(CercleFinance.com) - Que reste-t-il de Vallourec (Swiss: VK.SW - actualité)
? Flirtant avec les 120 euros à l'été 2007, le spécialiste français des
tubes sans soudures n'est plus que l'ombre de lui-même et à 8,6 euros,
le titre pesant moins de 1,2 milliard d'euros a d'ailleurs encore perdu
plus de 60% de sa valeur cette année. Dans un marché devenu difficile,
le groupe accumule les pertes et la direction cherche à adapter le
groupe. Et voilà que le politique s'en mêle.
A la fin des années 90, Vallourec (Xetra: VAC.DE - actualité)
faisait partie des valeurs préférées de l'homme d'affaires et boursier
avisé Vincent Bolloré, qui avait su parier sur la montée en puissance de
l'activité pétrolière de ce sidérurgiste spécialisé : fabriquant de
tubes, des produits d'acier somme toute banals, Vallourec a pris très
tôt le virage des 'OCTG' (Oil Countries Tubular Goods), c'est-à-dire les
tubes autrement plus techniques (et plus rémunérateurs) destinés aux
forages pétro-gaziers.
Ayant constitué le gros de sa position au
début des années 2000, jusqu'à monter à plus de 20% capital en
2002/2003, Vincent Bolloré a eu la sagesse de 'sortir' ensuite aussi
rapidement progressivement de la valeur, encaissant de copieux
bénéfices. Sans avoir tout vendu pour autant : à fin mars 2015, le
groupe Bolloré possédait encore encore 1,6% du capital.
Que
s'est-il passé ? Dès les années 2010, les bénéfices de Vallourec
commencent à fondre et font même place, depuis le 4e trimestre 2014, à
des pertes nettes. Si ces dernières sont en bonne partie attribuables à
l'effondrement du cours du pétrole, entamé voilà plus d'un an, Vallourec
est confronté à d'autres difficultés : des décisions d'investissement
malheureuses dans des marchés devenus difficiles, comme les Etats-Unis
et le Brésil, plusieurs profit warnings ces dernières années, et surtout
la montée en puissance de concurrents. En effet, voilà une dizaine
d'années que des sidérurgistes asiatiques (dont certains sont aidés par
leurs Etats respectifs) se sont lancés eux aussi dans les OCTG, mieux
margés que les autres produits d'acier : la concurrence s'est donc
structurellement intensifiée. Et voilà maintenant que le marché
s'effondre...
La chute du pétrole, qui a poussé les compagnies
pétrolières à suspendre leurs projets et à réduire leurs
investissements, n'a fait que rendre le problème plus voyant : le marché
des OCTG est devenu largement surcapacitaire, d'où des chutes de
volumes (- 44% pour la production expédiée par Vallourec au 3e trimestre
2015 !) et de prix.
Bref, les pertes nettes s'accumulent : du
T4 2014 au T3 2015, soit en douze mois, Vallourec accuse des déficits
cumulés supérieurs à 1,5 milliards d'euros, soit davantage que sa valeur
en Bourse. La direction a réagit par des économies en supprimant des
postes et en réduisant les capacités. Mais cela sera-t-il suffisant ?
Crédit
Suisse, qui vient de sabrer de 10 à 5 euros son objectif de cours sur
la valeur, en doute. Le bureau d'études doute que le marché des OCTG
connaîtra une reprise en 2016, et Société Générale, qui ne l'attend pas
avant 2017, estime qu'il est trop tôt pour la jouer en Bourse. La
récente chute du cours du brut n'arrange rien... En attendant, le cash
de Vallourec file à toute allure, entraînant l'endettement vers le haut.
Faut-il davantage de restructurations, comme Credit Suisse (London: 0QP5.L - actualité) l'appelle de ses voeux ?
Et
voilà que le politique s'en mêle : le ministre de l'Economie Emmanuel
Macron vient de s'inviter dans la partie. Lors des questions/réponses
parlementaires, le patron de Bercy a déclaré que 'des efforts seront
demandés aux dirigeants du groupe en termes de salaires, des efforts
seront demandés aux actionnaires en termes de dividende, et surtout des
efforts industriels pour trouver une voie de sortie'.
