LONDRES (Agefi-Dow Jones)--Les touristes américains réalisent de très bonnes affaires ces temps-ci dans les boutiques de luxe de Paris et Milan. Selon les données concernant les remboursements de TVA de la société de paiements Planet, les dépenses de luxe des Américains dans les grandes villes européennes au troisième trimestre ont dépassé de plus de 80% celles de la période correspondante de 2019, avant la pandémie de Covid-19.



Il a toujours été un peu moins coûteux d'acheter des articles de créateurs européens sur le marché où ils ont été fabriqués. Les produits vendus aux Etats-Unis ou en Chine présentent un surcoût destiné à couvrir des frais comme les droits d'importation et les coûts de transport. Dernièrement, cette prime a néanmoins atteint des niveaux extrêmes. Le même produit vendu aux Etats-Unis et en Europe coûte maintenant 38% plus cher outre-Atlantique, selon les données de Bank of America, contre un surcoût habituel de 20%.



La vigueur du dollar n'est pas seule en cause et il n'est pas sûr que la situation perdure dans la mesure où la Banque centrale européenne (BCE) suit les traces de la Réserve fédérale (Fed) en matière de resserrement de la politique monétaire. "La BCE est un peu en retard par rapport à la Fed en ce qui concerne les relèvements de taux, mais la trajectoire est la même. Ce grand écart pourrait disparaître de lui-même", note Luca Solca, analyste du secteur du luxe chez Bernstein. Ce n'est toutefois pas non plus garanti : les taux d'intérêt dans la zone euro devraient atteindre un pic à 3,1% l'an prochain, contre 5,1% attendus pour la Fed.



Une clientèle désormais locale



Les marques de luxe pourraient relever leurs prix en Europe pour rééquilibrer la situation, mais la prudence s'impose. Trois ans plus tôt, elles n'auraient certainement pas hésité mais la pandémie a depuis rebattu les cartes de leur activité. En 2019, près de la moitié des ventes totales de produits de luxe en Europe étaient liées aux achats de touristes étrangers, notamment chinois. Aujourd'hui, les touristes asiatiques étant moins nombreux à se rendre en Europe, les marques dépendent davantage de la clientèle locale.



De fortes hausses de prix pourraient gêner les clients européens et les marques ne peuvent pas déterminer avec certitude quels montants resteraient acceptables. Bien que les dépenses de luxe se soient étonnamment bien tenues, la plupart des griffes ont déjà relevé leurs prix de 8% cette année et la confiance des consommateurs européens est assez faible à l'approche d'un hiver qui s'annonce difficile.



Les maisons européennes n'ont pas non plus de réelles raisons de vouloir rééquilibrer la tendance en baissant les prix dans leurs boutiques américaines. La plupart de leurs coûts étant libellés dans leur propre devise, la faiblesse de l'euro favorise leurs marges. Par ailleurs, elles ne sont plus soumises aux mêmes pressions que par le passé pour remédier à ces écarts de prix.



Voilà plusieurs années, les articles de luxe affichaient en Europe des prix inférieurs de près de 50% à ceux pratiqués en Chine, en raison des fluctuations du taux de change euro-yuan. Les "daigou", intermédiaires chinois qui achètent des produits à l'étranger pour les revendre à leurs compatriotes en Chine, pouvaient ainsi profiter de visites en Europe pour faire des achats, envoyer les produits en Chine pour un coût inférieur à celui pratiqué par les boutiques chinoises, tout en empochant un profit intéressant. Le surcoût payé par les clients chinois a augmenté récemment de 5 points de pourcentage pour atteindre 35%, mais les voyages vers l'Europe sont encore trop compliqués pour qu'ils puissent l'éviter. Jusqu'à présent, les entrepreneurs américains n'ont pas tiré parti de la même façon de cette opportunité d'arbitrage.



En fonction notamment des décisions que prendront les banques centrales, les produits de luxe européens pourraient rester particulièrement attrayants pour les Américains pendant quelque temps encore.



-Carol Ryan, The Wall Street Journal



(Version française Emilie Palvadeau) ed: VLV



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November 15, 2022 06:18 ET (11:18 GMT)




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