Julien Marion,



Agefi-Dow Jones





PARIS (Agefi-Dow Jones)--Quinze mois après l'annonce de leurs fiançailles, Gemalto et Thales convolent en justes noces. Le groupe technologique présent dans l'aéronautique et la défense a officialisé mardi la finalisation de l'acquisition du spécialiste des cartes à puces et de la sécurité numérique. Prometteuse sur le plan technologique, cette union doit encore faire ses preuves sur le volet financier pour se transformer en catalyseur.



L'acquisition de Gemalto offre plusieurs atouts à Thales. Le spécialiste de la sécurité numérique permet au groupe technologique d'augmenter son empreinte internationale, en multipliant par trois voire quatre ses effectifs dans certaines régions comme l'Inde ou l'Amérique du Sud.



Surtout, Gemalto renforce les compétences technologiques de Thales. Or la R&D constitue le cœur du réacteur du groupe, la recherche d'aujourd'hui devant amorcer les ventes de demain. "Nous nous dotons d'une puissance de frappe considérable", a déclaré le PDG de Thales Patrice Caine lors d'une conférence avec des journalistes. Avec l'intégration de Gemalto, les investissements annuels en R&D autofinancée de Thales dépassent désormais le milliard d'euros, contre 879 millions d'euros en 2018.



Thales s'offre des compétences dans l'identité numérique dont la société ne disposait pas et qui auraient nécessité des "années de R&D" pour être acquises, selon son PDG. Ces technologies vont renforcer l'offre de Thales et augmenter la valeur des solutions proposées aux clients, ce que Patrice Caine appelle "l'upselling".



Le dirigeant cite comme illustration le contrôle aérien des drones, un domaine où les technologies d'identification de Gemalto s'ajoutent aux compétences de Thales dans le contrôle aérien. Autre exemple: la signalisation ferroviaire où les technologies IoT (internet des objets) de Gemalto permettront à Thales de développer de nouvelles solutions pour optimiser le fonctionnement des trains.



Un effet relutif sur les marges



Aussi impressionnants soient-ils, le marché attend de voir la valeur créée par ces alliages technologiques. Pour l'heure, Thales n'a pas donné davantage de détails qu'il y a un an et trois mois, lors de l'annonce de son projet d'acquisition. Le groupe reviendra néanmoins par deux fois devant le marché pour apporter des précisions. D'abord avant l'été pour livrer des objectifs 2019 pour le nouvel ensemble formés par Thales et Gemalto, puis à l'automne pour actualiser ses perspectives à l'horizon 2021.



UBS estime que Thales pourrait surprendre positivement lors de ce deuxième rendez-vous. Selon la banque, le nouvel ensemble devrait afficher des objectifs plus ambitieux que ceux communiqués par Thales seul lors de sa journée investisseurs de juin dernier. Le groupe avait alors annoncé viser une marge opérationnelle (EBIT) comprise entre 11 et 11,5% d'ici à 2021 et une croissance organique annuelle moyenne de son chiffre d'affaires de 3 à 5%.



"Le profil de croissance des activités de Gemalto est supérieur à la moyenne du groupe Thales, et contribuera positivement à la croissance du nouvel ensemble", explique pour sa part Hugo Paternoster, analyste du bureau d'études indépendant AlphaValue. Selon cet intermédiaire financier, l'intégration de Gemalto devrait également avoir un effet relutif sur les marges, AlphaValue tablant sur une marge opérationnelle à 11,6% en 2021.



Des synergies de revenus à quantifier



Lors de ce rendez-vous automnal, Thales devrait aussi revenir sur les synergies attendues de l'intégration de Gemalto. Patrice Caine a confirmé mardi viser entre 100 et 150 millions d'euros de synergies de coûts d'ici à 2022, UBS retenant de son côté 140 millions d'euros. Restent les synergies de revenus, encore non chiffrées. Le groupe les détaillera à l'automne et devrait alors quantifier leur impact, ce qui pourrait constituer un catalyseur selon Oddo BHF.



Patrice Caine a indiqué que ces synergies s'articuleront autour de plusieurs leviers, comme "l'upselling" mais aussi les ventes croisées. "Nous devons être capables de vendre des solutions Thales là où Gemalto est plus présent que nous", a expliqué le PDG, citant comme exemple le ministère de l'Intérieur.



En levant davantage le voile sur les vertus financières de son union avec Gemalto, Thales pourrait redynamiser un cours de Bourse à la traîne par rapport au marché. Depuis le début de l'année, l'action du groupe a progressé de 6,4% contre plus de 14% pour les indices CAC 40 et SBF 120. Plusieurs analystes jugent le titre correctement valorisé à l'heure actuelle et, selon FactSet, la majorité d'entre eux recommandent de le "conserver". "En l'absence de catalyseur probant, nous ne nous attendons pas à une hausse significative du titre", remarque Hugo Paternoster d'AlphaValue.



Dans ce contexte, une bonne surprise sur l'impact de Gemalto permettrait au titre de sortir de sa torpeur. Et rendrait le mariage entre les deux groupes encore plus beau que sur leur faire-part.



-Julien Marion, Agefi-Dow Jones; +33 (0)1 41 27 47 94; jmarion@agefi.fr ed: ECH



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April 02, 2019 10:32 ET (14:32 GMT)




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