Dimitri Delmond,



Agefi-Dow Jones



PARIS (Agefi-Dow Jones)--L'ensemble vaut moins que la somme des parties. C'est la conviction des opérateurs de télécommunications européens ayant séparé leurs principales activités en deux entreprises distinctes: la première exploite les réseaux et les infrastructures, il s'agit d'une NetCo, tandis que la seconde, la ServCo, reste en contact avec la clientèle.



Imitant la plupart de ses concurrents, Orange a annoncé en début d'année la création de sa NetCo, "destinée à devenir une entité créatrice de valeur". Baptisée Totem, la NetCo de l'ex-France Télécom est plus précisément une TowerCo puisqu'elle ne possède que des tours et des toits-terrasses accueillant des antennes mobiles. La structure regroupe pour l'instant 25.500 sites en France et en Espagne.



Totem a réalisé l'an passé un chiffre d'affaires de 500 millions d'euros et dégagé un excédent brut d'exploitation ajusté retraité de 300 millions d'euros. Cette nouvelle entité d'Orange doit être opérationnelle d'ici à la fin de l'année. Elle sera dirigée par Nicolas Roy, l'ancien directeur technique des réseaux de l'opérateur en France.



De la théorie à la pratique



La création de Totem par Orange relève du bon sens stratégique. Sur le papier, en clarifiant l'orientation de leur gestion et en améliorant leur allocation du capital, "les structures qui résulteront de cette séparation seront plus performantes", remarquent les experts du cabinet McKinsey & Company. Ceux-ci soulignent la nature "fondamentalement différente" de ces deux activités.



En théorie, la NetCo attire des investisseurs de long terme souhaitant s'exposer à des actifs physiques, tandis que la ServCo est prisée des intervenants qui recherchent un rendement plus élevé. Les valorisations des deux entités indépendantes doivent alors se recalibrer, selon un ratio valeur d'entreprise sur excédent brut d'exploitation proche de 22 pour les NetCo et autour de 4 pour les ServCo, de façon à augmenter leur valeur combinée.



Mais en pratique, ce recalibrage ne s'opère pas, ou pas dans les proportions espérées par les opérateurs télécoms. "L'efficience des marchés financiers n'est qu'un concept, comme Vodafone, Telefonica, Telecom Italia et Deutsche Telekom l'ont appris à leurs dépens", explique un analyste basé à Paris. Le cours de Bourse de ces concurrents d'Orange n'a pas bénéficié "de manière évidente" du placement de leurs infrastructures de réseaux dans une entité distincte, poursuit cet analyste.



Totem ne sera pas vendu



Orange n'a pas encore précisé les détails de sa stratégie pour créer un maximum de valeur avec Totem. Seule certitude: le groupe compte conserver le contrôle de cette structure, qui n'a pas vocation à être cédée à des spécialistes des tours mobiles comme Cellnex ou American Tower. La cession d'une part minoritaire du capital de Totem à un fonds d'investissement, voire son introduction en Bourse, sont les scénarios privilégiés par la plupart des analystes.



L'opérateur télécoms français envisage pourtant de nouer à l'avenir des partenariats stratégiques, voire capitalistiques, avec ses concurrents Vodafone et Deutsche Telekom. Aucun contact n'a été pris avec ces deux géants européens des télécoms, a prévenu Orange.



"Rien n'indique qu'Orange saura créer de la valeur là où d'autres ont échoué, d'autant que l'opérateur français est plus connu pour sa capacité à réaliser des opérations industrielles plutôt que des opérations financières", estime un analyste basé à Londres. "Orange est en train de dénaturer son ADN pour montrer qu'il est à l'écoute des envies des investisseurs, sous l'impulsion de son PDG, Stéphane Richard, qui souhaite probablement réaliser une opération structurante à moins d'un an de la fin de son mandat", déplore-t-il.



Un bilan à sauver pour Stéphane Richard



Stéphane Richard a intérêt à saisir la moindre opportunité de sauver son bilan à la tête d'Orange. Depuis sa nomination au poste de directeur général du groupe en mars 2010, l'action Orange a perdu 39,1%, quand le CAC 40 a progressé de 72,2%. La défiance du marché à l'égard de la valeur et de ses dirigeants est élevée: "L'engagement pris sur le dividende, le gain de 2,2 milliards d'euros suite à la résolution d'un litige fiscal et la vente de 50% du capital d'Orange Concessions sont autant de signaux positifs émis ou reçus par le groupe que la Bourse n'a pas valorisés", observe Stéphane Beyazian, analyste chez Stifel.



Les investisseurs n'achèteront pas l'action Orange, en dépit de ses niveaux de valorisation relativement attractifs, tant que le groupe subira d'intenses pressions commerciales et financières. L'environnement concurrentiel dans lequel évolue Orange reste volatil et tendu. De plus, le groupe s'évertue à trouver le bon équilibre entre les lourds besoins d'investissements dans les technologies et la généreuse rémunération de ses actionnaires.



Une dynamique conjuguant croissance du chiffre d'affaires et réduction des dépenses d'investissements constituerait le seul totem d'une renaissance boursière d'Orange.



-Dimitri Delmond, Agefi-Dow Jones; +33 (0)1 41 27 47 31; ddelmond@agefi.fr ed: ECH



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(END) Dow Jones Newswires



May 10, 2021 03:15 ET (07:15 GMT)




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