Plusieurs dizaines de milliers de personnes, dont de nombreux
cheminots, ont défilé jeudi partout en France sous le soleil pour
appeler à une "convergence des luttes" face à Emmanuel Macron. A
Paris, le cortège a été émaillé de dégradations et de heurts entre
forces de police et manifestants.
Plus de 130 mobilisations étaient organisées dans toute la France à
l'appel de la CGT et de Solidaires.
La manifestation parisienne a rassemblé 15.300 personnes, selon un
comptage réalisé par le cabinet Occurrence pour un collectif de
médias, dont l'AFP, 11.500 selon la préfecture de police, et 50.000
selon la CGT.
A Marseille, Occurrence a dénombré 5.700 personnes. La police
comptabilisait aussi 4.400 manifestants à Lyon, 4.500 à Rennes,
3.500 à Lille, 2.400 à Toulouse autour de 2.000 à Bordeaux et
Strasbourg et un millier ou plus à Perpignan, Montpellier, Nice ou
Saint-Etienne.
"Macron, président des riches", "Macron l'arrogant", "Macron le
valet des patrons": sur les banderoles, les autocollants, les
pancartes, des tags, hué par la foule à Montpellier, ou hurlé dans
les porte-voix et micros par les représentants syndicaux, le nom du
président était partout ciblé.
"Eh Manu, descend !", "Macron fait son bachar à la ZAD", pouvait-on
lire sur des tags à Paris.
- Heurts à Paris -
Dans la capitale, les manifestants ont défilé entre Montparnasse et
place d'Italie derrière une banderole affirmant: "Public + privé +
étudiants, ensemble, stoppons les régressions sociales". Dans le
carré de tête, le secrétaire général de la CGT Philippe Martinez a
demandé au gouvernement qu'"il arrête de nous prendre pour des
imbéciles et nous explique ce qu'il veut".
Des heurts ont éclaté vers 16H00 entre des manifestants et la
police. Les forces de l'ordre ont essuyé des jets de projectiles et
ont répliqué avec des gaz lacrymogènes. La façade d'un hôtel a été
endommagée par des personnes cagoulées, ainsi que de nombreuses
vitrines, notamment celles d'agences bancaires ou de compagnies
d'assurances, et du mobilier urbain.
La secrétaire générale de l'URIF-CGT, Valérie Lesage, a affirmé que
des CRS avaient "forcé le cortège" de la CGT, dénonçant des
"provocations inqualifiables et scandaleuses" de la préfecture. Le
carré de tête syndical est finalement arrivé à place d'Italie un
peu avant 18H00.
Grèves et manifestations s'accompagnaient aussi de perturbations,
notamment à la SNCF, où le taux de grévistes était plus important
jeudi (22,7%) que la veille, avec 66,4% de conducteurs à
l'arrêt.
"On est dans un bouillonnement social", a constaté Mireille
Stivala, secrétaire générale de la CGT Santé. La convergence des
luttes, "ça braque les projecteurs sur des sujets communs", a
complété Laurent Brun, secrétaire général de la CGT Cheminots.
Quelques heures plus tôt, l'intersyndicale CGT-CFDT-Sud-Unsa de la
SNCF avait annoncé qu'elle suspendait les concertations avec la
ministre des Transports, Élisabeth Borne, et attendait du Premier
ministre Édouard Philippe qu'il reprenne la main sur le
dossier.
Une trentaine de cheminots ont bloqué le trafic en gare de Lille
dans la matinée et des passagers sont descendus le long des voies
pour rejoindre les quais.
La mobilisation a affecté le secteur de l'énergie, certaines
crèches et écoles, les transports publics à Nice et en
Ile-de-France, ainsi que l'audiovisuel public.
- "Coagulation" -
Les grèves s'enchaînent: les cheminots en sont à leur huitième
journée de grève depuis début avril contre la réforme ferroviaire.
La grogne monte également dans le secteur de la santé, les hôpitaux
et les maisons de retraite médicalisées (Ehpad), chez l'ensemble
des fonctionnaires. Et le conflit salarial chez Air France est dans
l'impasse.
Des facultés sont en outre occupées ou bloquées par des opposants à
la réforme "Parcoursup", accusée d'instaurer une "sélection" à
l'entrée à l'université.
La CGT et Solidaires espèrent construire un front unique à partir
de ces colères. Une "coagulation" des "mécontentements" à laquelle
ne croit pas le président Emmanuel Macron.
Mais la "convergence des luttes" ne fait pas l'unanimité chez les
syndicats. Pour Laurent Berger (CFDT), ce mode d'action "ne
fonctionne pas". Elle "nuit à l'efficacité syndicale", a jugé aussi
la CFE-CGC.
Le président du groupe LREM à l'Assemblée Richard Ferrand voit dans
cette journée "une volonté de mettre un certain bazar en mobilisant
toute une série de professions qui n'ont pas de revendications
précises".
Mais, selon Jean-Luc Mélenchon, c'est "la radicalité du
comportement du président" qui a "poussé au rapprochement de tout
le monde".
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April 19, 2018 12:40 ET (16:40 GMT)
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