



L'action Tesla affiche désormais une baisse sur cinq ans et la situation devrait encore se détériorer. Deux analystes de Wall Street ont indiqué la semaine dernière que le titre pourrait, dans le pire des cas, reculer jusqu'à 36 dollars, voire davantage. Un troisième a qualifié les problèmes de Tesla de "signal d'alarme".



Si les termes sont sans doute un peu exagérés, les raisons de cette inquiétude sont manifestes.



Tesla a consommé plus de 900 millions de dollars de trésorerie au premier trimestre. Le groupe d'Elon Musk assure que l'hémorragie va cesser et qu'il commencera à générer de la trésorerie avant la fin de l'année, tout en augmentant ses dépenses d'investissement. Reste que Tesla ne dispose plus que de l'équivalent d'un an de trésorerie si sa consommation actuelle ne diminue pas.



Entré en Bourse voilà moins de dix ans, Tesla a déjà consacré près de 10 milliards de dollars à l'exploitation de son activité et à ses dépenses d'investissement, pour quatre trimestres de bénéfices seulement. A la fin mars, le groupe affichait une dette de long terme d'environ 10 milliards de dollars et ses comptes fournisseurs s'élevaient à 3,2 milliards de dollars. Le constructeur doit également honorer des milliards de dollars d'obligations d'achat, qui n'apparaissent pas au bilan et qui portent principalement sur des cellules de batteries produites par Panasonic.



La chute des actions et des obligations Tesla ne traduit pas uniquement le scepticisme des investisseurs, elle constitue elle-même, par une sorte d'effet boomerang, un motif d'inquiétude.



Les services et SolarCity pèsent sur les finances du groupe



L'équation est la suivante : la production d'une voiture électrique grand public milieu de gamme implique une forte consommation de trésorerie, alors que les ressources de Tesla sont déjà presque épuisées. Au premier trimestre, le groupe a produit 22% de voitures de plus qu'il n'en a vendues et a indiqué s'attendre à ce que la production dépasse les livraisons pendant le reste de l'année.



Pour un constructeur traditionnel, les services représentent une mine d'or, une façon d'attirer les clients chez les concessionnaires pour acheter un produit à forte marge. Pour Tesla, qui a décidé de se passer de centres d'entretien pour augmenter sa rentabilité, les services sont un gouffre. La branche du groupe qui comprend les services après-vente a perdu plus de 190 millions de dollars au premier trimestre.



Et comme Elon Musk a fait appel à Tesla en 2016 pour renflouer sa société de panneaux solaires SolarCity, le constructeur a dépensé des milliards pour financer les activités et honorer les dettes de cette entreprise. Un prêt de 180 millions de dollars arrivera à échéance en juin, tandis que 566 millions de dollars d'obligations devront être remboursées en novembre. Deux cadeaux de SolarCity.



Compte tenu de cette situation financière, la bonne tenue du cours de Bourse est cruciale.



Avec une trajectoire boursière ascendante, Tesla peut lever des capitaux frais dès que nécessaire : depuis son entrée en Bourse en 2010, Tesla a procédé tous les ans, excepté en 2018, à des levées de fonds via des émissions d'actions ou d'obligations convertibles, pour un total de plus de 12 milliards de dollars. Le cours de Bourse ayant jusqu'à présent eu globalement tendance à monter, les investisseurs ayant apporté des fonds avant cette année n'ont pas eu de doléance.



Si le retournement du titre se confirme, de telles levées de fonds pourraient se révéler plus difficiles et plus onéreuses. Et si les ventes de voitures ne permettent pas de dégager des bénéfices, Tesla aura besoin de nouveaux actionnaires et créanciers pour payer ses factures.



Craintes d'une crise de liquidités



Les craintes d'une crise de liquidités ressortent clairement dans le prix de l'obligation Tesla à 5,3% et arrivant à échéance en 2025, qui s'élevait récemment à 80,5 cents par dollar, selon le fournisseur de données MarketAxess.



Tesla a déclaré en avril qu'il prévoyait de générer un flux de trésorerie disponible positif au deuxième trimestre et sur les périodes suivantes. Les levées de fonds réalisées en mai ont permis au groupe de gagner un peu de temps.



Il faudrait maintenant qu'Elon Musk atteigne son objectif de façon un peu plus traditionnelle, c'est-à-dire en tirant cash-flow et bénéfices de ses activités habituelles.



Il aura toutefois du mal à obtenir le soutien des marchés de capitaux. Les investisseurs ayant acheté les obligations convertibles et actions ordinaires récemment émises risquent de lourdes pertes. Au prix actuel de l'obligation, Tesla devrait proposer un taux de 9% ou plus pour obtenir un nouvel emprunt.



Les données sur ses livraisons du deuxième trimestre, dont la publication est prévue début juillet, pourraient permettre un rebond du titre. Les livraisons seront certainement plus élevées qu'au premier trimestre, mais les investisseurs ne se laisseront pas impressionner facilement. Les analystes tablent sur plus de 92.000 livraisons, selon FactSet, ce qui constituerait un record trimestriel pour Tesla.



L'avenir de Tesla dépend de sa capacité à lever les milliards de dollars nécessaires à son fonctionnement et donc à convaincre les marchés financiers. Plus que tout indicateur de production ou financier, cette situation augure de difficultés pour le constructeur automobile, dont l'essor est né du marché haussier.



-Charley Grant, The Wall Street Journal



(Version française Emilie Palvadeau) ed: VLV



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(END) Dow Jones Newswires



May 28, 2019 04:32 ET (08:32 GMT)




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