L'ombre de Washington plane sur les acquisitions dans la high-tech - Plus USA
12 Février 2020 - 12:30PM
Dow Jones News
Dan Gallagher,
The Wall Street Journal
SAN FRANCISCO (Agefi-Dow Jones)--L'environnement actuel pour les
fusions-acquisitions dans le secteur technologique aux Etats-Unis
peut se résumer ainsi : les méga-fusions ne courent aucun risque,
mais on ne peut en dire autant des transactions de plus petite
taille.
Telle en tout cas semble être la conclusion que l'on peut tirer de
deux décisions adoptées mardi par les autorités américaines. D'une
part, un tribunal fédéral a donné son feu vert au projet de fusion
de 26 milliards de dollars entre Sprint et T-Mobile US, en dépit
des objections soulevées par plusieurs Etats. Ces derniers
affirmaient que réduire de quatre à trois le nombre d'opérateurs de
téléphonie mobile aux Etats-Unis nuirait à la concurrence. D'autre
part, l'autorité américaine de la concurrence, la Federal Trade
Commission (FTC), a annoncé approfondir son enquête sur les cinq
premières entreprises technologiques mondiales en passant en revue
des acquisitions qui avaient précédemment été jugées trop petites
pour faire l'objet d'un examen de concurrence.
La décision de la justice sur Sprint et T-Mobile est pour le moins
inattendue, les deux groupes ayant annoncé leur projet de fusion
voilà près de deux ans. Cette opération semblait menacée bien qu'un
accord ait été conclu l'an dernier avec le gouvernement fédéral,
initialement opposé au projet. L'action Sprint a bondi de 78% mardi
afin d'intégrer la valeur de la transaction.
Moins surprenante car les vents politiques ont tourné en défaveur
des grands groupes technologiques ces derniers temps, l'annonce de
la FTC n'en constitue pas moins un bouleversement. L'autorité a
déclaré chercher à "approfondir sa compréhension" des transactions
réalisées par le passé par Amazon, Apple, Facebook, Microsoft et
Alphabet, la maison mère de Google. Elle compte notamment
déterminer "si les grandes entreprises technologiques procèdent à
des acquisitions potentiellement anticoncurrentielles de rivaux
naissants ou potentiels", qui tombent sous le seuil requis pour
être déclarées aux régulateurs. La FTC a précisé qu'elle limiterait
son enquête aux transactions réalisées entre 2010 et 2019.
La liste reste toutefois longue. A lui seul, Google a annoncé ou
finalisé 180 acquisitions sur cette période, soit sous son nom soit
sous celui d'Alphabet, selon FactSet. La vaste majorité de ces
opérations concernent des entreprises peu connues rachetées pour
des montants trop faibles pour être déclarés.
Les rachats de DoubleClick et Youtube exclus de la liste de la
FTC
Même les plus importantes acquisitions de Google sur la période,
comme celles de Motorola Mobility pour 12,5 milliards de dollars en
2011 ou de Nest Labs pour 3,2 milliards de dollars en 2014, n'ont
rien fait pour accroître sa position déjà dominante dans la
publicité en ligne. En revanche, la période considérée par la FTC
exclut deux transactions qui ont eu un impact important sur le
coeur de métier de Google : le rachat de DoubleClick pour 3,1
milliards de dollars en 2007 et celui de YouTube l'année
précédente, pour 1,6 milliard de dollars.
Dans tous les cas, la déclaration de la FTC sème un peu plus encore
le doute sur l'aboutissement du projet d'acquisition par Google de
Fitbit, annoncé en novembre dernier.
Par ailleurs, une conséquence de cette décision est que des
transactions qui paraissent aujourd'hui judicieuses risquent d'être
sanctionnées à l'avenir, notamment si elles portent vraiment leurs
fruits. L'acquisition d'Instagram par Facebook en 2012 est souvent
citée comme une opération susceptible d'être dénouée. A l'époque,
pourtant, cette transaction ressemblait à un coûteux pari lancé par
un jeune PDG impulsif, épris d'une application de niche proposant
de partager des photos. Ce n'est que plus tard que le génie de
cette opération a pris tout son sens : Instagram est devenu un
réseau social majeur à part entière, sans être encombré par le
passif de sa maison mère.
La politique joue un rôle important dans les décisions des
autorités. Le désir de l'administration Trump de créer des réseaux
5G d'envergure nationale a contribué au soutien finalement apporté
par le gouvernement fédéral au rapprochement de Sprint et T-Mobile
US. Et l'attaque en règle des grands groupes technologiques
constitue ces temps-ci la seule activité véritablement capable de
rassembler démocrates et républicains à Washington.
Les régulateurs devraient cependant faire preuve de prudence, car
leurs initiatives risquent de dissuader les entreprises américaines
de parier sur les technologies d'avenir.
-Dan Gallagher, The Wall Street Journal
(Version française Valérie Venck) ed: ECH
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February 12, 2020 06:10 ET (11:10 GMT)
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