L'Etat vient de priver Ingenico de sa dimension spéculative - DJ Plus
20 Mai 2015 - 5:23PM
Dow Jones News
La reprise de 5,5% du capital d'Ingenico (ING.FR) par la Banque
Publique d'Investissement a de quoi laisser un goût amer à ses
autres actionnaires, et d'une manière plus générale aux
investisseurs, parce qu'elle sape la dimension spéculative du
fournisseur de terminaux et de solutions de paiement
électronique.
Ingenico restera dans le giron de l'Etat. Plutôt que de céder le
solde de ses parts dans le groupe au plus offrant, l'équipementier
aéronautique Safran (SAF.FR) a vendu 5,5% d'Ingenico au fonds
souverain français, la BPI. Safran, dont l'Etat est le premier
actionnaire, avait hérité de 23,6% d'Ingenico en 2008, mais avait
depuis vendu le gros de ses parts dans le groupe. Avant la vente de
5,5% d'Ingenico à la BPI, il n'en détenait plus que 9,1%.
Un signal boursier
Ingenico n'est pas à vendre, peuvent en déduire les investisseurs.
En tout cas pas à une entreprise étrangère, ou non-européenne. En
2010, le ministre de l'Industrie Eric Besson s'était ouvertement
opposé à une vente du groupe à l'américain Danaher en raison de son
caractère "stratégique", tuant dans l'oeuf une offre qui n'avait
même pas été rendue officielle. "L'Etat français a trouvé une
manière de contenter Safran, désireux de sortir, tout en conservant
un certain pouvoir au sein d'un actif français stratégique", a
estimé Invest Securities.
Certes, la participation de l'Etat dans Ingenico peut paraître trop
modeste pour contrer à elle seule un raid hostile sur le capital du
groupe. Elle n'en constitue pas moins un signal, aussi bien pour
d'éventuels prédateurs que pour les autres actionnaires d'Ingenico.
Même si elle peut paraître modeste, la participation de 5,5% de la
PBI dans Ingenico suffira à en faire le premier actionnaire du
groupe.
Des fondamentaux solides, une valorisation élevée
Pour envisager un placement dans Ingenico, les investisseurs
devront donc faire abstraction de sa dimension spéculative et se
concentrer sur ses fondamentaux. Heureusement, ces derniers
paraissent attractifs. Doté d'une stratégie claire et d'un
management qui a fait ses preuves, Ingenico profite de courants
porteurs, comme l'adoption de la carte à puce aux Etats-Unis et en
Chine, ou encore l'essor du commerce électronique. La
quasi-totalité des analystes couvrant la valeur sont positifs sur
le titre, avec un objectif de cours moyen de 120 euros.
Il n'empêche qu'à court terme, la vente des parts de Safran dans
Ingenico constitue un signal plutôt négatif, parce qu'elle souligne
sa valorisation relativement élevée. La cession du bloc de 5,5%
d'Ingenico s'est d'ailleurs faite à un prix sensiblement inférieur
à ses derniers cours : 109 euros par action, contre 117,25 euros
mardi soir. Le titre pourrait rester sous pression à court terme.
Safran a d'ores et déjà prévenu de la vente des 3,6% qu'il conserve
dans le capital. Signe des doutes du marché, l'action Ingenico
cédait 1,5% à 115,50 euros mardi vers 16h30.
Des points de vue différents
Mis à part la présence de l'Etat au capital du groupe, rien ne
contrariait réellement la dimension spéculative d'Ingenico. Le
capital du groupe est éclaté et ses principaux actionnaires sont
des investisseurs institutionnels. Du point de vue de l'Etat, le
maintien d'une participation dans Ingenico permettra d'éviter à la
France de perdre un de ses fleurons technologiques. Mais du point
de vue de ses autres actionnaires, le titre vient de perdre un
précieux soutien boursier.
- Ambroise Ecorcheville, Dow Jones Newswires; 33 (0)1 40 17 17 71;
ambroise.ecorcheville@wsj.com (ed/EC)