Pour briller en Bourse, Engie et EDF devront turbiner dans les renouvelables -DJ Plus
06 Mai 2021 - 9:46AM
Dow Jones News
François Schott,
Agefi-Dow Jones
PARIS (Agefi-Dow Jones)--L'Hexagone peut se targuer d'avoir l'une
des électricités les plus décarbonées au monde. Toutefois, les
énergéticiens français ne seront probablement pas les principaux
bénéficiaires du boom des énergies renouvelables attendu au cours
des dix prochaines années.
Selon un classement établi par UBS, EDF n'arrive qu'à la septième
place mondiale en capacité installée éolienne et solaire, et Engie,
douzième. Même s'ils ont chacun relevé leurs ambitions dans ce
domaine en 2020, les deux groupes français risquent le décrochage
au cours des dix prochaines années.
Alors qu'EDF - dont l'assemblée générale a lieu ce jeudi - compte
doubler ses capacités installées d'énergies renouvelables, à 60
gigawatts (GW) en 2030, l'italien Enel vise le double, 120 GW,
moyennant un investissement de 70 milliards d'euros. L'espagnol
Iberdrola entend sur la même période tripler ses capacités pour
atteindre 95 GW.
Concurrence des compagnies pétrolières
Dans cette course aux gigawatts verts, les compagnies pétrolières
font aussi figure de sérieux concurrents. Total projette
d'installer 35 gigawatts d'énergies renouvelables d'ici à 2023
tandis que le britannique BP vise une capacité de 50 gigawatts à la
fin de la décennie.
Ces investissements devraient s'avérer payants. Les "utilities"
européennes qui réalisent dès aujourd'hui plus de 65% de leur
excédent brut d'exploitation (Ebitda) dans les renouvelables et
continuent à développer leur portefeuille de projets peuvent
escompter une croissance annuelle de 5% à 10% de leurs bénéfices
par action d'ici à 2030, nettement supérieurs à la moyenne
historique du secteur, selon Goldman Sachs. Dans ce groupe, la
banque range le danois Orsted, le portugais EDP, les espagnols
EDPR, Iberdola, Endesa et Acciona, l'italien Enel, l'allemand RWE
et le britannique SSE.
Du fait de la prédominance du nucléaire et du gaz dans leur mix
respectifs, EDF et Engie n'entrent pas dans cette catégorie. Le
retard pris par les électriciens français dans la course aux
renouvelables explique en grande partie leur décote boursière.
Selon UBS, l'action Engie se traite à 12,3 fois les bénéfices
attendus pour 2021, celle d'EDF à 14,6 fois, contre une moyenne de
19,6 fois pour l'indice Stoxx Europe 600 Utilities.
Des plans de transformation à déployer rapidement
Cet écart risque de perdurer, à moins qu'EDF et Engie ne
parviennent à simplifier leurs modèles et à dégager des ressources
pour accélérer dans les énergies renouvelables.
Le patron d'EDF Jean-Bernard Lévy estime que le projet 'Hercule' de
séparation des activités du groupe pourrait permettre de doubler
l'objectif de capacités installées à 100 GW en 2030. Problème: ce
projet semble s'enliser alors que l'Etat actionnaire peine à
concilier les exigences de la Commission européenne et celles des
syndicats. Les investisseurs pourraient douter de la volonté du
gouvernement de faire aboutir le projet avant l'élection
présidentielle de 2022 après les récentes déclarations du ministre
de l'Economie, Bruno Le Maire, qui a estimé que le nom d"Hercule'
devait être abandonné.
De son côté, Engie a annoncé vouloir céder un ensemble d'actifs,
estimés entre 8 et 10 milliards d'euros par les analystes, afin de
se concentrer sur le développement du gaz naturel et des énergies
renouvelables. Cette réorientation des investissements vers des
activités en croissance devrait augmenter la valeur d'Engie de 1,15
euro par action dès sa mise en œuvre, estiment les analystes d'Oddo
BHF.
Mais là encore, la transformation pourrait prendre du temps. La
réalisation des cessions pourrait s'étaler jusqu'en 2022, décalant
d'autant la résorption de la décote boursière d'Engie, indique UBS.
La banque, qui reste à l'achat sur le titre, a cependant réduit son
objectif de cours à 15 euros au lieu de 15,65 euros, en raison de
la patience demandée aux investisseurs.
A 12,5 euros, le titre Engie évolue loin de son niveau "pré-Covid"
de plus de 16 euros. Depuis l'introduction en Bourse de GDF-Suez en
2008, le titre a été divisé par trois. De son côté EDF a vu son
cours divisé par deux depuis son introduction en Bourse en 2005, en
dépit de plusieurs plans de recapitalisation par l'Etat.
Dans un secteur en pleine mutation, l'immobilisme n'est plus une
option pour les deux champions français de l'énergie. Les
investisseurs pourraient y voir la principale raison de croire en
une transformation salutaire.
-François Schott, Agefi-Dow Jones; +33 (0)1 41 27 47 92;
fschott@agefi.fr ed: ECH
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