Yuka Hayashi,
The Wall Street Journal
WASHINGTON (Agefi-Dow Jones)--Au cours de sa campagne, le président
élu, Joe Biden, a mis en avant son intention de travailler en
étroite collaboration avec les alliés des Etats-Unis afin
d'atténuer les tensions commerciales et de faire pression sur la
Chine pour qu'elle respecte les règles internationales.
Il aura rapidement plusieurs occasions de mettre en œuvre ses
projets après sa prestation de serment le 20 janvier.
Le nouveau président aura l'opportunité d'essayer de résoudre la
lutte de pouvoir opposant, au sein de l'Organisation mondiale du
commerce (OMC), les Etats-Unis à la plupart des autres Etats
membres.
Il aura aussi la possibilité de supprimer les droits de douane
imposés par l'administration Trump sur les importations d'acier et
d'aluminium, qui ont agacé les partenaires commerciaux.
De plus, il pourrait faire son entrée sur la scène économique
mondiale en demandant la tenue d'une réunion d'urgence du G20 en
début d'année prochaine, pour en faire, comme l'ont suggéré
certains anciens responsables économiques, le cadre d'un sommet non
officiel avec le président chinois Xi Jinping.
La semaine dernière, Joe Biden a montré son intention de rompre
avec l'orientation du président actuel, Donald Trump, qui s'était
détourné de certains accords internationaux, en nommant John Kerry
au poste de représentant spécial pour le climat. L'ancien
secrétaire d'Etat se focalisera sur les politiques à l'échelle
mondiale.
Voici un aperçu des domaines dans lesquels le président élu
pourrait rapidement imprimer sa marque en matière de commerce
mondial et de questions économiques.
Direction de l'OMC
L'une des premières mesures que Joe Biden pourra prendre sera de
mettre fin à l'impasse pour le choix du nouveau dirigeant de l'OMC.
L'administration Trump s'est opposée à la candidate soutenue par la
plupart des pays membres, Ngozi Okonjo-Iweala, ex-ministre
nigériane des Finances et ancienne directrice générale de la Banque
mondiale.
L'administration Trump assurait que Ngozi Okonjo-Iweala manquait
d'expérience en matière de commerce mondial, et a préféré apporter
son soutien à Yoo Myung-hee, la ministre sud-coréenne du
Commerce.
Que l'une ou l'autre des candidates soit choisie, il s'agira de la
première femme à diriger l'organisation. Ngozi Okonjo-Iweala
serait, de plus, la première dirigeante de l'OMC à être originaire
d'un pays africain.
Traditionnellement, le choix du dirigeant de l'OMC se fait par un
vote à l'unanimité. L'administration Biden pourrait mettre fin à la
situation de blocage en acceptant la candidate nigériane.
L'influence de la Chine à l'OMC est une autre source d'attention.
Si Myung-hee Yoo était choisie, Pékin pourrait, selon les
spécialistes, perdre le poste de directeur général adjoint à l'OMC.
Au sein de l'organisation, les sièges sont en effet attribués en
respectant un équilibre entre les régions du monde, et l'Asie
serait alors représentée par Myung-hee Yoo.
La Maison-Blanche n'a pas répondu à notre demande de commentaires
destinée à savoir si cette règle avait été un facteur de son
soutien à Myung-hee Yoo.
L'administration Trump n'est pas la première à avoir une dent
contre l'OMC. L'administration Obama avait bloqué la nomination de
juges au sein de l'organe d'appel de l'organisation. Pour
Washington, ils avaient outrepassé leur mandat juridique et rendu
des décisions favorisant, de manière partiale, ses concurrents, en
particulier la Chine.
Joe Biden s'est engagé à travailler davantage avec la communauté
internationale, mais il a également promis d'être ferme vis-à-vis
de la Chine. L'équipe de campagne de Joe Biden n'a pas répondu aux
questions relatives à la direction de l'OMC ainsi qu'à d'autres
concernant des sujets commerciaux.
Brian Pomper, directeur exécutif de l'Alliance for Trade
Enforcement, un groupement d'associations de professionnels qui
plaide pour que les gouvernements étrangers mettent fin à leurs
pratiques commerciales déloyales, estime que Joe Biden se ralliera
probablement au consensus.
"Ce serait une manière judicieuse de montrer qu'il est plus
multilatéraliste et qu'il est prêt à prendre en compte ces
institutions internationales", remarque Brian Pomper.
Lui comme d'autres estiment que Joe Biden devrait également
commencer à prendre des mesures pour permettre à l'OMC de renouer
avec son rôle d'arbitre des différends commerciaux. Donald Trump
affirmait que l'OMC était partiale et son administration a bloqué
les nominations de nouveaux juges au sein de son organe d'appel.
