Sharon Terlep,



The Wall Street Journal





NEW YORK (Agefi-Dow Jones)--Du papier toilette au café, plusieurs géants mondiaux de la consommation parient sur le fait que les clients accepteront sans broncher les hausses de prix.



Procter & Gamble (P&G), Nestlé et Verizon Communications font ainsi partie de ces groupes qui veulent continuer de relever leurs tarifs ou d'inciter les consommateurs à acheter des produits plus chers en 2022 pour compenser l'envolée des coûts provoquée par les problèmes d'approvisionnement. Rasoirs Gillette, café Nestlé et burritos Chipotle font partie des articles qui risquent de devenir plus onéreuses dans les prochains mois.



Les hausses de prix sont jusqu'à présent passées comme une lettre à la poste et les consommateurs, notamment aux Etats-Unis et en Europe, sont restés fidèles aux grandes marques.



Aujourd'hui, ces grandes marques comptent sur leurs clients pour acheter davantage et compenser l'augmentation des coûts qui pèse sur leurs bénéfices, même si la montée des tensions inflationnistes pousse certains analystes à se demander si les ménages ne vont pas finir par chercher des produits meilleur marché.



"Les consommateurs n'ont pas réagi de façon significative", a déclaré la semaine dernière Andre Schulten, le directeur financier de P&G, à propos d'une série de hausses appliquées en septembre. "Nous ne sommes donc pas inquiets."



Forts de l'épargne accumulée ces derniers mois et de salaires plus élevés, et alors que le très contagieux variant Delta les pousse à rester à la maison plutôt qu'aller au restaurant, dormir à l'hôtel ou prendre l'avion, beaucoup de ménages ont un peu plus de moyens.



Des entreprises optimistes pour 2022



Les entreprises qui profitent de ces tendances ont indiqué aux investisseurs qu'elles tablaient sur des ventes et une rentabilité importantes en 2022, même si la hausse des coûts se poursuit.



P&G, qui fabrique notamment la lessive Tide et les couches Pampers, a annoncé la semaine dernière une troisième augmentation de ses prix de vente dans les prochains mois, et précisé aux investisseurs que sa rentabilité devrait s'améliorer au fur et à mesure de l'année.



Le géant mondial de l'alimentation Nestlé vient, lui, de relever pour la deuxième fois ses prévisions de résultats annuels, les consommateurs continuant de boire davantage de café de meilleure qualité à la maison même si les restrictions s'assouplissent.



Chez Chipotle Mexican Grill, même si l'addition est plus élevée, les clients continuent de s'offrir des burritos. Grâce à l'augmentation des prix des menus (et malgré l'augmentation du coût du travail et des matières premières), le bénéfice net de la chaîne de restaurants tex-mex a plus que doublé au dernier trimestre sur un an.



AT&T et Verizon, les deux principaux opérateurs mobiles américains, ont eux aussi annoncé aux investisseurs que leur chiffre d'affaires allait augmenter cette année. La raison ? De plus en plus de clients se laissent convaincre par un forfait plus cher assorti d'un abonnement à un service de streaming ou un iPhone à prix préférentiel.



Les analystes se demandent pourtant si Nestlé ne fait pas preuve d'un excès de confiance ou si P&G réussira à conserver sa part de marché quand les hausses de prix seront plus visibles et que l'inflation grignotera le pouvoir d'achat des ménages.



Les deux géants ont pourtant réaffirmé qu'ils étaient confiants. Nestlé a précisé que le café était l'activité qui contribuait le plus à sa croissance, les gammes Nescafé, Nespresso et Starbucks s'inscrivant toutes en hausse. De son côté, P&G a déclaré que les investissements réalisés ces dernières années pour améliorer la qualité des produits (les lames et les manches des rasoirs notamment, mais aussi du papier toilette plus doux) convaincraient les consommateurs de payer plus cher même si leur budget se réduit.



