Par Julien Marion





PARIS (Agefi-Dow Jones)--La publication semestrielle d'Elior laisse un goût amer à ses actionnaires. Le titre du spécialiste de la restauration collective perd 3,5% mercredi en début d'après-midi après avoir plongé de près de 14% en début de séance, le marché sanctionnant les nouvelles perspectives du groupe tant pour l'exercice en cours qu'à moyen terme.



Les objectifs de rentabilité retiennent particulièrement l'attention. Pour l'exercice actuel, clos en septembre prochain, Elior prévoit un résultat opérationnel courant retraité - Ebita ajusté - autour de l'équilibre, en excluant les pertes de Preferred Meals, estimées à 35 millions d'euros. Le groupe a décidé de mettre fin à cette activité de distribution et de production de plats préparés, frais et surgelés aux Etats-Unis, en perte chronique et trop éloignée de son coeur de métier. Les analystes attendaient en moyenne un Ebita ajusté positif pour l'ensemble de l'exercice 2021-2022.



Autre déception : Elior a abaissé son objectif de marge d'Ebita ajusté à moyen terme, tablant sur 4% pour l'exercice clos en septembre 2024, contre 4,6% précédemment. Le directeur général par interim, Bernard Gault, qui a pris les rênes du groupe après la démission inattendue de Philippe Guillemot début mars, a déclaré aux analystes que cette nouvelle cible prenait en compte les effets d'un environnement inflationniste durable.



Des contrats moins flexibles



Ces nouvelles perspectives illustrent l'ampleur du grand défi d'Elior : maîtriser au mieux la hausse des prix en la répercutant le plus possible à ses clients. Avec l'éclaircissement de la situation sanitaire et le contexte actuel de forte inflation, l'attention du marché dans le secteur de la restauration collective s'est déplacée du redressement des volumes vers les marges.



"Il va être très compliqué pour eux de faire accepter aux clients les hausses de prix extrêmement fortes", considère Bruno de la Rochebrochard, analyste au sein de Bryan Garnier & Co.



Le mix d'Elior en termes de pays ne lui facilite guère la tâche. "Leur exposition géographique ne coche aucune bonne case", indique un analyste parisien. Selon Stifel, la part des contrats dits "cost+", où la répercussion des hausses de coûts aux clients est quasiment automatique, s'inscrit à environ 8% chez Elior, contre près de 50% pour le britannique Compass. Cela tient au fait que la société compte la France, l'Espagne ou l'Italie parmi ses principaux marchés, des pays où les contrats les plus flexibles sont presque inexistants au contraire du Royaume-Uni et des Etats-Unis. L'entreprise doit donc mener d'importantes négociations avec la très grande majorité de sa clientèle.



Elior possède également une part élevée de contrats avec le secteur public - autour de 40% de son chiffre d'affaires - qui sont plus difficiles à négocier qu'avec le privé, a rappelé Bernard Gault. "Leurs marges de manoeuvre s'avèrent extrêmement limitées", considère un analyste basé à Paris.



"Elior présente en plus un nombre important de contrats avec des marges fortement négatives", ajoute un un autre intermédiaire financier. Le groupe a indiqué mercredi qu'il n'excluait pas de mettre fin à des contrats qui ne lui permettraient pas de "retrouver un niveau de rentabilité opérationnelle satisfaisant".



Une situation financière tendue



"Elior est bien plus exposé que Sodexo et Compass à l'Europe, une région où les taux de rétention sont plus faibles. En termes de marge, l'absence de centrale d'achat pénalise également le groupe par rapport à ces principaux concurrents", complète Bruno de la Rochebrochard.



Ces difficultés jettent le doute sur la capacité d'Elior à générer suffisamment de trésorerie cette année pour permettre son désendettement. Le groupe a annoncé mercredi avoir obtenu une prolongation de son "covenant holiday", c'est-à-dire un sursis de ses engagements financiers auprès de ses créanciers. Les prochains tests auront lieu en 2023 : la dette nette du groupe devra être inférieure à 7,5 fois son excédent brut d'exploitation (Ebitda) à fin mars puis à 4,5 fois à fin septembre. "La situation financière du groupe est tendue et le respect des covenants l'an prochain n'est pas assuré", prévient Bruno de la Rochebrochard.



Elior devrait bientôt mettre fin à la recherche de son nouveau directeur général. Bernard Gault a expliqué que le groupe avait retenu deux candidats et devrait faire son choix dans quelques semaines. Mais la visibilité sur l'action demeure faible. Si le titre apparaît bon marché par rapport à ses comparables boursiers, les investisseurs risquent de lui préférer Compass, qui a présenté des résultats semestriels de haute volée la semaine dernière. Selon FactSet, quasiment aucun analyste (7%) ne recommande d'acheter l'action Elior, contre 50% pour celle du groupe britannique.



-Julien Marion, Agefi-Dow Jones; +33 (0)1 41 27 47 94; jmarion@agefi.fr ed: VLV





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May 18, 2022 07:27 ET (11:27 GMT)




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