Worldline devra choisir des cibles parfaites pour dépasser sa valorisation - DJ Plus
03 Mai 2019 - 10:49AM
Dow Jones News
Julien Marion,
Agefi-Dow Jones
PARIS (Agefi-Dow Jones)--L'âge de l'indépendance est venu pour
Worldline. Le spécialiste des paiements suivra donc son propre
chemin, les actionnaires de la maison-mère Atos ayant approuvé
mardi une distribution exceptionnelle d'actions Worldline. A
l'issue de cette distribution, Atos réduira sa participation dans
le capital de sa filiale de 50,8% à un peu plus de 27%, et
déconsolidera Worldline de ses états financiers.
Atos a offert un beau cadeau à sa filiale. En coupant le cordon
ombilical, l'ancienne maison mère permet à Worldline de renforcer
sa force de frappe pour procéder à des acquisitions. La
déconsolidation de Worldline permettra de ségréger les dettes des
deux sociétés, donnant à l'entreprise dirigée par Gilles Grapinet
la possibilité de lever des fonds sans répercussion sur la notation
ou les engagements financiers d'Atos.
"Nous avons la capacité de mobiliser cette année environ 2
milliards d'euros de dette, en respectant notre politique
financière, c'est-à-dire maintenir un ratio dette nette/Ebitda
[excédent brut d'exploitation, NDLR] inférieur à 2,5", indique à
l'agence Agefi-Dow Jones, Eric Heurtaux, le directeur financier de
Worldline.
A cette force de frappe s'ajoute la possibilité pour Worldline
d'émettre des actions et d'apporter des titres lors d'éventuelles
offres de rachat. Là encore, le passage sous les 50% d'Atos au
capital de la société de paiements donnera davantage de flexibilité
à Worldline. Si bien qu'une "opération structurante de taille très
significative pourrait désormais être à notre portée", confie Eric
Heurtaux.
Synergies et consolidation, maîtres-mots du secteur
Ces marges de manoeuvre étendues sont bienvenues dans un secteur où
la consolidation demeure l'un des chevaux de bataille des
principaux acteurs. Le marché européen des paiements reste encore
très fragmenté et les économies d'échelles permises par la
croissance externe représentent un enjeu critique. "Les montants
des synergies sont extrêmement élevés dans ce secteur et
représentent souvent 20% à 30% de la base de coûts de la cible. De
plus, l'acteur qui consolidera le plus le marché européen aura une
position dominante, avec un 'pricing power' et des marges accrus",
souligne un analyste.
Worldline entend pleinement participer à ce mouvement de
consolidation. "Nous regardons énormément de dossiers, et sommes à
l'affût de toutes les opportunités sur le marché européen. Mais le
principal critère restera pour nous la création de valeur générée
par l'opération", développe Eric Heurtaux. Le groupe pourrait par
ailleurs racheter les 36,4% qu'il ne détient pas dans sa filiale
EquensWorldline et sur lesquels il bénéficiera cette année d'une
option d'achat. "La décision n'a pas encore été prise, elle
dépendra des discussions que nous aurons avec les autres
actionnaires d'EquensWorldline sur les conditions d'exercice de
cette option d'achat. Le choix devrait être formellement tranché au
deuxième semestre ", indique Eric Heurtaux.
La prochaine acquisition partiellement intégrée
En matière d'acquisitions, le savoir-faire de la société
spécialisée dans les paiements n'est plus à démontrer. Worldline
reste toutefois attendue au tournant. Le marché a partiellement
intégré les prochaines opérations de croissance externe et les
analystes sont divisés sur la capacité du groupe à repousser les
limites de sa valorisation actuelle.
En février, alors que le titre Worldline s'échangeait à 49 euros
contre 56 euros ce vendredi, Barclays jugeait que sa valorisation
reflétait le fait que le marché anticipait déjà la prochaine
transaction du groupe. HSBC juge pour sa part que la valorisation
actuelle de Worldline est "exigeante " et estime aussi qu'elle
tient compte en grande partie de l'impact de prochaines
acquisitions.
A l'inverse, Oddo BHF intègre dans son objectif de cours à 68 euros
une prime de 15% liée à la relution sur le bénéfice par action de
potentielles acquisitions financées uniquement en cash. "La valeur
actuelle de Worldline n'a pas atteint un plateau. Je suis convaincu
que le jour où nous ferons l'annonce d'une acquisition, cette
valeur se renforcera encore, grâce à la conviction que suscitera
cette opération", affirme pour sa part Eric Heurtaux.
Le groupe devra prendre soin de ne pas surpayer ses cibles: "Le
problème, c'est que compte tenu des multiples élevés dans le
secteur, il n'y a peu d'actifs de grande taille disponibles à un
prix raisonnable", constate Anil Akbar, analyste chez Kempen &
Co. "Toutefois, dans le passé, Worldline a été pragmatique et a
évité des transactions trop coûteuses", rappelle-t-il.
Les investisseurs suivront donc avec attention les prochaines
annonces du groupe en matière de croissance externe. Si la marge
d'erreur de Worldline s'avère faible, les opérateurs ne doivent
toutefois pas sous-estimer la capacité du groupe à se positionner
sur de bonnes cibles. Le rachat l'an passé du suisse SIX Payment
Services, dont l'annonce avait été saluée par une hausse de 8% à la
Bourse de Paris, l'a démontré.
En surprenant le marché avec une acquisition fortement créatrice de
valeur, Worldline renforcerait son profil financier alors que son
cours est supérieur à l'objectif moyen des analystes sondés par
FactSet, de 55,5 euros. Worldline confirmerait que son indépendance
vis-à-vis d'Atos lui permet de s'épanouir. Après tout, n'est-ce pas
ce que tous les parents souhaitent pour leurs enfants?
-Julien Marion, Agefi-Dow Jones; +33 (0)1 41 27 47 94;
jmarion@agefi.fr ed: ECH
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