L'inflation se renforcera, préviennent des économistes



En septembre, aux Etats-Unis, l'inflation s'est intensifiée. L'indice des prix à la consommation, qui suit l'évolution des prix des biens et des services achetés par les ménages, a bondi de 5,4% sur un an, un rythme qu'il n'avait plus atteint depuis dix ans, selon le département du Travail. Pour beaucoup d'économistes, cette tendance va se poursuivre.



"Les aides sont en train de s'arrêter, les gens recommencent à payer leurs loyers, donc la question des prix va devenir plus sensible", prévient Nik Modi, analyste chez RBC Capital Markets.



Selon lui, les grandes entreprises qui possèdent des marques connues auront moins de mal à relever leurs prix que les marques bon marché ou plus modestes parce qu'elles ont moins de problèmes d'approvisionnement et une image rassurante pour le consommateur.



"Ce n'est pas comme si on avait le choix, il faut payer", soupire Lawrence Tam, 43 ans. Cet habitant de Houston qui anime un groupe consacré au régime cétogène raconte qu'il s'inquiète du prix de la viande : dans le magasin en bas de chez lui, le bacon coûte désormais deux fois plus cher. Il explique qu'avec sa femme, ils ont commencé de chercher des solutions pour payer la viande moins cher, mais qu'ils ne changeront pas forcément grand-chose au reste de leur chariot.



"Les prix augmentent parfois de façon assez brutale, mais les consommateurs continuent d'acheter, la demande ne baisse pas", constate Ben Reich, directeur général de Datasembly, une société spécialisée dans les statistiques sur les prix des biens de consommation.



Aux Etats-Unis, les prix en magasin ont augmenté de 1,18% en moyenne en septembre sur un an, soit près de trois fois plus que la hausse moyenne en début d'année, selon Datasembly, qui a annoncé cette semaine qu'elle allait lancer un indice des prix américains.



En augmentant ses tarifs en septembre, P&G s'est montré beaucoup plus patient que ses concurrents : Unilever et Kimberly-Clark ont relevé leurs prix depuis plusieurs mois.



Mais attention : la moindre erreur est fatale.



En 2019, Clorox a relevé les prix des sacs poubelle Glad. Les distributeurs ont répliqué en proposant plus de produits concurrents, ce qui a plombé les ventes de Clorox et donné l'avantage à son concurrent Reynolds Consumer Products, dont la marque Hefty a soudainement été plus demandée.



Pour fixer leurs prix, les entreprises doivent tenir compte de toute une série de facteurs. Le principal : la probabilité que leurs concurrents les imitent. Les patrons expliquent que, compte tenu de l'augmentation générale du coût du travail, du transport et des matières premières, ils ont bon espoir que personne ne casse les prix.



L'IA pour fixer les prix de façon ciblée



La technologie et l'intelligence artificielle permettent aussi, aujourd'hui, de fixer les prix de façon plus ciblée. Les marques savent par exemple quels clients n'achètent qu'en promotion : ils peuvent donc leur proposer des réductions qu'ils ne proposeront pas à ceux qui achètent à prix normal.



En outre, les hausses tarifaires ne sont pas toujours visibles à l'œil nu. Souvent, les entreprises préfèrent réduire la quantité de produit vendu ou faire des promotions moins importantes plutôt qu'augmenter les prix.



Parfois aussi, les distributeurs ne répercutent pas les hausses sur leurs clients. Aux Etats-Unis, les grandes chaînes de magasins avaient jusqu'à présent protégé les consommateurs des augmentations, mais les choses commencent à changer. Kroger et Albertsons ont ainsi annoncé qu'elles allaient répercuter de plus en plus de hausses sur leurs clients pour protéger leur rentabilité.



"Nous sommes très sereins vis-à-vis de notre capacité à répercuter les hausses que nous avons subies", a ainsi déclaré Gary Millerchip, le directeur financier de Kroger, lors d'une conférence avec des analystes. "Et nous pensons que cela sera encore le cas à l'avenir."





-Sharon Terlep, The Wall Street Journal



(Version française Marion Issard) ed: ECH



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October 27, 2021 05:09 ET (09:09 GMT)




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