Manitou: une hirondelle ne fait pas le printemps
21 Juillet 2010 - 5:02PM
Dow Jones News
L'impressionnant rebond du chiffre d'affaires et des commandes
de Manitou BF SA au deuxième trimestre suggère que le pire est
désormais passé pour le fabricant d'engins de manutention, après la
chute de l'activité qui a marqué les six derniers trimestres.
Mais cette amélioration reste à pérenniser et ne permet
malheureusement pas encore d'envisager une normalisation de la
situation du groupe familial, qui doit encore faire face à
d'importants défis.
Le deuxième trimestre n'en marque pas moins une rupture. Le chiffre
d'affaires de Manitou a rebondi de 36% à 225 millions d'euros,
grâce à la contribution de l'ensemble de ses divisions et de ses
implantations géographiques.
Surtout, le groupe a continué d'engranger les commandes, jusqu'à
porter son carnet de commandes au niveau record de 5.400 machines,
soit environ quatre mois de visibilité sur son activité. Manitou
table désormais sur un rebond de 10% à 15% de son activité en 2010,
là où il visait auparavant une hausse de 5% à 10%.
Mais les implications pour les perspectives de rentabilité du
groupe restent à déterminer. Si l'objectif d'un retour à
l'équilibre du résultat brut d'exploitation se trouve conforté,
cela ne permettra pas nécessairement un retour à l'équilibre
opérationnel. En tout état de cause, 2010 devrait être une nouvelle
année de pertes.
Le rebond du carnet de commandes pourrait vite s'essouffler, comme
le reconnaît Manitou. La hausse des derniers mois est
essentiellement due à un phénomène de rattrapage technique,
alimenté par les reports des investissements initialement prévus en
2009, et soutenu par le cycle naturel de remplacement des
machines.
Or les marchés finaux du groupe restent très incertains, que ce
soit du côté agricole, industriel ou de la construction. Manitou
réalise la quasi-totalité de ses ventes dans les pays développés,
et ne peut donc que marginalement compter sur le dynamisme des pays
émergents. Compte tenu de la fragilité de la reprise économique en
Europe et aux Etats-Unis, les clients du groupe devraient continuer
d'investir au compte-goutte.
Dans l'immédiat, la principale préoccupation du groupe devrait être
ses approvisionnements. Manitou sous-traite pratiquement 80% de la
valeur de ses appareils auprès d'environ 600 fournisseurs. Ils
restent dans une situation financière très difficile, ce qui
pourrait entraîner des retards de livraison.
Manitou pourrait même être contraint de soutenir certains d'entre
eux financièrement. Mais, dans le cadre de la restructuration de sa
dette, au plus fort de la crise, le groupe s'est engagé à ne pas
laisser son ratio dette nette sur fonds propres dépasser 100%,
contre 73% fin 2009.
Cette marge de manoeuvre financière limitée pèsera tôt ou tard sur
la capacité d'expansion de Manitou. S'il veut aller chercher la
croissance là où elle se trouve, le groupe va devoir investir pour
s'implanter plus solidement dans les pays émergents, au besoin par
des acquisitions.
Dans la situation actuelle, un appel au marché permettrait à
Manitou d'envisager plus sereinement son avenir. Mais cette
perspective ne peut être envisagée à court terme. En effet, lors de
l'assemblée générale qui a eu lieu fin juin, faute de pouvoir
s'accorder sur le sujet, le concert familial qui détient environ
62% de l'entreprise a reporté toute réflexion sur une augmentation
de capital à une assemblée ultérieure, à une date qui n'a pas
encore été fixée.
Dans l'intérêt de leur entreprise, les familles Braud et Himsworth
devraient dès aujourd'hui envisager cette perspective, même si elle
est susceptible de les diluer au capital.
-Ambroise Ecorcheville, Dow Jones Newswires; 33 (0)1 40 17 17 71;
ambroise.ecorcheville@dowjones.com
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