Par la rédaction de l'agence Agefi-Dow Jones,
PARIS (Agefi-Dow Jones)--Les Bourses mondiales accentuent leur
chute jeudi tandis que le pétrole s'envole au-delà de 100 dollars
le baril. A Paris, le CAC 40 et le SBF 120 abandonnent
respectivement 4,3% et 4,2%, les analystes tentant d'évaluer les
impacts directs et indirects de l'invasion de l'Ukraine par la
Russie pour les principales valeurs de la cote. Le conflit accroît
les risques pour une économie mondiale déjà confrontée à des
problèmes d'approvisionnement et à une inflation élevée. Or,
l'Europe devrait supporter le gros des répercussions économiques du
conflit. Revue des entreprises du SBF 120 les plus exposées au
conflit, des enjeux pour chacune d'entre elle et de la façon dont
leur titre réagit jeudi à l'une des plus graves crises
géopolitiques depuis la fin de la Seconde guerre mondiale.
-Société Générale (-12%) est la plus exposée des banques françaises
au conflit, en raison de sa filiale Rosbank en Russie mais
l'établissement met avant le caractère très local de cette entité.
"Société Générale a mis en place un suivi précis de la situation à
tous les niveaux de l'organisation et s'attache à accompagner ses
clients et collaborateurs en fonction de l'évolution de la
situation", a déclaré un porte-parole de la banque. "Rosbank
continue d'opérer ses activités de manière normale dans un cadre de
surveillance renforcé. Rosbank est une banque russe dont l'activité
est principalement locale et nous sommes confiants dans notre
capacité à continuer à servir nos clients et à nous adapter le cas
échéant", a-t-il précisé. Selon les derniers chiffres publiés par
la banque, son produit net bancaire (PNB) issu de la Russie, à 727
millions d'euros (dont 643 millions d'euros pour Rosbank),
représente 2,8% des revenus du groupe en 2021. Le résultat net part
du groupe de ses activités russes, tous métiers confondus, totalise
quant à lui 152 millions d'euros, soit 2,7% du résultat net part du
groupe de Société Générale pour le même exercice. L'exposition
totale du groupe Société Générale à la Russie - onshore et offshore
- reste limitée puisqu'elle représente 18 milliards d'euros et
moins de 1,7% de l'exposition du groupe en cas de défaut.
L'exposition aux souverains reste limitée à 3,8 milliards
d'euros.
-Renault (-10,6%): Le constructeur automobile est fortement exposé
à la Russie via sa filiale Avtovaz, premier acteur du marché local.
Cette entreprise a dégagé en 2021 des revenus de 2,9 milliards
d'euros, soit plus de 6% du chiffre d'affaires du groupe au
losange, ainsi qu'une marge opérationnelle de 247 millions d'euros.
La Russie constitue par ailleurs, en termes de volumes, le deuxième
pays de Renault après la France, avec plus de 482.000 véhicules
vendus l'an passé. "Le marché redoute que le conflit et les
sanctions occidentales pénalisent lourdement les activités du
constructeur en Russie", souligne un analyste parisien. Toutefois,
90% de la production d'Avtovaz sert son marché domestique, et les
10% restants des pays limitrophes, comme la Biélorussie. "Pour
Renault, le risque opérationnel pourrait in fine rester limité, les
activités d'Avtovaz étant très localisées", souligne un
intermédiaire financier basé à Londres. En outre, 80% des
composants nécessaires à la production d'Avtovaz proviennent de
Russie. Le principal risque pour le groupe porterait sur
l'approvisionnement des 20% de pièces importées, avait indiqué la
semaine dernière son directeur général, Luca de Meo.
-Stellantis (-7,4%): Son directeur général, Carlos Tavares, a
déclaré mercredi que le constructeur automobile était prêt à
délocaliser ou limiter sa production en Russie, sur l'usine de
Kaluga, si ses approvisionnements venaient à être perturbés par les
sanctions occidentales. Ce site a produit 11.000 véhicules
utilitaires légers en 2021 et sa capacité peut monter jusqu'à
125.000 unités par an.
-Airbus (-5,6%) et Safran (-5,9%): Le conflit en Ukraine soulève
des inquiétudes sur l'approvisionnement en titane, un métal
critique pour l'ensemble de l'industrie aéronautique, et dont la
société russe VSMPO-AVISMA est le plus important producteur au
monde. Le directeur général de Safran, Olivier Andriès, a indiqué
jeudi que son groupe avait augmenté ses stocks ces dernières
semaines et "accélérerait" son approvisionnement auprès d'autres
sources que VSMPO-AVISMA, qui représente "moins de 50%" du total.
Airbus, de son côté, a assuré être "protégé à court et moyen
terme". "Les risques géopolitiques sont intégrés dans nos
politiques d'approvisionnement en titane", a ajouté le groupe
européen dans une déclaration transmise à l'agence Agefi-Dow Jones.
La société n'a pas souhaité communiquer son exposition à
VSMPO-AVISMA. L'entreprise russe "fournit environ 50% des besoins
d'Airbus en titane et 30% de ceux de Boeing", estime de son côté un
analyste.
