Capgemini offre des garanties dont étaient dépourvus les actionnaires d'Altran -DJ Plus
25 Juin 2019 - 5:21PM
Dow Jones News
Julien Marion,
Agefi-Dow Jones
PARIS (Agefi-Dow Jones)--Les fiançailles de Capgemini et Altran
ravissent le marché. Au lendemain de l'annonce du rachat de
l'entreprise de R&D externalisée par le groupe de services
informatiques, l'action Capgemini signe la plus forte hausse du CAC
40, en prenant 8%, tandis qu'Altran bondit de 22% pour s'aligner
avec le prix proposé par la transaction, soit 14 euros.
L'enthousiasme des investisseurs est légitime. Si cette opération à
5 milliards d'euros, dette comprise, comporte d'importants risques
d'intégration, elle n'en demeure pas moins pertinente. Les deux
groupes possèdent des métiers et des solutions complémentaires qui
permettront de proposer des services enrichis à leurs clients et
d'opérer des ventes croisées. Deutsche Bank loue une transaction
"ambitieuse", qui "fait sens".
Sur le plan financier, Morgan Stanley considère que pour Capgemini,
la forte relution attendue du résultat normalisé par action - de
15% hors synergies la première année, puis de 25% en 2023 une fois
l'ensemble des synergies réalisées - a de quoi réjouir ses
actionnaires et reléguer l'alourdissement de la dette au second
plan.
L'action Altran revient de loin
Pour les actionnaires d'Altran, les termes de l'offre soulèvent
plusieurs interrogations. Le prix proposé par Capgemini représente
une prime de 33% par rapport à la moyenne des cours pondérés par
les volumes sur les trois derniers mois et corrigée du dividende.
Ce qui peut paraître généreux, l'action s'étant appréciée de 68%
depuis janvier avant que l'offre ne soit dévoilée.
Mais ce tableau mérite d'être nuancé. Boursièrement, Altran partait
de très bas en début d'année, après avoir perdu plus de 40% en
2018. De plus, le prix offert par Capgemini correspond à un
multiple de résultat opérationnel pour 2019 inférieur d'environ 10%
à celui d'Alten, le grand concurrent d'Altran, relève Bryan
Garnier. Berenberg estime que "certains actionnaires d'Altran
pourraient se demander pourquoi un prix aussi bas a été offert,
compte tenu des synergies importantes et de l'augmentation du
bénéfice par action pour Capgemini".
L'offre de Capgemini n'est donc pas aussi satisfaisante que de
prime abord. Les actionnaires d'Altran devraient toutefois s'en
réjouir. Le PDG d'Altran, Dominique Cerutti a rappelé que le titre
s'est en moyenne échangé 9,3 fois son résultat opérationnel lors
des cinq dernières années, alors que l'offre de Capgemini implique
un multiple d'un peu plus de 12. Le dirigeant a surtout indiqué que
le prix offert par Capgemini se situait quasiment au niveau du
cours théorique d'Altran calculé à partir des objectifs 2022 de son
plan stratégique "The High Road". Autrement dit, les actionnaires
d'Altran se voient proposer le prix théorique de la société en
anticipant une exécution parfaite du plan stratégique d'ici à trois
ans.
Ce dernier point doit retenir l'attention des porteurs d'Altran, le
marché émettant actuellement des doutes sur la capacité d'exécution
du groupe. "A 11 euros [le prix d'Altran avant l'annonce de l'OPA
de Capgemini, NDLR], le marché n'intégrait pas complètement la
réalisation de nos objectifs" du plan stratégique, a reconnu mardi
Dominique Cerutti dans un entretien accordé à l'agence Agefi
Dow-Jones.
Le choix de l'indépendance était risqué
L'histoire récente d'Altran et les difficultés de l'intégration de
l'américain Aricent invitent à la prudence. En juillet 2018, Altran
avait découvert l'existence de bons de commandes fictifs de 10
millions de dollars au sein de cette société. Ce qui avait fait
plonger l'action de 28% en une seule séance. Le groupe a également
mis plus du temps que prévu pour redresser la rentabilité de sa
filiale allemande.
En acceptant de laisser Altran convoler en juste noce avec
Capgemini, ses actionnaires s'offriraient une forte visibilité que
la valeur n'était pas en mesure de leur apporter.
"Au regard des risques pesant sur Altran en 'stand-alone', en
particulier les difficultés liées à l'intégration d'Aricent et le
lourd endettement qui limite les marges de manoeuvre du groupe,
nous estimons qu'il s'agit d'une aubaine pour les actionnaires sur
un titre qui aura parcouru des montagnes russes ces derniers mois",
écrivent les analystes d'Invest Securities."Nous considérons cet
accord comme la meilleure fin possible à l'histoire boursière
d'Altran, après les dix-huit mois douloureux qui ont suivi
l'annonce de l'acquisition d'Aricent", abonde Bryan Garnier.
Il semble peu probable qu'un autre prétendant se manifeste, dans la
mesure où les conseils d'administration des deux sociétés ont déjà
approuvé ces fiançailles. Bryan Garnier ne voit qu'Accenture comme
candidat potentiel. Or la politique d'acquisition de la société de
conseil est tournée vers des opérations stratégiques, fait valoir
la banque franco-américaine.
Les mariages parfaits n'existent pas. Mais le rapprochement des
deux groupes laisse présager un "happy ending" pour les
actionnaires d'Altran et une union prometteuse pour ceux de
Capgemini.
-Julien Marion, Agefi-Dow Jones; +33 (0)1 41 27 47 94;
jmarion@agefi.fr ed: ECH
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