SAN FRANCISCO (Agefi-Dow Jones)--Une nouvelle génération de puces basées sur la technologie du groupe britannique Arm, qui prépare ce qui pourrait être l'introduction en Bourse la plus en vue de l'année 2023, donne des sueurs froides à Intel.



Conquérant des parts du marché des ordinateurs personnels (PC), Arm concurrence aussi de plus en plus sérieusement le géant américain sur un terrain dont il était jusque-là le leader incontesté : les data centers, ou centres de données. Selon des sources proches du dossier, Amazon a fait appel à Arm pour les processeurs pour serveurs que fabrique le groupe technologique américain, tandis que ses concurrents Microsoft et Google planchent sur des puces utilisant des éléments fournis par Arm.



La semaine dernière, le groupe britannique, dont le siège est situé à Cambridge, a fait parler de lui en remportant un nouveau contrat avec Apple. La marque à la pomme, qui a depuis longtemps adopté certains dispositifs d'Arm, a ainsi présenté deux nouvelles versions de ses puces pour MacBook, basées sur une architecture Arm. Intel, son fournisseur historique, ne s'occupera plus que des ordinateurs fixes haut de gamme.



Le géant américain, qui publiera ses résultats trimestriels jeudi, devrait faire état d'une baisse de 23% du chiffre d'affaires de sa division spécialisée dans les PC, d'après les analystes interrogés par FactSet. Conséquence du ralentissement économique et de la perte de parts de marché au profit d'Advanced Micro Devices (AMD) et d'Arm, le chiffre d'affaires de la division serveurs devrait, lui, chuter de 40% en glissement annuel.



Une percée dans le "cloud"



La récente percée des puces du britannique auprès des spécialistes de l'informatique dématérialisée, ou "cloud", revêt une importance toute particulière, puisque les data centers opérés par Amazon, Microsoft, Google et d'autres sont très gourmands en puces et qu'Arm perçoit des royalties sur toutes les puces - fabriquées ou vendues - qui reposent sur son architecture.



"C'est une immense opportunité pour nous", affirme Rene Haas, directeur général du groupe.



Actuellement détenu par le japonais SoftBank, Arm se prépare à entrer en Bourse. Plutôt en fin d'année, a précisé un responsable d'Arm l'an passé, parce que les turbulences boursières ont coupé l'appétit des investisseurs. L'entreprise doit aussi choisir son lieu de cotation, des pressions politiques s'exerçant au Royaume-Uni pour qu'elle choisisse Londres.



Arm s'est fait connaître en concevant les éléments qui sont au cœur des smartphones avec un objectif : réduire la consommation électrique pour allonger la durée de vie des batteries. Les puces basées sur la technologie Arm sont aujourd'hui présentes dans plus de 95% des smartphones, dont les iPhone d'Apple.



La principale source de revenus d'Arm étant la vente de licences pour la fabrication de puces - et pas la fabrication elle-même -, son chiffre d'affaires est relativement modeste au regard de son envergure. En 2021, il s'est établi à 2,7 milliards de dollars ; c'est un tiers de plus que l'année précédente, mais seulement 3% de celui d'Intel.



Le britannique a cependant réussi à reproduire son succès dans les smartphones sur d'autres marchés : les processeurs qui utilisent son format de puce étaient présents dans plus de 10% des PC vendus dans le monde au troisième trimestre 2022, selon Mercury Research. Et alors que les ventes d'ordinateurs portables devraient reculer de plus de 5% cette année, celles des appareils équipés de puces ARM devraient progresser, estime Counterpoint Research.



La part des processeurs vendus à des spécialistes du cloud qui n'utilisent pas l'architecture d'Intel - donc qui utilisent bien souvent celle d'Arm - ressortait à 16% l'an passé et devrait atteindre 53% en 2026, selon le cabinet Canalys. Les estimations de parts de marché du groupe britannique restent toutefois très disparates, notamment parce que certaines applications internes, comme celles que développe Amazon, sont difficiles à suivre. Les puces de conception britannique équipent désormais aussi des casques de réalité virtuelle et des véhicules autonomes.