-Danone (-2,9%) est l'un des groupes de produits de grande
consommation les plus présents en Ukraine et en Russie, à travers
ses marques de produits laitiers. Cependant la part des deux pays
dans ses ventes a diminué depuis le début du conflit en 2014. La
Russie ne représente plus qu'environ 5% du chiffre d'affaires du
groupe contre plus de 10% en 2013, tandis que l'Ukraine pèse moins
de 1% du chiffre d'affaires. "Dans ces deux pays, nous opérons
principalement dans la catégorie EDP [produits laitiers et
d'origine végétale, ndlr], avec un modèle principalement local, de
la collecte de lait à la production et à la distribution", a
indiqué un porte-parole du groupe à l'agence Agefi-Dow Jones. "Nos
équipes locales suivent évidemment de près la situation et mettent
en place toutes les actions nécessaires pour assurer la sécurité de
nos salariés, ainsi que la continuité de nos activités", a-t-il
ajouté.
-Tourisme et transport aérien : Déjà fortement affecté par la crise
sanitaire, le secteur du tourisme pourrait pâtir d'un conflit armé
aux portes de l'Europe. Le transporteur Air France-KLM (-7,5%) et
l'hôtelier Accor (-6%) figurent parmi les plus fortes baisses jeudi
à la Bourse de Paris. "Malheureusement pour moi, chaque année il y
a un conflit géopolitique quelque part: ça fait un de plus et on
s'en serait bien passé", a réagi le président-directeur général
d'Accor, Sébastien Bazin, jeudi sur BFM TV. Il a ajouté que le
groupe travaillait à la mise en sécurité de ses salariés en
Ukraine. Accor exploite sept hôtels en Ukraine et 55 en Russie, sur
un portefeuille de 5.600 hôtels dans le monde. "Notre exposition
directe est très limitée", a indiqué le directeur financier
d'Accor, Jean-Jacques Morin, jeudi lors d'une conférence
téléphonique.
-ArcelorMittal (-8%) a annoncé jeudi sur Twitter qu'il allait
réduire au "minimum technique" la production de son aciérie de
Kryviy Rih, l'une des plus importantes du pays, et qu'il suspendait
ses activités minières dans le pays. Le groupe avait précédemment
indiqué avoir mis en place des plans d'urgence en cas d'escalade du
conflit. ArcelorMittal compte quelque 29.000 salariés et
sous-traitants en Ukraine et a prévu en 2021 d'y investir un
milliard d'euros sur trois ans.
-Engie (-5%) a participé au financement du gazoduc controversé Nord
Stream 2, qui relie la Russie à l'Allemagne. Mardi, l'Allemagne a
décidé de suspendre les travaux de certification de ce gazoduc.
Cette certification est essentielle pour la mise en route
éventuelle de Nord Stream 2, dont les travaux ont été achevés en
fin d'année dernière et qui devait permettre l'accroissement des
livraisons de gaz russe à l'Europe. Selon ses comptes consolidés de
2021, publiés le 15 février, l'exposition d'Engie liée au projet
Nord Stream 2 s'élève au total à 987 millions d'euros, représentant
le prêt octroyé ainsi que les intérêts capitalisés. Suite à
l'annonce faite par l'Allemagne, Engie a indiqué "suivre de près la
situation et les conséquences potentielles à venir".
-TotalEnergies (-1%) ne sortira pas forcément perdant de la crise.
Les hausses des prix du gaz et du pétrole ont traditionnellement un
effet positif sur les résultats du producteur d'énergies, comme
l'avait souligné son PDG, Patrick Pouyanné, au début février. La
Russie représente "3% à 5% des revenus de TotalEnergies", a précisé
jeudi le dirigeant, selon des propos rapportés par l'AFP. Quelle
que soit l'évolution de la situation, "on gèrera", comme lors de
l'arrêt en 2015 du site de Balhaf au Yémen, a-t-il souligné. En
2020, la Russie représentait 16,6% de la production d'hydrocarbures
du groupe, selon son dernier document d'enregistrement universel.
Contacté par l'agence Agefi-Dow Jones, TotalEnergies n'a pas
souhaité faire de commentaires.
-Solvay (-7,3%) et Arkema (-7,1%): Les tensions en cours ou à
prévoir sur les prix du pétrole et de l'énergie pourraient
indirectement impacter les groupes de chimie tels que Solvay et
Arkema, tant leurs activités sont gourmandes en ressources
fossiles. UBS estime par exemple que l'énergie compte pour 10% des
coûts des produits vendus par Solvay. "Arkema et Solvay tenteront
de réduire ces risques en poursuivant leurs hausses tarifaires",
explique un gérant parisien.
-Rédaction Agefi-Dow Jones; 01 41 27 47 95; echalmet@agefi.fr ed:
ECH - VLV
(Valérie Venck, Alice Doré, Julien Marion, Dimitri Delmond,
François Schott et Franck Joselin ont contribué à cet article)
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February 24, 2022 09:35 ET (14:35 GMT)
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