La bataille pour la composition du conseil de Lagardère s'intensifie
01 Septembre 2020 - 2:28PM
Dow Jones News
PARIS (Agefi-Dow Jones)--La tension monte d'un cran entre Lagardère
et ses deux premiers actionnaires. Excédés par le refus du groupe
de médias et de distribution d'accéder à leur demande de
convocation d'une assemblée générale exceptionnelle (AGE) et par sa
gestion jugée partiale des organes de gouvernance, Amber Capital et
Vivendi ont annoncé leur intention de saisir la justice.
"Le conseil de surveillance et la gérance de Lagardère ayant refusé
les propositions respectives d'Amber Capital et de Vivendi, ces
derniers vont saisir le tribunal de commerce de Paris d'une demande
de convocation d'assemblée générale", indique un communiqué
conjointement envoyé par Amber Capital et Vivendi, qui détiennent
respectivement 20% et 23,5% du capital de Lagardère.
Contacté par l'agence Agefi-Dow Jones, un porte-parole de Lagardère
n'était pas disponible dans l'immédiat pour commenter cette
information.
Dans une lettre adressée à Lagardère à la fin août, Amber Capital
avait demandé au groupe de convoquer une assemblée générale pour
procéder à une refonte partielle de son conseil de surveillance. Le
fonds d'investissement exige la révocation de trois membres dont
l'ancien président du directoire de la SNCF, Guillaume Pepy. Pour
les remplacer, le fonds activiste propose la nomination de son
fondateur, Joseph Oughourlian, de son "managing partner", Olivier
Fortesa, et de Valérie Ohannessian, présidente de Phémia Conseil,
une société spécialisée dans la stratégie et la gouvernance des
entreprises.
De son côté, Vivendi avait proposé à Lagardère la nomination de
Virginie Banet, administratrice indépendante et ancienne directrice
des relations investisseurs de Lagardère, au conseil de
surveillance du groupe de médias et de distribution.
Deux membres du conseil ont démissionné
Lundi soir, Lagardère a assuré que son comité des nominations, des
rémunérations et de la responsabilité sociale et environnementale
(RSE) s'était "saisi de la candidature de Virginie Banet, qu'il
examinera notamment au regard de son indépendance et des critères
rappelés dans le document d'enregistrement universel 2019". Il a
ajouté que, "dans ce contexte, la gérance se rapprochera(it)
d'Amber pour ouvrir un dialogue de même nature". Virginie Banet
pourrait ainsi remplacer Yves Guillemot, le directeur général
d'Ubisoft ayant décidé de quitter le conseil de surveillance de
Lagardère quatre mois seulement après le renouvellement de son
mandat.
Mais derrière sa volonté affichée "d'ouvrir un dialogue
actionnarial constructif et apaisé", Lagardère a également annoncé
lundi avoir coopté Valérie Bernis, ancienne directrice générale
adjointe d'Engie actuellement administratrice d'Atos. Elle
intégrera son conseil de surveillance en remplacement d'Aline
Sylla-Walbaum, également démissionnaire.
Cette cooptation pourrait échouer à apaiser les tensions. "La
cooptation de Valérie Bernis prouve que Lagardère gère ses organes
de gouvernance de manière partiale", commente une source proche du
dossier, qui constate que cette cooptation n'a "manifestement pas
fait l'objet d'un examen aussi approfondi que celui qui attend la
candidature Virginie Banet".
"Valérie Bernis a pour elle sa proximité avec Bernard Arnault, par
l'intermédiaire de Nicolas Bazire, dont elle est particulièrement
proche pour l'avoir côtoyé au cabinet d'Edouard Balladur au milieu
des années 1990 puis aux conseils d'administration d'Atos et de
Suez", ajoute cette même source.
Le spectre d'un démantèlement de Lagardère
Nicolas Bazire est depuis 1999 le directeur général de Groupe
Arnault, la société d'investissement de la famille propriétaire de
LVMH, qui doit justement acquérir début septembre 27% du capital de
Lagardère Capital & Management (LCM), la holding personnelle
d'Arnaud Lagardère. LCM porte la part de 7,3% détenue par Arnaud
Lagardère au capital du groupe fondé par son père, Jean-Luc
Lagardère.
L'entrée imminente de Groupe Arnault au capital de LCM se veut
amicale et permettra dans un premier temps au gérant commandité de
Lagardère de régler ses problèmes d'endettement. Mais elle accorde
à Bernard Arnault une position incontournable dans la chaîne de
contrôle du groupe Lagardère. En plus de porter la part de 7,3%
détenue par Arnaud Lagardère au capital du groupe de distribution
et de médias, LCM intégrera la détention de la société en
commandite Arjil Commanditée-Arco, où se situe le vrai centre de
contrôle de Lagardère.
La bataille pour la gouvernance chez Lagardère est loin d'être
terminée. D'autant que les observateurs du dossier estiment que sa
finalité porte sur de colossaux enjeux : mettre la main sur les
meilleurs actifs dans les médias, l'édition et la distribution dans
les aéroports ou les gares d'un groupe affaibli.
-Dimitri Delmond, Agefi-Dow Jones; +33 (0)1 41 27 47 31;
ddelmond@agefi.fr ed: ECH
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