Le marché des télécoms a connu de nombreuses révolutions en moins de vingt ans. Des révolutions technologiques d’abord, avec l’arrivée, notamment, du mobile et la transformation des réseaux téléphoniques.
L’année 2014 a été marquée par des fusions-acquisitions dans le secteur des télécoms. Le contexte a été favorable avec des taux d’intérêts historiquement bas et des liquidités disponibles pour financer les transactions.
La situation en Europe devrait continuer à pousser les entreprises à faire de la croissance externe avec des opérations financières. Le but de ces acquisitions est d’améliorer leur marge et d’acquérir de la taille critique car c’est un marché très concurrentiel qui demande de lourds investissements.
Les étapes de l’accélération des mouvements de consolidation
Ces dernières années en Europe, on a pu observer une accélération des mouvements de consolidation. Le rapprochement de Telefonica et Hutchison Whampoa en Irlande et E plus (KPN) et O2 (Telefonica) en Allemagne. Et en ce qui concerne les fusions-acquisitions, nous avons pu également observer l’acquisition de Virgin mobile et SFR par Numéricable, de Portugal Telecom par Altice ou encore de Cable & Wireless, Kabel Deutschland et Ono par Vodafone.
1) L’arrivée du low cost dans le secteur des télécoms
En France, ces fusions se sont multipliées depuis l’arrivée de Free Mobile. L’arrivée de FREE a permis au marché de se dynamiser et d’entraîner une baisse considérable des prix. Les géants du secteur qui ont longtemps profité des bienfaits des ententes illicites sont aujourd’hui désarmés.
La guerre des prix est lancée depuis 2012. Chaque opérateur propose des offres à des prix très agressifs. Même si les géants participent aujourd’hui à la guerre des prix, ils veulent à tout prix réduire la pression concurrentiel pour faire remonter les prix pour pouvoir investir par la suite. De plus, la nouvelle pression concurrentielle pourrait s’avérer destructrice de valeur pour les entreprises.
2) Changement du business model (développement de nouvelles stratégies et de contenu)
La révolution de la 4G a profondément chamboulé le modèle économique des opérateurs. Aujourd’hui, les usages de la data sont en forte augmentation. Toute le business model est remis en question. Le modèle économique des opérateurs reposait jusqu’à présent beaucoup sur la facturation à la minute d’un temps d’utilisation. La 4G peut être une véritable source de création de valeur pour les opérateurs à condition qu’ils arrivent à profiter de cette opportunité pour améliorer la qualité du réseau. Mais le coût des investissements en France s’avère être très lourd pour les opérateurs. C’est pourquoi, la seule solution pour ne pas diminuer leur marge, serait de mettre en place des stratégies d’économies d’échelle et de mutualisation des coûts.
3) Besoin de modernisation des infrastructures : en retard par rapport à d’autres pays comme les Etats-unis.
Ces derniers sont très en retard au niveau de la couverture réseau par rapport à d’autres pays.
Comme nous le disions juste au-dessus, pour moderniser le secteur en France, il faudrait faire de lourds investissements. Or les opérateurs n’ont pas les moyens d’investir tout seul. L’augmentation de leur prix ne suffirait pas et dans tous les cas il serait impossible pour eux de les augmenter. En effet, il leur faudrait une véritable raison pour pouvoir prétendre à une augmentation des prix. Le seul moyen de faire des lourds investissements est de consolider le secteur. Un rapprochement entre opérateurs leur permettrait de devenir des acteurs incontournables du marché des Télécoms. En améliorant les réseaux et les équipements radio de 4ème génération, il pourrait mette en place des offres premium et justifier la hausse des prix. En conséquent, il se démarquerait de leurs concurrents low cost et pourrait de nouveau faire de la croissance interne.
4) Mise en place des stratégies : cession d’activités non stratégiques et acquisitions.
Dans un contexte concurrentiel sous tension, la cession d’actif non stratégique et les fusions-acquisitions deviennent des précieux outils pour reprendre les commandes de leur stratégie sociale et se désendetter.
Les différents opérateurs télécoms français ont déjà largement commencé.
D’une part, Orange a vendu un nombre important de ses “legacy assets” (actifs non stratégiques) pour réduire sa dette et se concentrer sur un nombre plus restreint de pays. On retrouve également Alcatel et Vivendi qui se sont recentrés sur leur cœur de métier. Alcatel s’est débarrassé progressivement de toutes ses activités non liées aux télécommunications: de la presse (lLExpress) au nucléaire, des câbles (devenus Nexans) à Alstom. Quant à Vivendi, depuis quelques années, le groupe joue la carte de rendement avec un profil très défensif. En 2013, l’entreprise qui possédait 61 % d’Activision Blizzard, a cédé 49 % de ses actions à des actionnaires minoritaires du groupe. La même année, le groupe vend 53% de sa participation de Maroc telecom. Puis, elle poursuit sa stratégie en annonçant la vente de l’opérateur SFR à Numéricable. Et enfin en 2014, elle se sépare de GVT pour la céder à Telefonica.
Ensuite en 2014, un accord de mutualisation sur une partie des réseaux mobiles de Bouyges et SFR se met en place. Cet accord a mis du temps à se mettre en place à cause de nombreux obstacles. Peu de temps après, Orange avait déposé une plainte sur cet accord qui la jugeait anticoncurrentielle. Finalement, l’accord a été accepté par l’autorité de la concurrence. Les synergies leurs permettront de moderniser l’économie numérique et d’offrir une meilleure couverture géographique. La mise en commun des ressources et la coordination des actions leur permettront de limiter les coûts d’investissements et donc de mieux supporter la concurrence.
D’autres part, la même année, SFR est rachetée par Numéricable. Cette fusion se présente comme une véritable aubaine pour les deux groupes. SFR-Numéricable pourrait devenir un champion national grâce à la mise en commun de leurs synergies. La notoriété du groupe SFR, en tant que fournisseur d’accès internet et mobile, et la technologie fibre utilisée par Numéricable qui pourrait accélérer le passage des abonnés SFR à la fibre, sont des réelles avantages à la fusion des deux groupes.
Les entreprises doivent donc s’adapter sans cesse et se développer dans un secteur où il faut être rapide et compétitif. C’est pourquoi, ils élaborent des stratégies de développement via des partenariats, des acquisitions et des opérations de Joint Venture.
5) Fusions nationales et internationales
Beaucoup d’économistes prônent la mise en place d’une consolidation domestique avant de faire une consolidation transfrontalière. Une consolidation au niveau national serait moins risqué et plus riche en synergies. Par la suite, une fois que les groupes ont acquis une réelle taille critique au niveau national, chacun pourrait se pencher sur une consolidation transfrontalière pour obtenir des marchés matures et ainsi faire de la croissance externe.
En conclusion, on peut dire que les opérateurs ont pris en compte la guerre des prix, les enjeux technologiques et les besoins en déploiement d’infrastructures dans leurs stratégies. Les opérateurs télécoms trouveront une solution à ces différents enjeux dans la consolidation du marché.