Julien Marion,
Agefi-Dow Jones
PARIS (Agefi-Dow Jones)--Interparfums va répandre ses fragrances
sur le SBF 120. Le spécialiste de la conception et de la
distribution de parfums de prestige rejoint lundi l'indice
parisien, 27 ans après son entrée en Bourse.
Fondé en 1982 par Philippe Benacin et Jean Madar, deux camarades de
l'Essec, le groupe s'est constitué au fil de son histoire un
portefeuille de grandes marques sous licence, parmi lesquelles
Montblanc, Jimmy Choo ou Karl Lagerfeld.
Interparfums s'est surtout bien remis de son divorce avec Burberry,
survenu début 2013 après 20 ans de collaboration. La fin de ce
contrat l'avait alors conduit à tirer un trait sur plus de la
moitié de son chiffre d'affaires annuel.
D'autres licences sont depuis montées en puissance pour tirer sa
croissance, comme Montblanc et Jimmy Choo, qui ont plus que triplé
leurs revenus entre 2012 et 2021. Interparfums a ainsi dépassé dès
2018 son activité de 2012 avant d'atteindre des ventes records de
560 millions d'euros l'an passé. Son action, elle, a été multipliée
par plus de 12 entre début 2012 et janvier 2022.
Tensions sur les approvisionnements
Cet élan s'est brisé avec la guerre en Ukraine, le titre chutant
d'environ 18% depuis le début du conflit. La visibilité s'est
dégradée au point qu'Interparfums n'a pas encore livré ses
perspectives pour 2022.
Son activité en Russie, qui représente environ 5% de ses revenus,
se trouve compromise, l'Union européenne et les Etats-Unis ayant
décrété des embargos sur les produits de luxe. L'Europe limite
toutefois cette interdiction aux biens de plus de 300 euros,
excluant de facto les parfums de la société, tandis que cette
notion de prix n'apparaît pas dans les textes américains. Contacté
par l'agence Agefi-Dow Jones, Interparfums, dont la maison mère
Interparfums Inc. est basée aux Etats-Unis, indique analyser les
sanctions occidentales et assure qu'il les respectera
strictement.
Le conflit ukrainien risque plus largement de pénaliser la demande.
"La guerre en Ukraine crée une importante incertitude sur
l'évolution de la consommation, avec le risque que les ménages
suppriment leurs dépenses discrétionnaires, c'est-à-dire non
essentielles, dont les parfums font partie", indique Ning Godement,
analyste chez Gilbert Dupont.
Comme de nombreuses entreprises, Interparfums voit également son
horizon obstrué par la persistance des tensions sur sa chaîne
d'approvisionnement et l'inflation de ses coûts de production.
Hausses de prix
Face à cet environnement adverse, Interparfums n'est pas démuni.
Pour compenser l'augmentation de ses coûts, l'entreprise a étalé
des hausses de prix allant de 3% à 5% entre janvier et avril, et
pourrait encore relever ses tarifs au second semestre si
nécessaire. "Ils ont prouvé leur 'pricing power'", juge
Pierre-David Quenu, gérant chez GSD Gestion.
De plus, "le groupe a jusqu'ici géré avec brio les problèmes sur sa
chaîne logistique depuis qu'ils sont apparus sur la seconde partie
de 2021", souligne Ning Godement. "La société est proactive et
agile. Elle dispose de relations solides avec ses fournisseurs, a
déjà sécurisé ses approvisionnements pour 2022 et a pris les
dispositions nécessaires pour réduire les retards de livraisons à
ses clients", énumère-t-elle.
Interparfums bénéficiera surtout de plusieurs lancements cette
année, en particulier, celui de la ligne de parfums Moncler, prévu
au deuxième trimestre. Cette nouvelle licence pourrait ajouter
entre 30 millions et 40 millions d'euros de chiffre d'affaires en
2022, selon les analystes.
A terme, Moncler devrait devenir le quatrième pilier du groupe,
après Montblanc, Jimmy Choo et Coach, dont les revenus dépassent
chacun 100 millions d'euros. Oddo BHF estime de son côté que
Moncler "peut devenir un catalyseur fort" grâce notamment à la
dynamique de sa marque, un positionnement "assez unique" et une
cible "plutôt féminine", un marché deux fois plus important que le
masculin. "C'est un potentiel 'game changer'", prévient un analyste
parisien.
Un marché sous-pénétré en Chine
Moncler permettra également à Interparfums de se développer en
Asie, en particulier en Chine où la marque "possède une grande
légitimité", estime l'analyste parisien. Le marché du parfum est
voué à une forte croissance dans ce pays. Nicolas Hieronimus, le
directeur général de l'Oréal, a souligné le mois dernier que la
demande y était en pleine "explosion". "Le marché du parfum en
Chine reste sous-pénétré : il représente seulement 10% de celui des
produits de beauté de luxe, contre 35% en en moyenne en Europe et
aux Etats-Unis", souligne Loïc Morvan, analyste chez Bryan Garnier
& Co.
Interparfums génère actuellement 14% de ses revenus en Asie, part
qui pourrait monter "à 17-18% voire 20% quand Moncler sera
pleinement distribué en Asie et bien exposé en Chine", a estimé le
PDG, Philippe Benacin.
A court terme, la société devrait redonner de la visibilité fin
avril, en livrant ses objectifs de ventes annuels lors de la
publication de son activité trimestrielle. "Si Interparfums
parvient à afficher de nouveau un chiffre d'affaire en croissance
cette année, le groupe aura démontré une sacrée résilience vu le
contexte délétère", considère Ning Godement.
La récente chute du titre peut constituer un point d'entrée
intéressant. Kepler Cheuvreux est ainsi récemment passé à l'achat
sur l'action. Longtemps jugé cher par les analystes, Interparfums
offre désormais un pari attrayant aux investisseurs souhaitant
goûter l'ivresse du luxe dans le flacon d'une capitalisation
moyenne.
-Julien Marion, Agefi-Dow Jones; +33 (0)1 41 27 47 94;
jmarion@agefi.fr ed: VLV
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March 18, 2022 06:33 ET (10:33 GMT)
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