(Actualisation: rencontre entre les dirigeants des deux banques
jeudi, réaction en Bourse, déclaration du ministre allemand des
Finances, résultats de Deutsche Bank au premier trimestre)
LONDRES/FRANCFORT (Agefi-Dow Jones)--Les banques allemandes
Deutsche Bank et Commerzbank ont mis fin jeudi à leurs discussions
en vue d'un rapprochement, réduisant ainsi à néant les espoirs du
gouvernement allemand de redresser les deux groupes en créant un
champion allemand du secteur bancaire.
"Après une analyse attentive, il est devenu évident qu'un tel
rapprochement ne serait pas dans l'intérêt des actionnaires des
deux banques ou d'autres parties prenantes", a déclaré
Commerzbank.
L'échec des pourparlers pourrait inciter d'autres établissements
financiers à mettre la main sur l'une ou l'autre des deux banques
allemandes et pourrait augurer le plus vaste mouvement de
consolidation dans le secteur bancaire européen depuis la crise
financière.
Après des années de flirt, Deutsche Bank et Commerzbank avaient
annoncé en mars l'ouverture de négociations officielles en vue
d'une fusion. Confrontées aux pressions de leurs actionnaires et du
gouvernement allemand, les deux banques cherchent un moyen de se
redresser après des années de restructuration et de performances
financières décevantes.
Un rapprochement aurait permis aux deux groupes de réduire
considérablement leurs coûts en supprimant des dizaines de milliers
d'emplois et en abaissant les coûts de financement de Deutsche
Bank, grâce à une prise de participation directe de l'Etat dans la
banque et aux importants dépôts de la banque de détail de
Commerzbank.
Cependant, Deutsche Bank et Commerzbank ne sont pas parvenues à
déterminer comment surmonter les difficultés d'intégration des
technologies, des services administratifs et d'autres activités des
deux banques. Elles n'ont pas non plus trouvé de solution à la
dilution à laquelle les actionnaires auraient été confrontés en cas
de rapprochement.
Les présidents du directoire et du conseil de surveillance des deux
banques se sont rencontrés jeudi matin à Francfort pour sceller la
décision de renoncer à un rapprochement, a indiqué une personne
informée de cette réunion. Deutsche Bank envisageait de se retirer
des négociations depuis une semaine, en raison des coûts et de la
complexité d'une fusion ainsi que de difficultés à convaincre les
actionnaires de l'intérêt d'une alliance, ont précisé des personnes
proches des discussions.
De son côté, Commerzbank, qui souhaitait conclure un accord,
commençait à perdre patience, ont souligné certaines sources.
Certains conseillers de la banque avaient l'impression que les
dirigeants de Deutsche Bank étaient divisés sur la stratégie de la
banque, au détriment des discussions avec Commerzbank.
A la Bourse de Francfort, le titre Deutsche Bank reculait de 0,3%
en début d'après-midi, après avoir gagné jusqu'à 4% dans la
matinée. L'action Commerzbank accusait un repli de 2,3%.
Commerzbank susceptible d'être reprise par une banque étrangère
En l'absence d'un rapprochement, les deux banques vont devoir
relever une myriade de défis. Commerzbank est toutefois considérée
par de nombreux investisseurs comme la plus stable des deux
banques. Depuis 2016, elle a réduit ses effectifs et s'est
concentrée sur les dépôts et les prêts commerciaux. Cela lui a
permis d'augmenter sa base de clients ainsi que le volume de prêts
accordés aux entreprises allemandes de taille moyenne.
Ces mesures ont également contribué à en faire une cible
potentielle pour des banques non allemandes. UniCredit, qui possède
sa propre filiale en Allemagne, a indiqué qu'elle pourrait
soumettre une offre pour Commerzbank si les négociations avec
Deutsche Bank échouaient, selon une personne proche de la banque
italienne. Les investisseurs et les analystes estiment que les
autres grandes banques de la zone euro, dont BNP Paribas, Banco
Santander et ING, pourraient être d'autres candidates au rachat de
Commerzbank.