Déclaration
curieuse : certes, fin décembre 2014, Bpifrance Participations détenait
5,3% du capital de Vallourec et CDC (London: 0DXD.L - actualité) fonds d'épargne (autre filiale de la Caisse de dépôts) 2,3%. Soit, à eux deux, 11,3% des droits de vote.
Mais
ces institutions - qui possèdent, selon le bon mot d'un courtier,
quelques points de pourcentage de toute la cote parisienne... -
disposent traditionnellement d'une large autonomie de gestion, notamment
par rapport aux contingences politiques.
Le salaire des
dirigeants est certes un fort marqueur social, mais il ne saurait
constituer la solution aux problèmes stratégiques de Vallourec.
Le
dividende ? Certes, Vallourec a détaché au titre de 2014 un coupon de
0,81 euro, mais le groupe dégageait alors des profits dont ce dividende
représentait 44,3%. Déclarations ministérielles ou non, la perte nette
qui s'annonce en 2015 rendait de toute façon le versement d'un dividende
très improbable...
Les salariés ? Collectivement, ils sont
selon le document de référence les premiers actionnaires du groupe, avec
7,6% des parts. Ils étaient un peu plus de 22.000 en juin dernier. Mais
seulement 22% d'entre eux étaient basés en France voilà un an.
Certes,
le ministre a évoqué la situation difficile de Vallourec et estimé -
pourquoi pas - que d'autres stratégies pouvaient être envisagées. Plus
inquiétante est l'interférence politique qui s'annonce, d'autant que
l'Etat n'est pas en tant que tel présent au capital de Vallourec comme
il l'est chez Renault (Swiss: RNO.SW - actualité)
: ?c'est l'objet des discussions que j'aurai avec les dirigeants la
semaine prochaine?, a pourtant ajouté Emmanuel Macron. A suivre.
EG
(CercleFinance.com) - Que reste-t-il de Vallourec (Swiss: VK.SW - actualité)
? Flirtant avec les 120 euros à l'été 2007, le spécialiste français des
tubes sans soudures n'est plus que l'ombre de lui-même et à 8,6 euros,
le titre pesant moins de 1,2 milliard d'euros a d'ailleurs encore perdu
plus de 60% de sa valeur cette année. Dans un marché devenu difficile,
le groupe accumule les pertes et la direction cherche à adapter le
groupe. Et voilà que le politique s'en mêle.
A la fin des années 90, Vallourec (Xetra: VAC.DE - actualité)
faisait partie des valeurs préférées de l'homme d'affaires et boursier
avisé Vincent Bolloré, qui avait su parier sur la montée en puissance de
l'activité pétrolière de ce sidérurgiste spécialisé : fabriquant de
tubes, des produits d'acier somme toute banals, Vallourec a pris très
tôt le virage des 'OCTG' (Oil Countries Tubular Goods), c'est-à-dire les
tubes autrement plus techniques (et plus rémunérateurs) destinés aux
forages pétro-gaziers.
Ayant constitué le gros de sa position au
début des années 2000, jusqu'à monter à plus de 20% capital en
2002/2003, Vincent Bolloré a eu la sagesse de 'sortir' ensuite aussi
rapidement progressivement de la valeur, encaissant de copieux
bénéfices. Sans avoir tout vendu pour autant : à fin mars 2015, le
groupe Bolloré possédait encore encore 1,6% du capital.
Que
s'est-il passé ? Dès les années 2010, les bénéfices de Vallourec
commencent à fondre et font même place, depuis le 4e trimestre 2014, à
des pertes nettes. Si ces dernières sont en bonne partie attribuables à
l'effondrement du cours du pétrole, entamé voilà plus d'un an, Vallourec
est confronté à d'autres difficultés : des décisions d'investissement
malheureuses dans des marchés devenus difficiles, comme les Etats-Unis
et le Brésil, plusieurs profit warnings ces dernières années, et surtout
la montée en puissance de concurrents. En effet, voilà une dizaine
d'années que des sidérurgistes asiatiques (dont certains sont aidés par
leurs Etats respectifs) se sont lancés eux aussi dans les OCTG, mieux
margés que les autres produits d'acier : la concurrence s'est donc
structurellement intensifiée. Et voilà maintenant que le marché
s'effondre...
