Thales dispose de munitions pour retrouver son statut de valeur refuge - DJ Plus
03 Septembre 2020 - 11:01AM
Dow Jones News
Julien Marion,
Agefi-Dow Jones
PARIS (Agefi-Dow Jones)--Le coronavirus a éclipsé les qualités
défensives de Thales. Si l'action du spécialiste de l'électronique
de défense et industrielle avait bien résisté à la crise des
subprimes de 2008-2009, elle perd 26% sur l'ensemble de 2020 et
évolue à des cours déprimés.
Thales s'échange actuellement 11,7 fois ses bénéfices attendus pour
2021, contre 27 fois pour Safran et 24,8 fois pour Airbus, deux
groupes pourtant bien plus exposés à la chute du trafic aérien que
l'ex-Thomson-CSF. "L'action n'a pas été aussi résiliente qu'on
pouvait l'espérer, les résultats ont été pénalisés par la crise",
résume un analyste parisien.
Les investisseurs ne doivent cependant pas exagérer les
répercussions de la pandémie sur l'industriel. "La sanction
boursière a été trop marquée par rapport au potentiel du titre",
poursuit l'analyste parisien. JPMorgan Cazenove considère pour sa
part que Thales constitue une valeur "dédaignée et sous-évaluée"
par le marché et a relevé mi-août sa recommandation de "neutre" à
"surpondérer" sur le titre.
La défense comme amortisseur
Au premier semestre, les résultats de l'industriel ont été minés
par l'effondrement de la demande de l'aéronautique civile et par
les mesures de confinement qui ont plombé la production sur
l'ensemble de ses activités. Ce deuxième impact devrait toutefois
se résorber en grande partie au second semestre. En juillet, Thales
avait indiqué qu'il escomptait retrouver des niveaux de
productivité interne proches de la normale "dès l'été".
Par ailleurs, l'exposition de l'industriel à l'aéronautique civile,
secteur qui sera durablement affecté par la crise, s'avère limitée,
à environ 11% du chiffre d'affaires. Citi juge à ce titre que "le
marché se concentre trop sur la division Aérospatiale" où sont
intégrées ces activités civiles.
Les autres segments de Thales, comme la sécurité numérique ou le
transport terrestre, souffriront bien moins de la crise au cours
des prochains mois. La défense, qui représentait près de 45% des
revenus au premier semestre, devrait particulièrement jouer son
traditionnel rôle d'amortisseur. Citi table sur une nette reprise
de l'activité de la division Défense et Sécurité avec un retour à
la croissance dès le quatrième trimestre. Morningstar se dit
confiant dans les perspectives de cette division car Thales propose
"des produits dans des domaines en croissance, tels que la
cybersécurité, les communications militaires et les capteurs
numériques".
Certains investisseurs redoutent que la crise conduisent à une
contraction des dépenses militaires. Patrice Caine, le PDG de
Thales, a toutefois livré un message rassurant sur ce point, fin
juillet, affirmant qu'aucun Etat n'avait évoqué un tel scénario.
"Au contraire, nos deux plus grands clients, la France et
l'Australie ont confirmé des budgets en croissance", a-t-il déclaré
aux analystes.
L'agence de notation Moody's s'attend pour sa part à ce que la
demande mondiale dans les activités de défense reste stable en 2020
et 2021, soutenue notamment "par une modernisation des équipements
et des tensions géopolitiques fortes".
Une dynamique de commandes positive
Thales dispose de munitions pour redorer son blason boursier et
retrouver son statut de valeur refuge. Citi est convaincu que la
valeur reste défensive et s'attend en conséquence à ce qu'elle
bénéficie à nouveau d'une prime au fur et à mesure que les
investisseurs reprendront confiance.
"S'ils arrivent à tenir leur objectif 2020 de 'book to bill' [ratio
de prises de commandes rapportées au chiffre d'affaires, NDLR]
supérieur à 1, ils démontreront leur capacité à engranger des
commandes et prouveront leur résilience", juge un analyste
parisien. "Cela dépendra en grande partie des activités de
défense", ajoute cet intermédiaire financier. Dans le sillage de la
publication des résultats semestriels en juillet, Oddo BHF avait
affiché sa confiance sur ce point, indiquant s'attendre à "un
momentum soutenu de prises de commandes dans les prochains
mois".
De plus, "une nouvelle commande de Rafale à l'export aiderait
sûrement l'action à mieux se porter", juge un analyste basé à
Londres, les équipements de l'industriel représentant environ 25%
de la valeur de l'avion de chasse. Plusieurs médias ont rapporté en
début de semaine des discussions entre la Grèce et la France sur
des ventes militaires qui pourraient inclure des contrats Rafale.
Contactés par l'agence Agefi-Dow Jones, le ministère des Armées n'a
pas répondu dans l'immédiat à une demande de commentaire tandis que
Dassault Aviation, le fabricant de l'avion de chasse, et Thales
n'ont pas souhaité s'exprimer.
Les investisseurs devront, dans tous les cas, scruter avec
attention la capacité de Thales à engranger les commandes lors des
prochains mois. La valorisation actuelle du groupe leur offre un
pari à moindre coût, qualifié de "bon point d'entrée" par JPMorgan
Cazenove. Plus largement, 60% des analystes sondés par FactSet
recommandent d'acheter le titre. Ils n'étaient que 40% voilà un an.
L'action Thales se trouve en bonne position pour regagner des
altitudes boursières plus conforme à ses fondamentaux.
-Julien Marion, Agefi-Dow Jones; +33 (0)1 41 27 47 94;
jmarion@agefi.fr ed: ECH
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