Pour lever les incertitudes sur Renault, la justice devra sortir de l'ombre - DJ Plus
17 Mars 2017 - 2:57PM
Dow Jones News
Ambroise Ecorcheville
AGEFI-DOW JONES
PARIS (Agefi-Dow Jones)--Les soupçons peuvent coûter cher.
Confronté à de nouvelles allégations de tromperies sur les
émissions polluantes de ses véhicules, Renault (RNO.FR) a vu sa
valeur boursière chuter de 2 milliards d'euros depuis mardi
soir.
D'après Exane BNP Paribas, les craintes liées à d'éventuelles
tricheries lui ont coûté entre 5 et 7 milliards d'euros depuis le
début de l'année 2016.
Malheureusement, et bien que certains des risques associés à cette
affaire méritent d'être relativisés, la visibilité est trop faible
sur l'évolution du dossier pour pouvoir trancher.
Renault n'a pas la main sur le dossier.
"Pour avoir plus de visibilité sur le sujet, il faudrait que le
Parquet de Paris décide publiquement de donner suite (ou pas) à son
enquête judiciaire, ce qui permettrait à Renault d'avoir accès au
dossier et de bâtir sa défense", a indiqué Barclays. "Cela
permettrait également à Renault et aux investisseurs de mieux
pouvoir apprécier les risques potentiels associés", a ajouté la
banque britannique.
En attendant, Renault a démenti en bloc l'ensemble des accusations
portées à son encontre par la Direction de la concurrence, de la
consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) dans un
document confidentiel, telles qu'elles ont été rapportées par
Libération et l'AFP.
Le portefeuille exposé... à des hypothèses
Le risque financier est dès lors difficile à évaluer.
D'après la DGCCRF, citée par l'AFP, Renault pourrait être condamné
à une amende de 3,58 milliards d'euros. En comparaison, le
constructeur automobile a réalisé un bénéfice net de 3,42 milliards
d'euros en 2016.
Selon Barclays, qui interprète différemment la loi française, selon
laquelle le groupe pourrait se voir infliger une amende
représentant jusqu'à 10% de son chiffre d'affaires,
"proportionnellement à l'avantage tiré du manquement", ce montant
pourrait être plafonné à 1,68 milliard d'euros.
Et pour Exane BNP Paribas, qui se réfère au précédent de Volkswagen
(VOW.XE), le risque financier de Renault en Europe pourrait ne pas
dépasser 200 millions d'euros. Contrairement au géant allemand, le
constructeur français n'est pas présent dans le diesel aux
Etats-Unis, où les peines sont bien plus sévères, a rappelé à juste
titre la société de Bourse.
Ces montants ne prennent toutefois pas en compte les dommages que
le groupe pourrait se voir réclamer, par exemple, par des
associations de consommateurs.
Mais avant tout cela, pour se voir infliger une amende, Renault
devrait d'abord être reconnu coupable.
Un risque de dérapage opérationnel à ne pas négliger
Le vrai risque pourrait être organisationnel.
Dans le meilleur des cas, les nouveaux soupçons pesant sur Renault
apparaissent au plus mauvais moment, alors que sa direction prépare
un plan stratégique incluant notamment les entrées de Mitsubishi et
d'AvotVAZ dans le périmètre de l'alliance Renault-Nissan.
"Il est absolument indispensable que l'ensemble du management de
Renault se concentre sur ce sujet et reste solidaire du groupe et
de son PDG", a souligné Barclays.
A cet égard, la place de Carlos Ghosn à la tête du groupe semble
pour le moment préservée. Dans des entretiens à l'AFP et au Figaro,
Thierry Bolloré, directeur délégué à la compétitivité de Renault, a
formellement démenti les affirmations du rapport de la DGCCRF selon
lesquelles le groupe n'avait pas mis en place de délégations de
pouvoirs.
Ce qui aurait pu engager légalement la responsabilité de
l'emblématique super PDG.
Reste le risque d'atteinte à l'image de Renault.
Face à des soupçons persistants, les clients du groupe pourraient
se tourner vers des marques concurrentes.
Toutefois, l'expérience de Volkswagen montre que ce risque est
relatif. Le "Dieselgate" du groupe allemand ne l'a pas empêché de
ravir la place de numéro un mondial de l'automobile à Toyota
l'année dernière.
A 79 euros, là où le consensus valorise Renault près de 97 euros,
l'action du constructeur automobile offre théoriquement un
potentiel de hausse de plus de 20% en Bourse.
Mais ce potentiel ne pourra s'exprimer que si le groupe parvient à
balayer définitivement les soupçons liés à ses émissions
polluantes. Ce qui pourrait n'être fait que face à la justice.
-Ambroise Ecorcheville, Agefi-Dow Jones; 01 41 27 47 90;
aecorcheville@agefi.fr ed: ECH
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March 17, 2017 09:37 ET (13:37 GMT)
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