Alice Doré,



Agefi-Dow Jones



PARIS (Agefi-Dow Jones)--Sur le papier, le rachat de la plus grosse aciérie d'Europe constituait un pari avisé pour ArcelorMittal. Mais depuis que le groupe a déclaré forfait lundi, le marché applaudit. Le sidérurgiste avait toujours peiné à convaincre les investisseurs de l'intérêt financier de cette acquisition coûteuse.



Le titre ArcelorMittal s'adjugeait 2,3% mardi après-midi, après avoir déjà gagné 3,9% la veille.



ArcelorMittal avait été retenu en juin 2017 pour reprendre le sidérurgiste italien Ilva, nationalisé en 2015 en raison de ses difficultés financières. L'accord signé avec les autorités italiennes comportait un prix d'achat de 1,8 milliard d'euros et une enveloppe d'investissements de 2,4 milliards d'euros, dont 1,1 milliard à consacrer à la mise en conformité environnementale des activités. Au terme d'un long processus de négociations avec les syndicats et de cessions d'actifs exigées par la Commission européenne, ArcelorMittal avait pris le contrôle d'Ilva en novembre 2018, dans le cadre d'un accord de "leasing".



Le principal atout d'Ilva était de permettre à ArcelorMittal d'entrer sur le marché italien, le deuxième plus gros consommateur d'acier en Europe, par le biais de son aciérie, située à Tarente dans le sud de l'Italie. La situation géographique de Tarente, important port du sud de la péninsule, offrait un accès maritime privilégié pour l'importation des matières premières.



En amont de l'acquisition, l'Etat italien avait offert des garanties juridiques exonérant le repreneur d'Ilva de responsabilités pénales en cas de poursuites liées à la pollution préalablement engendrée par le site. Le retrait de cette protection, effectif depuis le 3 novembre, a poussé ArcelorMittal à exercer une clause permettant de dénoncer le contrat pendant la période initiale de location du site.



Ces garanties juridiques étaient "une condition préalable essentielle" sans laquelle ArcelorMittal "n'aurait pas participé au processus d'appel d'offres et n'aurait pas signé l'accord", a expliqué un porte-parole du sidérurgiste à l'agence Agefi-Dow Jones.



Rome, entre "inflexibilité" et compromis



Rome, qui refuse la fermeture du site, tente depuis de sauver l'accord. Selon l'AFP, le chef du gouvernement italien, Giuseppe Conte, se veut "inflexible" et veut contraindre le groupe à respecter ses "engagements contractuels". Le responsable politique doit rencontrer des dirigeants d'ArcelorMittal mercredi. De son côté, le secrétaire national du Parti démocrate, Nicola Zingaretti, a indiqué sur Facebook que son groupe politique, l'une des deux formations de la coalition au pouvoir en Italie, tentera de rendre à ArcelorMittal sa garantie juridique par la voie parlementaire. Autant d'informations que le sidérurgiste n'a pas souhaité commenter.



Dans son communiqué publié lundi, ArcelorMittal semblait prêt à tirer un trait définitif sur sa production italienne, dont les objectifs avaient été significativement abaissés en raison de la détérioration des conditions de marché en Europe au cours des deux dernières années.



Dans un contexte de surcapacités, avec une offre abondante pour une demande européenne en déclin, le projet de redressement d'Ilva devenait de plus en plus précaire. L'instabilité réglementaire en Italie permettrait donc à ArcelorMittal de "sortir par la petite porte" d'une acquisition coûteuse et risquée, estimaient les analystes d'Octo Finances, avant les dernières déclarations des responsables politiques italiens mardi après-midi.



"ArcelorMittal aura payé son aventure italienne au prix fort", commentait de son côté Oddo BHF. Ses analystes estiment que le retrait d'Ilva aurait un effet positif de 1 euro sur la valorisation du titre ArcelorMittal, pour lequel ils ont relevé leur objectif de cours à 14 euros mardi matin.



Sortie ou pas, l'aventure italienne d'ArcelorMittal promet d'être coûteuse. "Les coûts encourus jusqu'à présent sur Ilva devraient atteindre 1,2 milliard de dollars d'ici fin 2019", dont une perte annualisée de 600 millions de dollars au niveau du résultat brut d'exploitation (Ebitda), calcule Oddo.



ArcelorMittal publiera jeudi ses résultats du troisième trimestre. L'occasion pour le groupe de tirer les conséquences financières de sa sortie - éventuelle - d'Ilva. Dans un contexte de conditions de marché déprimées, la réallocation du capital pourrait être la clef pour que le titre comble l'écart de cinq euros entre son cours actuel et l'objectif moyen des analystes d'environ 20 euros. Le groupe devra impérativement commenter les déclarations des dirigeants italiens pour clarifier une situation à ce jour instable.



-Alice Doré, Agefi-Dow Jones; +33 (0)1 41 27 47 90; adore@agefi.fr ed: ECH



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(END) Dow Jones Newswires



November 05, 2019 10:04 ET (15:04 GMT)




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