Julien Marion,



Agefi-Dow Jones



PARIS (Agefi-Dow Jones)--Thales est désormais en orbite. Après avoir redressé la barre en portant sa marge opérationnelle de 8% en 2013, à un record de 9,8% en 2017, le groupe d'aéronautique et de défense vise au moins 11% d'ici à 2021. Cela, sans prendre en compte l'impact de l'acquisition de Gemalto qui doit être bouclée au second semestre. Dans le même temps, il compte accélérer sa transformation digitale, métamorphose qui s'avère nécessaire et offre des perspectives considérables. Mais qui demandera de la patience à l'actionnaire, l'essentiel des fruits devant être récoltés à long terme.



Avec Atos et Capgemini



La mue de Thales est palpable à plusieurs égards. "Thales devient un groupe de plus en plus technologique", remarque une analyste du secteur aéronautique spécialisée dans la gouvernance. Les critères de rémunération de long terme 2018 du PDG Patrice Caine reflète ce virage. Parmi ces critères figure la performance boursière du groupe d'ici à 2020 comparé à un panel de sociétés qui, outre Airbus, BAE Systems ou Safran, intègre désormais Capgemini et Atos. "Du fait de la vraisemblance des métiers, les ratios de valorisation doivent théoriquement se rapprocher de ces sociétés technologiques", souligne cette analyste du secteur aéronautique.



Les secteurs où Thales opère imposent d'ailleurs de traquer l'innovation, la R&D d'aujourd'hui créant les ventes de demain. Les briques technologiques que développe le groupe irriguent plusieurs métiers. La cybersécurité peut par exemple enrichir la chaîne de valeurs pour des activités telles que le contrôle aérien, les divertissements en vol ou la signalisation ferroviaire.



"En fait, Thales se transforme en une société de logiciels et de services", constate Marc Laubel, analyste chez Alphavalue. "Le point positif est que ses marchés finaux restent la sécurité, la défense et le transport, très porteurs en termes de croissance du chiffre d'affaires et de marges opérationnelles mais qui présentent aussi une forte visibilité", remarque l'opérateur de marché.



Un effort de R&D "vital"



Thales a renforcé son ancrage numérique, en réalisant des acquisitions, dont le spécialiste du traitement de données à grandes échelles ("big data") Guavus et Gemalto, dont les activités, identité, internet des objets et de cybersécurité affichent une impressionnante croissance : +24% en données organiques au premier trimestre.



Thales veut désormais enclencher la vitesse supérieure en augmentant ses investissements. Les dépenses de R&D autofinancées doivent passer de 797 millions d'euros en 2017 à environ 1 milliard d'euros en 2021. Un effort considérable même si Patrice Caine a répété combien cette R&D s'avèrait "vitale" pour la compétitivité de son groupe. "Les importants investissements en R&D sont la clef pour que Thales continue à surperformer le marché et voir sa marge opérationnelle progresser", juge néanmoins Marc Laubel, d'Alphavalue.



Tout au moins ces investissements requièrent la patience des actionnaires. "Les nouveaux services et les innovations de rupture demanderont un peu de temps pour être adoptés en raison des spécificités des marchés de Thales (certification et longueur des cycles d'acquisition) et n'apparaîtront certainement qu'au-delà de 2022", écrit Yan Derocles d'Oddo BHF dans une note publiée jeudi. L'avance du groupe dans le digital "deviendra réellement tangible au-delà de 2021", poursuit-il.



2,5 milliards d'euros d'opportunités de revenus supplémentaires



Dans une présentation aux investisseurs, Thales a indiqué mercredi attendre des opportunités de revenus additionnels liés à la transformation digitale de 250 millions d'euros pour 2018-2021. Un montant multiplié par 10 au-delà de 2022 grâce aux grandes ruptures, comme les trains autonomes, la réduction du pilotage à un seul avion ou encore la robotisation navale. "Le potentiel (de la transformation digitale, NDLR) est immense si l'on prend une perspective de plus long terme", a fait valoir mercredi Patrice Caine. "Lorsqu'on investit dans Thales, ce n'est pas pour 2019 mais clairement sur une perspective de plusieurs années", a-t-il rappelé aux investisseurs.



Ces derniers devront donc laisser le temps à Thales de poursuivre sa digitalisation. A plus court terme, il leur faudra chercher autre part les catalyseurs sur un titre qui pourrait être pénalisé par son statut de bon élève boursier. Depuis le début de l'année, la valeur a gagné 21% et se situe à quelques encablures de son objectif de cours moyen des analystes (108 euros contre contre 115). "Il faudra certainement attendre la finalisation de l'acquisition de Gemalto et les détails sur son intégration pour viser une poursuite du re-rating justifié par son positionnement avancé dans les technologies numériques", écrit Yan Derocles, analyste chez Oddo.



D'ici là, Thales risque de plafonner dans les mêmes altitudes boursières, déjà très élevées.



-Julien Marion, Agefi-Dow Jones; +33 (0)1 41 27 47 94; jmarion@agefi.fr ed: ECH



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June 07, 2018 11:34 ET (15:34 GMT)




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