Comportement des firmes belges dans le contexte de la
mondialisation: enseignements du Colloque "International Trade:
Threats and Opportunities in a Globalised World"
Les 14 et 15 octobre 2010, s'est tenu le sixième colloque
bisannuel de la Banque Nationale de Belgique. Les travaux présentés
lors de cette édition portaient sur le commerce extérieur et
l'investissement étranger. Ils s'inscrivaient dans un courant
relativement récent de la littérature économique qui analyse le
comportement des firmes en matière d'activités internationales en
recourant à des bases de données microéconomiques.
Les contributions couvraient des questions variées qui peuvent
être regroupées en cinq thèmes : (1) les déterminants et les
stratégies facilitant l'entrée des entreprises sur les marchés
étrangers ; (2) le commerce des services ; (3) les stratégies à
adopter face à la concurrence des économies émergentes ; (4) les
conséquences de l'internationalisation sur les firmes domestiques ;
et (5) les conséquences de la mondialisation sur le marché du
travail.
D'une manière générale, les modèles théoriques existants partent
du principe que la décision d'une entreprise d'entrer sur un marché
étranger est déterminée par le rapport entre la rentabilité qu'elle
peut en espérer et les coûts que cela implique. Une des
contributions présentées a enrichi ce cadre théorique en y
intégrant les incertitudes quant à la rentabilité des activités sur
les marchés étrangers. Les résultats tant théoriques qu'empiriques
suggèrent que les entreprises utilisent les exportations comme un
moyen d'évaluer la rentabilité d'un marché donné et décident
ensuite soit de se retirer, soit d'y accroître le volume de leurs
exportations, soit d'y réaliser un investissement direct.
Plusieurs contributions ont par ailleurs abordé la question de
l'influence des barrières tarifaires et non tarifaires, et ont
illustré certaines stratégies de réduction de ces coûts d'entrée,
comme l'importance des intermédiaires commerciaux.
Au-delà des différentes modalités d'entrée sur les marchés
étrangers, une contribution s'est intéressée aux stratégies
adoptées par les PME pour étendre leurs activités au niveau
international, plus particulièrement en ce qui concerne le nombre
de marchés sur lesquels elles décident d'entrer et le moment choisi
pour le faire. Il en est ressorti que les entreprises jeunes qui
entrent rapidement sur un nombre important de marchés sont
également caractérisées par une croissance plus rapide que les
autres PME. Le risque d'échec inhérent à ce choix stratégique est
toutefois plus élevé, ce qui plaide pour un encadrement particulier
de ces firmes.
Un article a été consacré aux échanges internationaux de
services. Il a mis en évidence la croissance considérable du nombre
d'entreprises impliquées dans le commerce de services, à la faveur
du développement des technologies de l'information. L'influence des
nouvelles technologies varie toutefois fortement d'un secteur à
l'autre.
Il a également été montré que la présence de certaines
entreprises sur les marchés étrangers pouvait avoir des effets
positifs sur les autres entreprises, orientées vers le marché
domestique, notamment en termes de croissance de productivité ;
elles sont parfois même amenées à exporter elles-mêmes. Ces effets
d'entraînement sont susceptibles de se produire soit à cause d’une
proximité géographique avec des entreprises exportatrices ou des
multinationales, soit par le biais de relations entre clients et
fournisseurs.
Il est établi que la concurrence sur les marchés extérieurs
affecte sensiblement le comportement des entreprises et, partant,
leurs caractéristiques. Une intensification de la concurrence tend
à renforcer la position des entreprises les plus productives, tant
sur les marchés extérieurs que sur le marché domestique, au
détriment des entreprises les moins productives. La concurrence
internationale détermine également les stratégies des entreprises,
notamment en ce qui concerne le choix des produits exportés. Un des
effets de l’intensification de la concurrence, déjà mis en évidence
dans la littérature, consiste pour une entreprise à concentrer ses
exportations sur son produit phare, pour la fabrication duquel elle
est plus productive. Une autre stratégie consiste à accroître la
qualité des produits exportés. Ce comportement a été identifié pour
les exportateurs belges en réponse à la concurrence accrue des pays
asiatiques.
Quelques contributions ont également étudié les conséquences de
l'internationalisation des entreprises sur le marché du travail.
Celles-ci ne sont pas négligeables, comme l'avait d'ailleurs déjà
montré une étude antérieure portant sur l'impact des importations
de biens en provenance de Chine sur l'emploi domestique. Il en
était ressorti que ces importations conduisent à une réduction de
la demande de travail des travailleurs peu qualifiés. Les résultats
d'un des travaux présentés au colloque semblent confirmer que les
relations commerciales des entreprises présentent en général un
biais en faveur de l'emploi qualifié, en particulier lorsqu'elles
sont orientées vers les pays à bas salaires. Dans le même ordre
d'idées, une autre des études présentées, concernant cette fois les
effets de l'offshoring sur l'emploi aux États-Unis, a montré que la
délocalisation des activités de production se fait au détriment de
l'emploi peu qualifié sans toutefois affecter l'emploi total.
Finalement, une étude a été consacrée au rôle non négligeable
des multinationales étrangères implantées en Belgique dans la
création d'emplois. Il ressort de cette analyse que les
multinationales – qu’elles soient belges ou étrangères – se
caractérisent par des coûts plus faibles d’ajustement de la taille
des effectifs.
Au total, il semble clair que la prise en compte de la dimension
microéconomique de l’entreprise dans l’étude de
l’internationalisation apporte un complément à l’analyse de la
compétitivité. Elle doit permettre d’améliorer la définition des
politiques en la matière.