"Je suis désolé". Le patron de Facebook, Mark Zuckerberg, a
présenté mardi ses excuses devant le Parlement européen, comme il
l'avait fait devant les parlementaires américains, pour les lacunes
de son réseau social dans la protection des données de ses
utilisateurs, illustrées par le scandale Cambridge Analytica.
Mais le format de son audition a provoqué beaucoup de frustration :
le temps consacré aux questions a été beaucoup plus long que les
réponses de l'Américain.
Costume sombre et cravate bordeaux, M. Zuckerberg est apparu
souriant mais un peu raide, attentif à côté du président du
Parlement Antonio Tajani. L'audition à Bruxelles s'est déroulée
devant les chefs de groupes politiques du Parlement, mais, sous la
pression de plusieurs d'entre eux, a finalement été diffusée en
direct sur internet.
Fausses informations, ingérences de l'étranger dans des élections
ou développeurs utilisant de façon mal intentionnée les
informations personnelles : Facebook n'a pas pris ses
responsabilités, a reconnu Mark Zuckerberg.
"C'était une erreur, et je suis désolé", a-t-il dit dans son
introduction. Comme déjà à Washington le mois dernier.
Les nouvelles excuses du fondateur de Facebook lui ont valu d'être
tancé par Guy Verhofstadt, le chef des libéraux (groupe ALDE). "Ca
fait déjà trois fois depuis le début de l'année", lui a-t-il
lancé.
"Comment voulez-vous qu'on se rappelle de vous ? Comme un des trois
géants de l'internet avec Bill Gates et Steve Jobs ? Ou comme un
génie raté ayant créé un monstre numérique qui détruit nos
démocraties", l'a interpellé M. Verhofstadt.
-Contrôle et responsabilité-
L'intervention à Bruxelles de Mark Zuckerberg a eu lieu à trois
jours de l'entrée en vigueur vendredi d'une législation européenne
visant à mieux protéger les données personnelles des Européens,
l'une des plus avancées dans ce domaine.
Le patron de Facebook a assuré que son réseau social partageait
entièrement les trois principes au coeur du nouveau règlement
européen : "Contrôle, Transparence et Responsabilité". Et que
Facebook sera conforme à la législation européenne dès
vendredi.
Le réseau offrira le même degré de contrôle à "tous ses clients"
dans le monde, a-t-il promis. Notamment la possibilité d'effacer
son historique de la même façon que l'on peut effacer ses "cookies"
sur internet.
Antonio Tajani a remercié le jeune milliardaire américain de sa
présence à un an des élections européennes de 2019. "Nous devons
protéger les données personnelles des citoyens (qui sont) devenues
une ressource d'une valeur inestimable", a observé l'Italien.
De son côté, Mark Zuckerberg a admis que Facebook avait été "trop
lent à identifier l'ingérence russe" dans la présidentielle
américaine de 2016, mais a précisé que sa société travaillait avec
les gouvernements européens en vue des prochaines échéances
électorales.
"Aujourd'hui était un premier pas pour Facebook pour rétablir la
confiance et il en faudra d'autres", a réagi la commissaire
européenne à la Justice Vera Jourova.
Selon des chiffres communiqués par Facebook à la Commission
européenne, les données de "jusqu'à 2,7 millions" d'Européens ont
pu être transmises de "manière inappropriée" à la firme Cambridge
Analytica, impliquée dans la campagne pour la présidentielle de
Donald Trump.
Mark Zuckerberg "a annoncé beaucoup de changements, notamment sur
la transparence des publicités politiques. Je veux croire que ce
sont des signes" montrant que Facebook fera preuve de davantage de
"responsabilité", a rétorqué Mme Jourova.
- 'Vagues promesses' -
"Vagues promesses", ont critiqué les chefs du groupes des Verts au
Parlement, Philippe Lamberts et Ska Keller. "Pas très convaincant",
a jugé Manfred Weber, le chef du Parti du peuple européen (PPE,
droite, principale force politique dans l'hémicycle).
Car l'audition bruxelloise a été suivie d'un concert de
commentaires où transparaissait la déception.
"Ce que cette audition a mis en lumière, c'est qu'on ne sait
toujours pas à quel point les données personnelles ont été
utilisées à mauvais escient. Jusqu'à ce qu'on sache vraiment ce qui
s'est passé, et se passe encore, Facebook et les législateurs ne
peuvent pas mettre en place les bonnes solutions pour empêcher les
mêmes problèmes (de se répéter) à l'avenir", a déploré Syed Kamall,
le leader des conservateurs.
"Le Congrès américain avait le bon format d'audition, mais n'a posé
que des questions faciles. Le Parlement avait les bonnes questions,
mais un format facile qui a permis à Zuckerberg d'éviter les
réponses", a résumé l'eurodéputé écologiste allemand Sven
Giegold.
Le mois dernier, les parlementaires américains avaient soumis
pendant plusieurs heures le milliardaire à une pluie de questions
pour comprendre comment la firme Cambridge Analytica avait pu
exploiter à leur insu, à des fins politiques, les données de
dizaines de millions d'utilisateurs de Facebook.
Le "Règlement général sur la protection des données" (RGPD) va
créer ou renforcer des droits individuels et imposer des
obligations strictes aux entreprises qui collectent ou traitent des
informations personnelles d'Européens, où qu'elles soient
établies.
Mercredi, M. Zuckerberg doit faire partie de la cinquantaine de
dirigeants de grandes entreprises du numérique reçus à Paris par le
président français Emmanuel Macron.
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May 22, 2018 15:25 ET (19:25 GMT)
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