ENTRETIEN: En difficulté en France, Veolia veut chercher la croissance hors d'Europe
20 Juin 2017 - 7:43PM
Dow Jones News
PARIS (Agefi-Dow Jones)--A la peine sur les contrats publics de
gestion de l'eau en France, Veolia (VIE.FR) compte sur les besoins
des industriels en services environnementaux, notamment dans les
pays émergents, pour relancer sa croissance.
Alors qu'il a annoncé mardi un plan social pour son activité Eau en
France, confrontée à des baisses de prix de plus de 20% en moins de
10 ans, le numéro un mondial du traitement de l'eau et des déchets
mise sur l'essor des réglementations environnementales à
l'international pour soutenir son activité dans les années qui
viennent.
"Nous irons chercher la croissance organique partout où nous
pourrons, mais d'abord dans les pays hors d'Europe, et d'avantage
aussi avec les industriels parce que c'est là qu'il y a le plus de
besoins", a expliqué son PDG Antoine Frérot mardi dans un entretien
à l'agence Agefi-Dow Jones, en citant le traitement des déchets
toxiques et le recyclage parmi les pistes de développement.
Le dirigeant a confirmé l'objectif d'un retour à la croissance du
chiffre d'affaires de Veolia cette année, après une baisse de 2,3%
l'année dernière. Amorcé fin 2016, le redressement de l'activité
s'est confirmée au premier trimestre, avec des ventes en hausse de
4,5% à changes constants.
Veolia reste toutefois confronté à des "vents contraires" en
Europe, et notamment en France, où la faiblesse de l'inflation
conduit à une indexation négative des prix des contrats cette
année.
Confrontés à une vague de renouvellement des contrats auprès des
collectivités locales depuis 2010, les groupes du secteur ont
surtout dû accepter de réduire leurs prix - et leurs marges - pour
éviter une "remunicipalisation", soit un retour en régie publique
de la gestion de l'eau. Les 572 suppressions d'emploi annoncées
mardi s'ajouteront aux 943 départs volontaires homologués depuis
2014 au sein de la branche "eau" en France. Le groupe table
également sur 987 "mobilités fonctionnelles et/ou géographiques" au
sein de cette activité.
Début 2017, Veolia a relevé de 600 à 800 millions d'euros son plan
d'économies sur la période 2016-2018 et reporté d'un an les
objectifs financiers initialement fixés pour 2018. Fin mai, le
groupe a également annoncé qu'il prendrait des mesures pour doubler
la rentabilité opérationnelle de son activité "eau" en France d'ici
à 2020, tout en maintenant son chiffre d'affaires à "au moins" 3
milliards d'euros, contre 2,9 milliards d'euros en 2016.
Répondre aux nouveaux besoins des industriels
Activité historique du groupe, Veolia Eau France représente
aujourd'hui 10% seulement de son chiffre d'affaires. L'ancienne
"Compagnie générale des eaux" compte désormais sur les efforts de
lutte contre la pollution pour se relancer.
"L'un des principaux moteurs de nos métiers, c'est la
réglementation de protection de l'environnement. Hors d'Europe le
contexte est très favorable, notamment dans les pays émergents",
souligne Antoine Frérot. "En Chine, les autorités savent que si
elles ne prennent pas à bras le corps le problème de la pollution,
c'est leur développement économique qui sera obéré. Mais cela
concerne aussi bien l'Amérique Latine et le Moyen-Orient".
Même les Etats-Unis ne font pas exception, malgré la récente
décision du président américain de quitter les accords de Paris:
"Je ne pense pas que Donald Trump remettra en cause la législation
américaine en matière d'environnement, même s'il ne la renforce
pas", estime Antoine Frérot.
Pour se développer, Veolia vise en particulier les clients
industriels, qui actuellement sous-traitent seulement 3% de leurs
activités eau, énergie et propreté. Au Mexique, Nestlé s'est par
exemple tourné vers le groupe français lorsque les autorités
locales lui ont interdit d'approvisionner une de ses usines en eau
naturelle. Veolia lui a alors permis d'utiliser l'eau extraite du
lait de vache transformé en lait en poudre.
Renforcer le rôle pionnier de la France dans les services à
l'environnement
En France, Antoine Frérot appelle le gouvernement à "pousser les
feux du développement durable", dans le but de renforcer le
leadership mondial de groupes comme Veolia et son rival Suez
(SEV.FR) dans les services environnementaux.
"La mine de matières premières que constituent nos déchets est
extrêmement inexploitée. Et en matière d'efficacité énergétique,
l'équation économique se boucle assez rapidement une fois qu'on
prend en compte les externalités", pointe le dirigeant. Dans ce
cadre, le gouvernement peut imposer des réglementations, mais
également jouer sur la commande publique en favorisant les produits
recyclés, suggère le PDG de Veolia. "Les premiers qui disposeront
des technologies de l'économie circulaire en France seront les
premiers à pouvoir les exporter à l'extérieur".
Pour se renforcer dans certaines technologies ou certaines régions
du monde, le groupe pourrait réaliser des acquisitions moyennes,
sans toutefois dépasser les 400 à 500 millions d'euros. Après avoir
fortement réduit sa dette ces dernières années à travers des
cessions d'actifs, Veolia serait en mesure de financer une
acquisition transformante. "Mais je ne l'ai pas aujourd'hui sur ma
table", affirme Antoine Frérot.
-Thomas Varela, Agefi-Dow Jones; +33 (0)1 41 27 47 99;
tvarela@agefi.fr ed: ECH
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