Les marchés actions sont de fervents supporters des fusions-acquisitions - DJ Plus
26 Juin 2017 - 10:24AM
Dow Jones News
Olivier Pinaud,
L'Agefi
Paris (Agefi-Dow Jones)--Suez, Elis, Direct Energie, Europcar,
Gecina… Le marché français du M&A vient de connaître ces
derniers jours un coup de chaud inédit depuis des années. Réalisées
dans des secteurs et pour des montants différents, ces opérations
ont néanmoins un point commun: être partiellement financées par
augmentation de capital.
Ce mouvement avait été ouvert par Air Liquide à l'automne 2016 avec
un appel au marché de 3,3 milliards d'euros pour acheter Airgas.
Foncière des Régions puis Elis, une première fois, s'étaient
ensuite engouffrés dans la brèche début 2017 avant que le cycle
électoral vienne geler les projets.
"Des opérations créatrices de valeur"
La reprise des affaires et la réaction des marchés à l'annonce des
opérations prouvent que les investisseurs ne considèrent plus les
M&A comme un facteur de risque, même si l'émission d'actions
nouvelles dilue leurs positions. L'exemple d'Europcar est frappant:
le cours a gagné 1,23% lundi dernier à l'annonce de l'acquisition
de Goldcar, puis 2,7% supplémentaires lors des trois séances
suivant l'augmentation de capital.
"Dans le contexte de marché actuel, avec des indices et des
valorisations proches de leurs plus hauts, les fusions-acquisitions
bien financées et avec une logique industrielle forte sont vues par
les gérants actions comme des opérations créatrices de valeur en
mesure de générer de la performance additionnelle", explique Igor
Donio, responsable de l'equity capital market (ECM) pour la France
chez BNP Paribas.
Sans compter qu'aujourd'hui, "les conditions de financement sur le
marché de la dette sont telles qu'en ajoutant les synergies
éventuelles, une acquisition se révèle rapidement relutive pour le
bénéfice par action, malgré l'effet de dilution lié à
l'augmentation de capital", appuie Jean-Baptiste Giros,
coresponsable de l'ECM France et Benelux chez SG CIB. Pour ces
raisons, les investisseurs actions ne se font donc pas prier pour
suivre une augmentation de capital destinée à financer une
acquisition.
Décotes extrêmement serrées
Un appétit qui profite aux émetteurs, souligne Charles-Henry
Gaultier, en charge de l'ECM pour la France chez Deutsche Bank:
"Les décotes des augmentations de capital se sont resserrées par
rapport aux moyennes historiques, rendant ainsi plus acceptable
pour les entreprises la dilution créée par l'émission des nouveaux
titres." Dans le cas de Suez, la décote de la levée de fonds
destinée à financer le rachat de GE Water n'était que de 2,8%,
contre une moyenne historique pour ce type de placement plus proche
de 5%. L'opération offre donc un gain de valeur immédiat à
l'émetteur.
"Les valorisations élevées limitent le degré de dilution, ce qui
facilite l'acceptation du principe de l'augmentation de capital par
les investisseurs historiques, notamment les fonds de private
equity, d'autant que le M&A permet d'augmenter la taille de
l'entreprise ainsi que la liquidité de son marché et donc, au
final, laisse espérer une meilleure valorisation à terme", insiste
Igor Donio. Eurazeo, pourtant sur une trajectoire de sortie sur ces
dossiers, a par exemple suivi l'augmentation de capital d'Elis en
début d'année et celle, récente, d'Europcar.
Une augmentation de capital en soutien d'une acquisition
"représente aussi un événement de liquidité pour le titre,
notamment pour les entreprises de taille moyenne, ce qui contribue
à lever un frein à l'investissement pour les actionnaires habitués
à entrer sur des parts importantes en capital", ajoute Antoine de
Guillenchmidt, responsable de l'ECM pour la France et la
Scandinavie chez Goldman Sachs. Le fonds de pension canadien CPPIB
va ainsi profiter de la prochaine augmentation de capital d'Elis
pour accroître sa position au capital. En plus d'une volatilité
évaporée, la participation soutenue de ces grands institutionnels
permet de quasiment supprimer le risque inhérent à ce type
d'opération de marché.
Une visibilité quasi parfaite
Les émetteurs et leurs actionnaires disposent ainsi d'une
visibilité quasi parfaite pour se lancer dans une augmentation de
capital, avec une grande possibilité de solutions. La bonne tenue
des cours de Bourse a même permis "de mettre en oeuvre des
augmentations de capital sans droit préférentiel de souscription"
par constitution de livre d'ordres accélérée (accelerated book
building, ABB), souligne Charles-Henry Gaultier. Une voie pourtant
compliquée en raison de contraintes légales, notamment celle
interdisant d'émettre des titres avec une décote de plus de 5% par
rapport à la moyenne des trois derniers cours de Bourse pondérée
par les volumes. En cas de réaction négative de l'action au moment
de l'annonce de l'acquisition, l'ABB devient quasiment impossible à
mettre en oeuvre. Mais vu la réaction des marchés, Suez et Europcar
n'ont eu aucun mal à employer cette solution.
-Olivier Pinaud, L'Agefi ed: ECH
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