Pierre-Jean Lepagnot,
Agefi-Dow Jones
Paris (Agefi-Dow Jones)--Dermatite atopique, asthme, polypose
naso-sinusienne, oesophagite à éosinophiles, prurigo nodulaire et
bientôt peut-etre urticaire et bronchopneumopathie chronique
obstructive (BPCO). Autant de maladies soignées par le Dupixent de
Sanofi, qui figure sans doute parmi les médicaments récents les
plus référencés au Vidal, bible de la pharmacie.
Le Dupixent est un anticorps monoclonal dont le principe actif, le
dupilumab, a été développé en collaboration avec l'américain
Regeneron. Commercialisé depuis 2017, le traitement a vu ses ventes
bondir année après année. En 2022, son chiffre d'affaires s'est
envolé de 44%, à 8,3 milliards d'euros. Le médicament, dont plus
des trois quarts des ventes sont réalisées aux Etats-Unis, a
représenté l'an dernier près de 20% des revenus annuels du
laboratoire, contre 14% en 2021.
Sanofi estime que les ventes annuelles de Dupixent pourraient à
terme dépasser 13 milliards d'euros. Une prévision qui ne prend pas
en compte l'indication contre la BPCO, qui pourrait ajouter des
milliards d'euros de ventes supplémentaires.
Les analystes mettent la barre encore plus haut pour ce traitement.
Le consensus table sur des ventes de 15,7 milliards d'euros en
2025. Pour 2030, JPMorgan vise 16,4 milliards d'euros, tandis que
Citi attend 20 milliards d'euros.
De quoi assurer a priori une trajectoire boursière ascendante à
Sanofi. Et pourtant, depuis le début de l'année, le titre affiche
une croissance nulle sur un an, contre une progression de 10% pour
le CAC 40 dont il figure parmi les principaux composants. Il
s'échange à 89,44 euros jeudi dans les premiers échanges à la
Bourse de Paris.
Comparée à la concurrence, la valorisation de la multinationale
française fait tout aussi pâle figure. "Elle se négocie à 9,5 fois
ses bénéfices attendus en 2024, soit avec une décote d'environ 40%
par rapport au secteur, malgré un taux de croissance annuel moyen
attendu sur la période 2024-2027 de 6%, largement en ligne avec le
secteur", observe JPMorgan.
Le 'pipeline', talon d'Achille
Cette décote est sévère mais juste, estime Deutsche Bank, dont
l'objectif de cours est bloqué à 85 euros depuis l'été dernier.
L'intermédiaire financier fustige "la dépendance au Dupixent,
l'expiration du brevet du traitement contre la sclérose en plaques
Aubagio en 2023, des risques structurels que font peser la
concurrence de la technologie ARN sur ses vaccins antigrippaux et
l'insuffisance voire la dégradation de la R&D".
"La sous-valorisation de Sanofi reflète la nécessité de
reconstituer son portefeuille de produits en développement", abonde
UBS.
Sanofi paye au prix fort les déconvenues de ses vaccins contre le
Covid-19, la suspension aux Etats-Unis de ses tests sur la molécule
tolébrutinib contre certaines formes de sclérose en plaques et de
myasthénie, ainsi que l'arrêt du développement clinique de
l'amcenestrant, un traitement oral de certains cancers du sein, qui
se trouvait pourtant à un stade très avancé.
A ces difficultés, se sont ajoutées les craintes suscitées par le
dossier Zantac aux Etats-Unis où Sanofi fait face à des poursuites
judiciaires, ce traitement des brûlures d'estomac, retiré du marché
américain en 2020, étant accusé de provoquer certaines formes de
cancer ou d'autres affections. Sur ce point, le groupe a obtenu en
décembre dernier une décision de justice très favorable qui semble
éloigner le risque d'un procès très couteux. Pour autant, les
analystes restent prudents dans l'attente de la clôture définitive
du dossier.
Des prévisions décevantes pour 2023
Dernier motif de déception, Sanofi a dévoilé le mois dernier des
perspectives décevantes. Le groupe prévoit pour cette année un
ralentissement de la croissance de son bénéfice par action,
attendue dans "le bas d'une fourchette à un chiffre", après une
hausse de 17,2% en 2022. Cette situation s'explique par la
concurrence des génériques du traitement de la sclérose en plaques
Aubagio et par les lancements prévus d'Altuviiio, un traitement
innovant de l'hémophilie de type A, et Beyfortus, l'unique vaccin
au monde contre la bronchiolite du nourrisson.
Ces deux produits constituent les deux principaux relais de
croissance du groupe français et arriveront sur le marché en 2023
avec, à la clef, des milliards d'euros de ventes. Pour Sanofi,
Altuviiio et Beyfortus, ainsi que l'éventuel feu vert des autorités
sanitaires au Dupixent dans la BPCO, sont largement sous-estimés
par le marché.
Le groupe insiste ainsi sur les acquisitions de sociétés de
biotechnologie réalisées ces dernières années. Lundi, il a
d'ailleurs annoncé le rachat de la société américaine de
biotechnologie Provention Bio, spécialisée dans le diabète, pour
2,9 milliards de dollars.
En conclusion, "dans Sanofi, il y a du bon - Dupixent et Altuviiio,
un bilan solide qui soutient la croissance externe - et du mauvais
- une dynamique de 'pipeline' [portefeuille de produits en
développement, ndlr] faible dans l'oncologie, tolébrutinib et le
litige Zantac", résume Citi.
Pour l'instant, le marché ne voit que le mauvais, mais l'espoir est
permis. Sur les 17 analystes récensés par FactSet qui suivent
Sanofi, 11 recommandent d'acheter le titre et aucun ne conseille de
le vendre.
-Pierre-Jean Lepagnot, Agefi-Dow Jones +33 (0)1 41 27 47 95;
pjlepagnot@agefi.fr ed: VLV
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March 16, 2023 04:19 ET (08:19 GMT)
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