Le décès du coprésident d'Ipsos, Jean-Marc Lech, annoncé cette semaine intervient en pleine période d'incertitudes pour le groupe d'études par enquêtes, qui devra aborder la nouvelle ère qui s'ouvre en relevant plusieurs défis, notamment celui de ses relais de croissance et de la révolution numérique.



"Bon client" des plateaux de télévision, connu pour ses bons mots et ses prédictions risquées, notamment en période électorale, Jean-Marc Lech avait rejoint Ipsos en 1982, alors que la société réalisait un chiffre d'affaires d'à peine 12 millions de francs. Il avait ensuite copiloté son ascension parmi les principaux acteurs mondiaux du secteur.



Incertitudes sur l'actionnariat



S'il est encore trop tôt pour évaluer précisément les répercussions de cet événement sur l'actionnariat du groupe, la stabilité de la gouvernance est assurée. Didier Truchot, co-président et directeur général d'Ipsos, avait repris les fonctions de son partenaire l'été dernier, lorsque ce dernier avait suspendu son activité pour raisons de santé.



Alors que Jean-Marc Lech détenait indirectement quelque 6,6% d'Ipsos à travers la holding LT Participations, Natixis exclut "tout retour de papier" sur le marché, estimant qu'une transaction sur les actions concernées aurait lieu au sein de la holding (regroupant Didier Truchot et les sociétés familiales Sofina et FFP) et non au niveau d'Ipsos.



Le courtier Portzamparc envisage pour sa part plusieurs scénarios et indique qu'un placement sur le marché, en augmentant le flottant, pourrait alimenter la spéculation quant à une recomposition plus profonde de l'actionnariat.



"Nous ne faisons aucun commentaire sur la participation de Jean-Marc Lech dans LT Participations. Il n'avait pas de participation significative dans Ipsos", a indiqué jeudi la directrice financière d'Ipsos, Laurence Stoclet, dans un courrier électronique.



Passe difficile



La disparition de Jean-Marc Lech intervient à une période délicate pour le groupe, qui peine à renouer avec la croissance organique dans une conjoncture difficile et après les problèmes d'intégration rencontrés avec le britannique Synovate. Le groupe prévoit que 2015 sera l'année du retour de la croissance, mais le marché reste sceptique. En baisse de 22% depuis le début de l'année, l'action Ipsos évolue désormais au même niveau qu'au début de l'année 2010.



Selon certains analystes, le groupe devrait profiter de cette période de transition pour se recentrer sur ses activités à plus forte croissance, particulièrement dans le numérique. Ces nouveaux services connaissent certes une croissance rapide, mais ne représentent pour l'instant que 7% du chiffre d'affaires total, et leur marge de progression n'est pas infinie.



Point sur la stratégie



Le positionnement du groupe dans l'univers du marketing numérique reste d'ailleurs à être clarifié. Dans un entretien accordé à Dow Jones Newswires en avril dernier, la directrice financière d'Ipsos estimait que la révolution numérique ne représentait pas une menace pour le groupe en termes de concurrence, mais lui permettrait au contraire de mieux appréhender le comportement des consommateurs.



Pourtant, selon certains observateurs comme Exane BNP Paribas, la constitution et l'analyse de bases de données massives sur les habitudes des consommateurs (big data) risquent de permettre aux groupes publicitaires de court-circuiter les sociétés d'études comme Ipsos.



La journée de rencontre avec les investisseurs prévue le 15 janvier prochain pourrait être l'occasion d'aborder ces différents points et de rétablir la confiance dans le potentiel d'Ipsos à l'avenir.



Au cours de ses deux décennies chez Ipsos, Jean-Marc Lech avait réussi à donner un visage humain, débonnaire et plaisant au secteur des études et des sondages à l'époque même de sa professionnalisation et de son expansion. Personnage atypique, qui avait toujours refusé d'apprendre à parler anglais, il établissait également un lien -paradoxal- entre la sociologie de Pierre Bourdieu, dont il avait été l'élève, et les grandes multinationales à qui il proposait désormais ses services.



Même si "personne n'est imprévisible", comme le veut la devise d'Ipsos, difficile de dire aujourd'hui si le groupe sera plus soucieux de tourner la page ou de faire vivre l'héritage de son ancien patron.



-Thomas Varela, Dow Jones Newswires; +331 40 17 17 72; thomas.varela@dowjones.com

Ipsos (EU:IPS)
Graphique Historique de l'Action
De Mar 2024 à Avr 2024 Plus de graphiques de la Bourse Ipsos
Ipsos (EU:IPS)
Graphique Historique de l'Action
De Avr 2023 à Avr 2024 Plus de graphiques de la Bourse Ipsos