Conséquence, le rôle de l'organisation dans le règlement des
différends s'est retrouvé paralysé.
"Concernant la réforme de l'OMC, nous devons commencer par prendre
des mesures qui ramènent de la confiance", explique John Neuffer,
président de la Semiconductor Industry Association. "Il est
important que le système de règlement des différends de l'OMC
redevienne pleinement opérationnel. Ce système a été positif pour
notre industrie et beaucoup d'autres", ajoute le responsable.
Droits de douane sur l'acier
Parmi l'ensemble des droits de douane imposés Donald Trump, ceux
sur les importations d'acier et d'aluminium sont les plus
significatifs. Ces taxes, de 25% sur l'acier et de 10% sur
l'aluminium, ont été mises en place pour des raisons de sécurité
nationale. Donald Trump avait déclaré qu'elles étaient nécessaires
afin de protéger une industrie vitale pour la défense
nationale.
Leurs résultats ont toutefois été mitigés pour les entreprises
sidérurgiques américaines et elles ont nui aux industriels
américains qui se sont retrouvés confrontés à des mesures
douanières de rétorsion ou à l'augmentation du coût de leurs
importations d'acier.
Washington a exempté de droits certains pays amis comme
l'Australie, le Mexique et la Corée du Sud, mais les a maintenus
pour d'autres, notamment l'Union européenne et le Japon.
Selon les experts, la levée de ces droits pour les alliés au cours
des premiers mois du mandat contribuera grandement à adoucir les
relations avec les partenaires des Etats-Unis, en particulier
l'Europe, avant que la nouvelle administration ne commence à
s'attaquer aux problèmes commerciaux bilatéraux, de plus en plus
nombreux.
Le vieux différend sur les avions construits par Boeing et Airbus
s'est aggravé le mois dernier avec la menace européenne d'imposer,
en rétorsion, des droits de douane d'un montant de 4 milliards de
dollars sur les produits américains. Simultanément, les tensions
s'intensifient au sujet des taxes européennes sur les services
numériques qui affectent les entreprises technologiques
américaines.
"Le signal le plus fort que le président élu Biden puisse envoyer
est d'abroger purement et simplement [les tarifs douaniers]. Cette
décision relève totalement de son autorité", explique le directeur
général de Rock Creek Global Advisors, Michael Smart, ex-élu
démocrate au Congrès et ancien conseiller de la Maison-Blanche.
Pour contrer l'opposition des entreprises, des syndicats et des
parlementaires, Michael Smart affirme que la nouvelle
administration pourrait mettre en place d'amples mesures de
contrôle sur les importations des alliés, identiques à celles
existantes pour le Mexique et le Canada dans l'accord
Etats-Unis-Mexique-Canada.
Autorité en matière de promotion commerciale
La nouvelle administration doit décider ce qu'il convient de faire
dans le cadre son Autorité en matière de promotion commerciale
(TPA) : cette législation spéciale permet aux responsables du
commerce de soumettre tout accord dans ce domaine au Congrès pour
une approbation accélérée.
L'actuelle TPA doit expirer le 1er juillet et sa procédure de
renouvellement promet d'être conflictuelle, en particulier si les
républicains conservent le contrôle du Sénat. Les visions des
partis divergent sur la protection des travailleurs et
l'environnement dans le cadre des futurs accords commerciaux.
L'expiration de la TPA aura également une influence sur le
positionnement de l'administration Biden concernant la poursuite
des négociations en vue d'un accord commercial bilatéral avec le
Royaume-Uni, entamées par l'administration Trump sur la base de
celle-ci. Il semble que ces négociations en soient à un stade
avancé.
Sommet d'urgence du G20 ?
Plusieurs responsables des anciennes administrations démocrates,
dont l'ancien secrétaire au Trésor Larry Summers, ont demandé à Joe
Biden de faire pression pour que les pays du G20 tiennent en sommet
d'urgence au début de l'année prochaine afin d'établir un programme
mondial de lutte contre la pandémie de coronavirus.
Les dirigeants du G20 pourraient se rallier à l'idée d'une relance
budgétaire durable afin de garantir de la croissance et s'engager à
aider les pays en développement. Donner un nouvel élan à l'OMC
pourrait également faire partie des sujets de discussion, selon ces
anciens responsables.
Une telle réunion pourrait également donner à Joe Biden l'occasion
de rencontrer de hauts responsables chinois, ce pays étant membre
du G20. "D'une certaine façon, cela permettrait de contourner le
problème sur la manière d'engager un dialogue bilatéral avec la
Chine", analyse Matthew Goodman, vice-président senior du Centre
d'études stratégiques et internationales (CSIS), qui figure au
nombre des avocats de cette réunion.
-Yuka Hayashi, The Wall Street Journal. ed: ECH
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December 02, 2020 03:41 ET (08:41 GMT)
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