La politique de couverture des fonds activistes entame leur crédibilité - Plus Europe
05 Mars 2019 - 9:59AM
Dow Jones News
Paul J. Davies et Stephen Wilmot,
The Wall Street Journal
LONDRES (Agefi-Dow Jones)--Avant de miser gros avec l'argent des
autres, mieux vaut accepter d'être soi-même logé à la même
enseigne.
Chez Barclays, Sherborne Investors milite pour obtenir un siège au
conseil d'administration ainsi qu'une réorganisation de l'activité
de la banque britannique. Or il est apparu la semaine dernière que
le fonds new-yorkais a placé près des deux tiers de sa
participation de 5,5% au capital de la banque sous la protection de
dérivés censés limiter ses pertes en cas de chute du titre
Barclays.
Certains actionnaires de long terme jugent la pratique assez
cavalière dans la mesure où Sherborne pousse Barclays à
restructurer en profondeur son activité mondiale de banque
d'investissement. Menées entre autres par Deutsche Bank et Credit
Suisse, ces réformes se sont révélées difficiles et coûteuses à
mettre en place. Le fait que l'action Barclays ait perdu environ un
cinquième de sa valeur depuis l'entrée de Sherborne au capital ne
devrait pas non plus apaiser les esprits.
Les investisseurs activistes desservent sans doute leur cause en
assurant leurs participations. Certains activistes bien en vue,
comme le fonds Trian Partners de Nelson Peltz et Cevian Capital,
premier fonds activiste européen, s'abstiennent précisément de
couvrir leurs positions pour ne pas discréditer l'argumentation
selon laquelle ils agissent dans l'intérêt de tous les
actionnaires. D'autres, comme le fonds Elliott Management de Paul
Singer, ont quasi systématiquement recours à des instruments de
couverture.
Elliott utilise, comme Sherborne, une stratégie de couverture dite
de tunnel (ou collar), portant sur près de la moitié de sa
participation dans Telecom Italia. Vivendi, premier actionnaire de
l'opérateur historique italien, juge que les intérêts d'Elliott
divergent de ceux des autres actionnaires et assure même que le
fonds a réalisé un profit de 300 millions d'euros sur son
investissement, malgré un plongeon de l'action Telecom Italia
depuis qu'Elliott a dévoilé sa participation et commencé l'an
dernier à faire pression pour la mise en place d'une nouvelle
stratégie.
Elliott ayant une position nette acheteuse sur Telecom Italia,
toute plus-value réalisée sur ses couvertures aura sans doute été
contrebalancée par des pertes. Reste qu'avec sa stratégie de
couverture, le fonds activiste bénéficie d'un droit de vote plus
important que ne le justifie son exposition financière. Etant donné
la bataille actionnariale qui l'opposera à Vivendi lors de la
prochaine assemblée générale de Telecom Italia à la fin du mois,
chaque droit de vote compte.
Concernant Barclays, il est possible que Sherborne ait été incité à
utiliser une stratégie de tunnel pour protéger des actions acquises
grâce à un emprunt de 1,4 milliard de livres (1,6 milliard
d'euros). Les dérivés protègent aussi bien le prêteur, dans une
certaine mesure, que Sherborne.
Cette stratégie ne plaît pas à tous les actionnaires : Sherborne a
augmenté ses droits de vote avec un emprunt et limité les risques
associés à une majeure partie de ces droits. Disposant d'une
participation de 2,5 milliards de livres, le fonds new-yorkais
reste exposé à hauteur de plus de 1 milliard de livres mais par
rapport à sa mise, son influence paraît disproportionnée.
Cette façon de procéder est pour le moins équivoque. Les
actionnaires des entreprises visées devraient bien réfléchir à la
réelle exposition des fonds activistes avant de se prononcer sur
leurs revendications.
-Paul J. Davies et Stephen Wilmot, The Wall Street Journal
(Version française Emilie Palvadeau) ed : ECH
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March 05, 2019 03:39 ET (08:39 GMT)
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