François Schott,



Agefi-Dow Jones





PARIS (Agefi-Dow Jones)--Alors qu'ils commençaient à peine à savourer le retour des clients dans les bars et restaurants, les groupes de spiritueux sont confrontés à de nouveaux vents contraires depuis le début de l'année. L'accélération de l'inflation et la guerre en Ukraine font peser des craintes sur le pouvoir d'achat et le moral des consommateurs, qui pourraient être amenés à tailler dans leurs dépenses non essentielles.



L'alcool n'est pas à proprement parler un bien essentiel. Cependant, les habitudes de consommation prises pendant la crise sanitaire, la structure des coûts et l'exposition géographique des groupes de spiritueux sont autant de forces de rappel pour un secteur dont la croissance reste nettement supérieure à celle des autres produits de consommation courante.



Pernod Ricard et Rémy Cointreau, les deux principaux représentants français du secteur avec LVMH, ont vu leurs chiffres d'affaires progresser de 14% et 21% à taux de change constants, respectivement, au cours du trimestre clos fin décembre, en dépit du maintien de restrictions sanitaires dans de nombreux pays.



"Le secteur est encore en train de rebondir après la pandémie. Nous constatons une forte propension des consommateurs à sortir de chez eux, ce qui devrait permettre de récupérer les volumes perdus", souligne Jefferies.



Réserves de croissance



Certains marchés ont déjà fortement rebondi en 2021, notamment les Etats-Unis et la Chine, et la croissance devrait y être moins vigoureuse au cours des prochains mois. Pernod Ricard estime que le marché américain devrait revenir à une croissance moyenne de 5% dans un avenir proche, contre près de 10% en 2021.



"Même si le marché américain se normalise progressivement dans le courant de l'année 2022, il reste des réserves de croissance" pour les groupes de spiritueux, souligne HSBC. La banque cite notamment les magasins d'aéroports, un important canal de distribution pour les alcooliers, qui devrait bénéficier de la reprise du trafic aérien.



En Chine, les récentes restrictions sanitaires ont certes freiné la demande des distributeurs à l'approche du Nouvel An, mais les ventes en ligne ont progressé par rapport à la même période de l'année dernière, note UBS. La banque pointe également la vigueur des données de consommation aux Etats-Unis, où les spiritueux gagnent des parts de marché par rapport à la bière.



Pouvoir de fixation des prix



Dans ce contexte, les deux groupes français prévoient d'augmenter leurs dépenses de marketing au cours des prochains mois, ce qui pourrait temporairement peser sur leur rentabilité. Ils sont également confrontés à une hausse des cours des matières premières agricoles et du transport. Mais leur positionnement haut de gamme devrait leur permettre d'absorber une partie de ces coûts.



"Dans un environnement inflationniste, les sociétés de spiritueux pourraient être mieux placées pour résister aux tensions sur les prix, grâce à des marques fortes, un pouvoir de fixation des prix plus élevé et des clients généralement plus riches" que pour d'autres produits de consommation courante, indiquent les analystes de CreditSights.



Les groupes de spiritueux peuvent réduire leurs dépenses de publicité et de promotion si nécessaire et sont normalement en mesure de répercuter les hausses des prix des matières premières, abonde Moody's.



UBS anticipe une croissance organique d'environ 6,7% pour Pernod Ricard et de 8,4% pour Rémy Cointreau pour l'exercice qui s'achèvera en 2023. Cette prévision inclut le manque à gagner lié aux sanctions internationales contre la Russie qui devrait être visible dans la deuxième partie de l'année, le temps d'écouler les stocks. Le pays représente moins de 3% du chiffre d'affaires de Pernod Ricard et moins de 1% de celui de Rémy Cointreau.



Une prime boursière à reconquérir



Par ailleurs, dans la mesure où Rémy Cointreau et Pernod Ricard réalisent respectivement 50% et 30% de leurs résultats opérationnels aux Etats-Unis, ils devraient bénéficier de la récente appréciation du dollar face à l'euro.



En Bourse, le secteur des spiritueux européens s'échange à environ 23 fois les bénéfices attendus pour le prochain exercice. Cette valorisation n'implique aucune prime par rapport aux fabricants de produits agroalimentaires et d'hygiène, en dépit de meilleures perspectives de croissance et de marge. "Le 'derating' des spiritueux européens depuis le début de l'année crée des points d'entrée attractifs", estime UBS.



La résilience des groupes de spiritueux pourrait être à nouveau mise à l'épreuve au cours des prochains trimestres, en particulier si une partie de l'économie mondiale entrait en récession. Mais, pour l'heure, les alcooliers disposent de moteurs de croissance bien réels et d'une capacité à absorber la hausse des coûts qui en font des valeurs attrayantes au sein de l'univers des biens de consommation. Les prochaines publications trimestrielles de Rémy Cointreau et Pernod Ricard, fin avril, devraient mettre en lumière ces atouts.



-François Schott, Agefi-Dow Jones; +33 (0)1 41 27 47 92; fschott@agefi.fr ed: VLV



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(END) Dow Jones Newswires



April 08, 2022 03:54 ET (07:54 GMT)




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