Pernod Ricard et Rémy Cointreau offrent un bon cocktail face à l'inflation - DJ Plus
08 Avril 2022 - 10:14AM
Dow Jones News
François Schott,
Agefi-Dow Jones
PARIS (Agefi-Dow Jones)--Alors qu'ils commençaient à peine à
savourer le retour des clients dans les bars et restaurants, les
groupes de spiritueux sont confrontés à de nouveaux vents
contraires depuis le début de l'année. L'accélération de
l'inflation et la guerre en Ukraine font peser des craintes sur le
pouvoir d'achat et le moral des consommateurs, qui pourraient être
amenés à tailler dans leurs dépenses non essentielles.
L'alcool n'est pas à proprement parler un bien essentiel.
Cependant, les habitudes de consommation prises pendant la crise
sanitaire, la structure des coûts et l'exposition géographique des
groupes de spiritueux sont autant de forces de rappel pour un
secteur dont la croissance reste nettement supérieure à celle des
autres produits de consommation courante.
Pernod Ricard et Rémy Cointreau, les deux principaux représentants
français du secteur avec LVMH, ont vu leurs chiffres d'affaires
progresser de 14% et 21% à taux de change constants,
respectivement, au cours du trimestre clos fin décembre, en dépit
du maintien de restrictions sanitaires dans de nombreux pays.
"Le secteur est encore en train de rebondir après la pandémie. Nous
constatons une forte propension des consommateurs à sortir de chez
eux, ce qui devrait permettre de récupérer les volumes perdus",
souligne Jefferies.
Réserves de croissance
Certains marchés ont déjà fortement rebondi en 2021, notamment les
Etats-Unis et la Chine, et la croissance devrait y être moins
vigoureuse au cours des prochains mois. Pernod Ricard estime que le
marché américain devrait revenir à une croissance moyenne de 5%
dans un avenir proche, contre près de 10% en 2021.
"Même si le marché américain se normalise progressivement dans le
courant de l'année 2022, il reste des réserves de croissance" pour
les groupes de spiritueux, souligne HSBC. La banque cite notamment
les magasins d'aéroports, un important canal de distribution pour
les alcooliers, qui devrait bénéficier de la reprise du trafic
aérien.
En Chine, les récentes restrictions sanitaires ont certes freiné la
demande des distributeurs à l'approche du Nouvel An, mais les
ventes en ligne ont progressé par rapport à la même période de
l'année dernière, note UBS. La banque pointe également la vigueur
des données de consommation aux Etats-Unis, où les spiritueux
gagnent des parts de marché par rapport à la bière.
Pouvoir de fixation des prix
Dans ce contexte, les deux groupes français prévoient d'augmenter
leurs dépenses de marketing au cours des prochains mois, ce qui
pourrait temporairement peser sur leur rentabilité. Ils sont
également confrontés à une hausse des cours des matières premières
agricoles et du transport. Mais leur positionnement haut de gamme
devrait leur permettre d'absorber une partie de ces coûts.
"Dans un environnement inflationniste, les sociétés de spiritueux
pourraient être mieux placées pour résister aux tensions sur les
prix, grâce à des marques fortes, un pouvoir de fixation des prix
plus élevé et des clients généralement plus riches" que pour
d'autres produits de consommation courante, indiquent les analystes
de CreditSights.
Les groupes de spiritueux peuvent réduire leurs dépenses de
publicité et de promotion si nécessaire et sont normalement en
mesure de répercuter les hausses des prix des matières premières,
abonde Moody's.
UBS anticipe une croissance organique d'environ 6,7% pour Pernod
Ricard et de 8,4% pour Rémy Cointreau pour l'exercice qui
s'achèvera en 2023. Cette prévision inclut le manque à gagner lié
aux sanctions internationales contre la Russie qui devrait être
visible dans la deuxième partie de l'année, le temps d'écouler les
stocks. Le pays représente moins de 3% du chiffre d'affaires de
Pernod Ricard et moins de 1% de celui de Rémy Cointreau.
Une prime boursière à reconquérir
Par ailleurs, dans la mesure où Rémy Cointreau et Pernod Ricard
réalisent respectivement 50% et 30% de leurs résultats
opérationnels aux Etats-Unis, ils devraient bénéficier de la
récente appréciation du dollar face à l'euro.
En Bourse, le secteur des spiritueux européens s'échange à environ
23 fois les bénéfices attendus pour le prochain exercice. Cette
valorisation n'implique aucune prime par rapport aux fabricants de
produits agroalimentaires et d'hygiène, en dépit de meilleures
perspectives de croissance et de marge. "Le 'derating' des
spiritueux européens depuis le début de l'année crée des points
d'entrée attractifs", estime UBS.
La résilience des groupes de spiritueux pourrait être à nouveau
mise à l'épreuve au cours des prochains trimestres, en particulier
si une partie de l'économie mondiale entrait en récession. Mais,
pour l'heure, les alcooliers disposent de moteurs de croissance
bien réels et d'une capacité à absorber la hausse des coûts qui en
font des valeurs attrayantes au sein de l'univers des biens de
consommation. Les prochaines publications trimestrielles de Rémy
Cointreau et Pernod Ricard, fin avril, devraient mettre en lumière
ces atouts.
-François Schott, Agefi-Dow Jones; +33 (0)1 41 27 47 92;
fschott@agefi.fr ed: VLV
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