La chute du pétrole, qui a poussé les compagnies
pétrolières à suspendre leurs projets et à réduire leurs
investissements, n'a fait que rendre le problème plus voyant : le marché
des OCTG est devenu largement surcapacitaire, d'où des chutes de
volumes (- 44% pour la production expédiée par Vallourec au 3e trimestre
2015 !) et de prix.
Bref, les pertes nettes s'accumulent : du
T4 2014 au T3 2015, soit en douze mois, Vallourec accuse des déficits
cumulés supérieurs à 1,5 milliards d'euros, soit davantage que sa valeur
en Bourse. La direction a réagit par des économies en supprimant des
postes et en réduisant les capacités. Mais cela sera-t-il suffisant ?
Crédit
Suisse, qui vient de sabrer de 10 à 5 euros son objectif de cours sur
la valeur, en doute. Le bureau d'études doute que le marché des OCTG
connaîtra une reprise en 2016, et Société Générale, qui ne l'attend pas
avant 2017, estime qu'il est trop tôt pour la jouer en Bourse. La
récente chute du cours du brut n'arrange rien... En attendant, le cash
de Vallourec file à toute allure, entraînant l'endettement vers le haut.
Faut-il davantage de restructurations, comme Credit Suisse (London: 0QP5.L - actualité) l'appelle de ses voeux ?
Et
voilà que le politique s'en mêle : le ministre de l'Economie Emmanuel
Macron vient de s'inviter dans la partie. Lors des questions/réponses
parlementaires, le patron de Bercy a déclaré que 'des efforts seront
demandés aux dirigeants du groupe en termes de salaires, des efforts
seront demandés aux actionnaires en termes de dividende, et surtout des
efforts industriels pour trouver une voie de sortie'.
Déclaration
curieuse : certes, fin décembre 2014, Bpifrance Participations détenait
5,3% du capital de Vallourec et CDC (London: 0DXD.L - actualité) fonds d'épargne (autre filiale de la Caisse de dépôts) 2,3%. Soit, à eux deux, 11,3% des droits de vote.
Mais
ces institutions - qui possèdent, selon le bon mot d'un courtier,
quelques points de pourcentage de toute la cote parisienne... -
disposent traditionnellement d'une large autonomie de gestion, notamment
par rapport aux contingences politiques.
Le salaire des
dirigeants est certes un fort marqueur social, mais il ne saurait
constituer la solution aux problèmes stratégiques de Vallourec.
Le
dividende ? Certes, Vallourec a détaché au titre de 2014 un coupon de
0,81 euro, mais le groupe dégageait alors des profits dont ce dividende
représentait 44,3%. Déclarations ministérielles ou non, la perte nette
qui s'annonce en 2015 rendait de toute façon le versement d'un dividende
très improbable...
Les salariés ? Collectivement, ils sont
selon le document de référence les premiers actionnaires du groupe, avec
7,6% des parts. Ils étaient un peu plus de 22.000 en juin dernier. Mais
seulement 22% d'entre eux étaient basés en France voilà un an.
Certes,
le ministre a évoqué la situation difficile de Vallourec et estimé -
pourquoi pas - que d'autres stratégies pouvaient être envisagées. Plus
inquiétante est l'interférence politique qui s'annonce, d'autant que
l'Etat n'est pas en tant que tel présent au capital de Vallourec comme
il l'est chez Renault (Swiss: RNO.SW - actualité)
: ?c'est l'objet des discussions que j'aurai avec les dirigeants la
semaine prochaine?, a pourtant ajouté Emmanuel Macron. A suivre.
EG