Deutsche Bank, en revanche, pourrait devoir affronter seule un
avenir difficile. Elle est beaucoup plus dépendante que Commerzbank
des activités de trading et de banque d'investissement, a perdu des
parts de marché au profit de ses concurrentes américaines dans des
secteurs clés et souffre de coûts de financement plus élevés que
nombre de ses concurrents. Signe du scepticisme des investisseurs,
son cours de Bourse représente un tiers seulement de sa valeur
comptable déclarée.
Certains investisseurs et analystes estiment que Deutsche Bank doit
réduire la voilure ou se retirer des activités de banque
d'investissement qui perdent de l'argent, avec ou sans fusion.
Deutsche Bank a étudié ses options pour remodeler certaines
activités, y compris la création d'une structure de défaisance qui
hébergerait ses actifs indésirables et susceptibles d'être
liquidés.
Possible rapprochement entre DWS et la gestion de fortune d'UBS
Les responsables de sa division de gestion de fortune, DWS, qui est
cotée en Bourse, ont discuté d'un éventuel rapprochement avec les
activités de gestion de fortune de la banque suisse UBS, entre
autres options, selon des personnes proches du dossier. Dans le
cadre d'une telle opération, Deutsche Bank resterait probablement
le principal actionnaire de DWS, avec l'objectif de développer
l'entité issue de la fusion, tandis qu'UBS détiendrait une
participation dans cette dernière.
Ces pourparlers ne sont pas exclusifs et il n'est pas certain
qu'ils aboutissent à un accord, a indiqué une personne proche du
dossier, en précisant que le calendrier d'un éventuel accord est
incertain. Jeudi matin, le patron d'UBS, Sergio Ermotti, a refusé
de commenter les spéculations sur un rapprochement avec DWS.
Deutsche Bank et Commerzbank restent aux prises avec des taux
d'intérêt négatifs en zone euro, qui pèsent sur les marges nettes
d'intérêt. Elles sont également confrontées à un marché très
concurrentiel en Allemagne.
L'échec des négociations représente un coup dur pour le
gouvernement allemand, actionnaire à 15% de Commerzbank, qui
cherchait à créer une banque plus forte pour financer la croissance
de la base industrielle du pays, dans un contexte de ralentissement
économique. Tout en prenant acte de la décision de Deutsche Bank et
Commerzbank de renoncer à une fusion, le ministre allemand des
Finances, Olaf Scholz, a déclaré jeudi que les entreprises
allemandes avaient besoin de banques compétitives au niveau
mondial.
Deutsche Bank et Commerzbank avaient engagé des discussions après
que le gouvernement allemand les a assurées qu'il ne s'opposerait
pas aux dizaines de milliers de suppressions d'emplois qu'un
rapprochement aurait requis.
Cependant, Deutsche Bank a affirmé jeudi qu'une fusion avec
Commerzbank "n'aurait pas apporté d'avantages suffisants pour
compenser l'augmentation des risques d'exécution, des coûts de
restructuration et des exigences de fonds propres". La banque a
également dévoilé, avec un jour d'avance, des résultats
trimestriels meilleurs que prévu.
Au premier trimestre, généralement difficile pour les banques,
Deutsche Bank a dégagé un bénéfice net de l'ordre de 200 millions
d'euros, soit un montant nettement supérieur aux 55 millions
d'euros anticipés par les analystes.
Si le produit net bancaire du groupe et les revenus de la banque
d'investissement ont diminué au premier trimestre, Deutsche Bank a
néanmoins indiqué être en bonne voie pour atteindre ses objectifs
de coûts et de rendement des fonds propres ROTE.
-Jenny Strasburg, Ben Dummett et Patricia Kowsmann, The Wall Street
Journal
(Version française Valérie Venck) ed: ECH - LBO
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April 25, 2019 08:49 ET (12:49 GMT)
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