NEW YORK (Agefi-Dow Jones)--Les Américains continuent de consacrer
aux biens de consommation une part plus importante de leur budget
qu'avant la pandémie de Covid-19. Or cette tendance ne semble pas
près de s'inverser.
Sous la chape des restrictions sanitaires liées à la pandémie,
privés de voyages, de sorties au restaurant, au théâtre ou au
cinéma mais forts des aides versées par l'Etat pour en atténuer les
effets, les ménages se sont reportés sur les achats de biens de
consommation. Ce choix explique en partie les problèmes
d'approvisionnement, les fortes hausses de prix qui ont frappé
l'ensemble de l'économie ainsi que la course engagée par les
distributeurs pour stocker le plus de marchandises possible. La
réouverture progressive des différents pans de l'économie a ensuite
mis un terme à cette frénésie d'achats et de nombreux magasins se
sont retrouvés avec une montagne de stocks impossibles à
écouler.
Le rebond de la part des services dans les dépenses des ménages
semble maintenant en fin de course et les problèmes de stocks des
distributeurs se sont globalement résorbés. Ceux qui vendent de
l'ameublement, des appareils électroniques et de l'électroménager
avaient ainsi vu leurs stocks atteindre un ratio de 1,75 fois leurs
ventes en décembre 2022, selon les données du Bureau américain du
recensement (Census Bureau). En août, ce ratio était retombé à
1,56, ce qui correspond à peu près aux niveaux prépandémiques.
Les consommateurs américains continuent de consacrer une bonne
partie de leurs dépenses aux biens, ce qui suggère que les ventes
des distributeurs pendant la période des fêtes de fin d'année 2023
seront bien supérieures à ce qu'ils auraient pu imaginer en
2019.
Révision des priorités
Selon les chiffres du Bureau d'analyse économique du département du
Commerce, les consommateurs américains ont consacré en septembre,
en données corrigées des variations saisonnières, 33,3% de leurs
dépenses à des biens de consommation, contre 31,4% en moyenne en
2019. Les prix des biens s'étant un peu tassés ces derniers temps
alors que ceux des services ont continué à augmenter, l'inflation
ne semble pas jouer de rôle sensible dans ce phénomène. De fait,
corrigées de l'inflation, les dépenses en biens ont été en
septembre supérieures de 20,4% à la moyenne de 2019, alors que les
dépenses consacrées aux services ne l'ont dépassée que de 7,6%.
Dans une certaine mesure, le nouveau penchant des Américains pour
les achats de biens reflète peut-être une révision des priorités
depuis la pandémie - un renforcement des habitudes casanières, en
quelque sorte, qui a conduit certaines personnes à finalement
préférer dîner à la maison plutôt qu'au restaurant, et à fréquenter
leur canapé plutôt que les strapontins des théâtres ou des cinémas.
Mais le changement le plus frappant et le plus durable est lié à la
généralisation du télétravail.
Selon les conclusions d'une enquête menée par le Bureau du
recensement durant la dernière quinzaine d'octobre, 29% des ménages
américains ayant répondu à cette question comptent parmi leurs
membres une personne ayant télétravaillé une fois au moins au cours
des sept jours précédents, soit quasiment le même pourcentage qu'un
an plus tôt. Cette stabilité semble confirmer le caractère durable
de la révolution du télétravail depuis la fin de la crise
sanitaire.
Les personnes qui télétravaillent souvent recourent moins qu'avant
à certains services. Elles dépensent moins en transports en commun,
en déjeuners à l'extérieur ou en sorties pour boire un verre après
le travail. Si elles avaient un abonnement à une salle de gym
proche de leur lieu de travail, ce n'est peut-être plus le cas.
A en croire une analyse de Goldman Sachs, ces personnes achètent
plutôt des biens, qui font souvent office d'ersatz aux services
maintenant délaissés. Si le télétravailleur n'achète plus de titre
de transport mensuel, il peut en revanche investir dans un fauteuil
de bureau. S'il ne se paie plus d'abonnement pour faire du sport
près de son lieu de travail, il va peut-être s'offrir un vélo.
L'amélioration de l'habitat favorisée
Les chiffres du département du Commerce illustrent bien cette
tendance. Par exemple, les ventes réelles, ou corrigées de
l'inflation, des magasins d'articles de sport, de loisirs,
d'instruments de musique ou des librairies n'ont pas beaucoup
évolué durant la décennie qui a précédé la pandémie, en partie en
raison de l'essor du commerce en ligne. Or en septembre, leurs
ventes réelles se sont révélées supérieures de 29% à la moyenne de
2019.
Inversement, dans des domaines où les effets du télétravail sont
moins prononcés, voire inexistants, les habitudes d'achats
ressemblent davantage à celles observées avant la pandémie, ont
constaté les économistes de Goldman Sachs. Les dépenses de santé,
entre autres, ont globalement retrouvé leur tendance prépandémique.
Les achats de vêtements et chaussures sont eux aussi retombés peu
ou prou à leurs niveaux précédents.
Les distributeurs en ont pris note. Lors d'une conférence organisée
en septembre, le président-directeur général de Home Depot, Edward
Decker, a indiqué que la part des dépenses de consommation
personnelle consacrée à l'amélioration de l'habitat avait diminué
par rapport aux pics atteints pendant la pandémie, tout en
précisant qu'il restait optimiste sur le niveau auquel elle se
stabiliserait.
"Même si l'on revient travailler trois jours par semaine, la
plupart des gens restent en télétravail pour un, deux, voire trois
jours ou plus par semaine. On est donc plus souvent chez soi",
a-t-il souligné.
Même après le reflux dû à la fin des restrictions sanitaires,
Lowe's et la division américaine de Home Depot devraient réaliser
pour l'exercice en cours un chiffre d'affaires respectivement
supérieur de 21% et 38% à celui de 2019, estiment les analystes de
Wall Street interrogés par Visible Alpha.
Williams-Sonoma, qui vend des meubles, des cuisines et accessoires
pour l'habitat, et le spécialiste de la vente de meubles en ligne
Wayfair devraient tous deux réaliser cette année un chiffre
d'affaires supérieur d'un tiers à celui dégagé avant la pandémie.
Le distributeur d'articles de sport Dick's Sporting Goods devrait
réaliser sur l'exercice en cours un chiffre d'affaires supérieur de
46% à celui de 2019 si ses résultats des troisième et quatrième
trimestres se révèlent conformes aux prévisions de Wall Street.
Pour les distributeurs, le retour de manivelle post-pandémique
pourrait finalement se révéler moins brutal que prévu - du moins
pour certains.
-Justin Lahart et Jinjoo Lee, The Wall Street Journal
(Version française Emilie Palvadeau) ed: LBO
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November 14, 2023 05:19 ET (10:19 GMT)
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