LONDRES (Agefi-Dow Jones)--De lourdes décisions attendent le nouveau patron de Toyota dans le domaine des voitures électriques.



Le premier constructeur automobile mondial en termes de chiffre d'affaires a annoncé jeudi que son directeur général, Akio Toyoda, prendrait en avril le poste de président du conseil d'administration, et que sa fonction actuelle serait confiée au directeur général de Lexus, Koji Sato. Cette décision inattendue a été motivée par la volonté de l'actuel président, Takeshi Uchiyamada, de prendre sa retraite. Considéré comme le père de la Prius, Takeshi Uchiyamada a jugé qu'il était temps pour Toyota de bénéficier d'un "changement générationnel".



De fait, Toyota aurait certainement besoin d'une nouvelle vision stratégique. Certes loin d'être idéal pour favoriser un renouveau, le choix d'un successeur en interne était sans doute inévitable pour un groupe dont la culture d'entreprise, sous le nom de "Toyota Way", est devenue culte.



Jusqu'à récemment, le constructeur automobile japonais semblait mieux positionné que d'autres concurrents du secteur pour réussir sa transition vers la voiture électrique. Sa technologie hybride d'avant-garde lui avait donné une longueur d'avance en matière de réduction des émissions carbone et d'utilisation des batteries. Le groupe dispose en outre de ressources massives grâce à son envergure internationale et à l'efficacité de sa production. Il s'est même démarqué durant la première phase de la pénurie de semi-conducteurs liée aux confinements en devenant leader du marché aux Etats-Unis en 2021.



Toyota a néanmoins eu du mal à mettre au point une réponse satisfaisante à l'avènement de Tesla ces dernières années. L'approche novatrice du constructeur américain et sa culture de la "disruption" sont un défi pour Toyota, qui s'inscrit au contraire dans une tradition basée sur l'innovation progressive, en respectant le principe de "l'amélioration continue". L'avantage boursier obtenu grâce à la stratégie d'hyper médiatisation d'Elon Musk est également problématique pour un groupe qui préfère montrer des résultats concrets plutôt que raconter de belles histoires.



Toyota a été l'un des premiers actionnaires de Tesla, avant de sortir du capital en 2016, croyant peut-être, comme bien d'autres, que l'aventure était vouée à l'échec. Tesla a semble-t-il commencé à attirer de nouveau l'attention du groupe japonais lorsqu'il a mis au point sa propre version de la fameuse méthode du "Lean Manufacturing", destinée à éviter tout gaspillage et dysfonctionnement au sein de la chaîne de production, ce qui a permis aux bénéfices du groupe californien de décoller enfin. En décembre 2021, Akio Toyoda, dont le grand-père a fait entrer Toyota dans le secteur de la construction automobile, avait rompu avec toutes les traditions du groupe lors d'une présentation tape-à-l'oeil, "à la Elon Musk", lors de laquelle avaient été dévoilés plusieurs produits en développement ainsi qu'un virage du groupe vers l'électrique.



Depuis, Akio Toyoda a toutefois brouillé les pistes en soulignant que le monde aurait besoin pendant encore longtemps d'un mix de groupes motopropulseurs, compte tenu des difficultés et des coûts associés à la production de batteries et au déploiement des infrastructures nécessaires, notamment dans les pays les plus pauvres. Il s'agit là d'une réalité, mais aussi d'un argument qui pourrait passer pour une tentative intéressée de freiner le développement des voitures électriques - une technologie que Toyota ne maîtrise pas encore. Le groupe a dû rappeler l'an dernier son premier vrai modèle électrique, le SUV bZ4X, en raison d'un risque de détachement des roues. La remise sur le marché du modèle a été plutôt discrète.



Le changement climatique étant devenu une priorité politique de plus en plus forte, les gouvernements hors Japon n'ont pas fait grand cas des avertissements d'Akio Toyoda : les crédits d'impôt prévus par Washington pour l'achat de nouveaux véhicules électriques ne s'appliqueront pas aux hybrides de style Prius qui ne se branchent pas, et la réglementation de l'Union européenne sur les émissions oblige par ailleurs les constructeurs à produire des voitures électriques.



Akio Toyoda a évoqué ce mois-ci le développement d'une plateforme de production exclusivement dédiée aux voitures électriques, ce qui revient à admettre qu'il n'obtiendra pas de résultats d'envergure internationale, que ce soit sur le plan commercial ou sur le plan financier, en ajustant simplement sa méthode actuelle de production. Le moment est inopportun dans la mesure où Toyota a lourdement investi dans une "nouvelle architecture mondiale" de pointe pour produire des voitures qui, au final, ne seront pas aussi internationales qu'il l'avait espéré. Koji Sato aura quand même intérêt à miser sur cette plateforme. Environ un grand constructeur automobile sur deux ayant déjà emprunté cette voie, Toyota pourra ainsi au moins rattraper son retard.



Il y a encore quelques années, Koji Sato aurait été chaleureusement félicité de s'être vu remettre les clefs du constructeur automobile le plus fiable au monde. Au lieu de cela, il va devoir relever certains des défis les plus difficiles du secteur automobile.



-Stephen Wilmot, The Wall Street Journal



(Version française Emilie Palvadeau) ed: VLV



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January 27, 2023 07:04 ET (12:04 GMT)




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