Mais Intel entend bien répliquer. En janvier, l'américain a déployé une nouvelle génération de processeurs pour serveurs dont les performances et la sobriété sont censées être excellentes. "Nous savons ce que nous avons à faire pour rester le fournisseur de référence de ces produits, nous avons tout fait pour que ce soit le cas et nous avons mis toutes les chances de notre côté", résume Lisa Spelman, vice-présidente d'Intel en charge des processeurs pour serveurs.



Un engagement écologique de plus en plus marqué



Les processeurs pour serveurs basés sur l'architecture Arm profitent de l'engagement écologique croissant des spécialistes du cloud : les trois plus gros acteurs américains se sont engagés à réduire leur empreinte carbone d'ici 2030. Chaque data center abrite en effet plusieurs centaines de milliers de serveurs et a besoin, chaque jour, d'autant d'électricité qu'environ 30.000 foyers. Réduire la consommation est donc indispensable pour atteindre les objectifs, ont indiqué des responsables.



"L'électricité va devenir un problème, pour nous comme pour les autres", résume Dave Brown, vice-président d'Amazon en charge des fermes de serveurs du groupe, l'un des plus gros acheteurs de puces. Basées sur la technologie d'Arm et présentées l'an passé, les puces Graviton d'Amazon sont 60% plus efficaces que les autres microprocesseurs, affirme-t-il, "les autres" étant des puces Intel et AMD.



Intel n'a pas directement réagi aux affirmations d'Amazon, mais son directeur général, Pat Gelsinger, a sous-entendu l'an passé que la génération de processeurs pour serveurs qui sera lancée en 2024 surclassera les solutions Arm sur plusieurs critères d'efficience et de performance.



Les succès d'Arm donnent des idées aux autres. En 2016, SoftBank a déboursé 32 milliards de dollars pour mettre la main sur le groupe britannique, ce qui a permis à ce dernier d'augmenter ses dépenses en R&D de 10% à 15% et de fourbir ses armes sans subir la pression des publications de résultats, ont indiqué des dirigeants d'Arm.



"SoftBank est arrivé et nous a donné la liberté de réinvestir tous nos bénéfices dans de la R&D", a souligné Simon Segars, ex-directeur général d'Arm.



En 2020, Nvidia, numéro un américain des puces en termes de capitalisation boursière, a proposé 40 milliards de dollars à SoftBank pour racheter Arm. Beaucoup de clients s'en sont alarmés, affirmant que le britannique, connu pour sa neutralité, allait tomber dans l'escarcelle d'un concurrent, et ont fait pression sur les régulateurs pour qu'ils bloquent l'opération. Les négociations entre Nvidia et SoftBank ont pris fin il y a un an.



Ampere Computing tente de son côté de surfer sur la vague Arm : la société a levé plus de 850 millions de dollars auprès des investisseurs et déposé une demande d'introduction en Bourse. L'entreprise fabrique des puces compatibles avec l'architecture Arm ; elle compte Microsoft et Hewlett Packard parmi ses clients. Dans un marché des serveurs longtemps dominé par Intel et AMD, ses produits offrent de nouveaux choix.



"Oui, on vient titiller un fonctionnement qui existe depuis 30 ans", reconnaît Renee James, directrice générale d'Ampere et ancienne dirigeante d'Intel, qu'elle a quitté en 2016.



Les clients d'Arm, eux, partent à la conquête de nouveaux succès dans le secteur des PC. Qualcomm, géant des puces pour téléphones portables, travaille sur des puces conçues par Arm pour des ordinateurs fonctionnant sous Windows, des appareils qui pourraient être mis en vente l'an prochain et doper les ventes d'ordinateurs équipés de puces Arm, selon Counterpoint Research.



Lisa Su, directrice générale d'AMD, a déclaré l'an passé que son entreprise venait de commencer de travailler sur des puces Arm destinées à des consoles.



-Asa Fitch, The Wall Street Journal



(Version française Marion Issard) ed: VLV



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January 25, 2023 05:53 ET (10:53 GMT)




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